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C'est LA série dont tout le monde parle en ce moment et qui caracole déjà en tête des classements à peine mise en ligne, la nouvelle "création" de Shonda Rhymes (et sa première association avec Netflix), qu'on ne présente plus et à qui on doit, entre autres, Grey's Anatomy, Scandal ou encore Murder.
On était en droit d'attendre du lourd ; quoique, les séries de Shondaland sont quand même réputées pour leur mièvrerie et leur côté "cul-cul la praline" prononcé. D'où l'importance de l'utilisation de l'imparfait (et pas que pour le temps employé...).
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Adaptée de la saga littéraire (romance historique) de Julia Quinn, Les chroniques des Bridgerton, la série s'ancre dans la période (ultra adaptée par les Américains férus de romance historique) de la Régence Anglaise, et plus précisément en 1813. On y suit les tribulations d'une famille aisée, les Bridgerton, dont l'aînée des filles, la niaise Daphné, s'apprête à faire son entrée dans le Monde en assistant au traditionnel Bal des Débutantes. Le but ? Parader, attirer l'attention de prétendants pour mieux se marier et se faire engrosser. Jusque là, côté restitution historique on est bon, la saison mondaine londonienne dans toute sa splendeur...

Mais l'arrivée à Londres du ténébreux, dépravé, peu loquace et mystérieux Duc de Hastings (Simon, de son prénom) vient foutre le bordel dans les plans niais prévus de longue date par notre ingénue. Attirés l'un par l'autre mais refusant de succomber à leurs pulsions, Simon et Daphné concluent un pacte visant à feindre une romance naissante entre eux afin d'obtenir, pour Simon, la paix de conclure ses affaires en ville après la mort de son paternel sans être importuné par des matrones désireuses de marier leurs progénitures, et à Daphné d'attirer l'attention d'une pléthore de prétendants afin de trouver chaussure à son pied, et un prince charmant en prime.
Mais à ce jeu-là, ils ne vont duper personne, encore moins eux-mêmes surtout quand la mystérieuse Lady Wistledown (commère/pseudo journaliste) publie son journal de cancans dans lequel elle fait la pluie et le beau temps, brisant des réputations en exploitant à fond tous les scandales pouvant passer à proximité de ses oreilles à rallonges, sa plume à papote étant particulièrement aiguisée, s'attirant par là-même les foudres d'une reine risible, et particulièrement pathétique...

Voilà pour le pitch qui n'amène rien de nouveau, en dépit de la reconstitution historique qui, ici, ne sert strictement à rien, en plus de prendre beaucoup de libertés, de développer bon nombre de non-sens et de collectionner moult anachronismes. En gros, vous prenez un shaker et y incorporez du Gossip Girl, du Downton Abbey, du 50 nuances de merde, du Pretty Little Liars, un peu de Jane Austen (pour la forme, hein, surtout pas pour le fond), vous mélangez et obtenez un ersatz indigeste, ultra concentré en guimauves dégoulinantes de niaiseries, de mièvrerie, de romance à l'eau de rose, de stéréotypes grossiers, de platitudes. Du déjà vu et lu, notamment dans les productions Shondaland (tiens, comme par hasard).

Alors oui, vous allez dire que la série est originale car elle a casté des acteurs de couleurs et d'autres aux formes très généreuses pour mieux mettre en lumière la différence, promouvoir l'intégration, dénoncer la ségrégation, bref, pour coller aux thématiques sociétales si chères à notre époque, et sources de polémiques à répétitions... Oui, certes, mais l'effet est nul et n'apporte rien à l'intrigue. A la différence de ce qu'avait fait avec brio Ryan Murphy dans Hollywood, dernièrement.
Pourtant, on aurait pu penser qu'en plaçant l'intrigue en pleine Régence Anglaise, l'occasion était idéale pour y dénoncer les travers de la société, à la fois celle du début du 19ème, et notre époque. Le soufflet retombe instantanément, tant ici on s'évertue à vouloir faire rêver la Plèbe en lui collant les problèmes des Privilégiés (oh que leur vie est dure !). Bah oui, faut faire rêver les petites gens, hein...
Qu'en est-il de la condition féminine ?

Shonda Rhymes y va-t-elle de son laïus féministe ? Que nenni ! Ici, tout se résume à l'initiation d'une jeune vierge qui finit par se marier et découvrir les travers de la vie conjugale qui n'a, en définitive, rien à voir avec un conte de fée. Ouf ! Mais Daphné reste la femme soumise par excellence, qui ne voit pas plus loin que son utérus qu'elle veut absolument fertiliser, parce que c'est ainsi que sa mère et la société l'ont élevée. La libéralisation sexuelle, alors ? Oui, des scènes hot à profusion mais finalement plates et conventionnelles. Rien d'original ni de révolutionnaire.

Donc pour toutes ces raisons (et bien d'autres), je n'ai pas aimé cette première saison, et cet univers. Oui, ça reste divertissant mais ça ne casse vraiment pas trois pattes à un canard ! En plus, je ne vous ai même pas parlé de l'overdose de couleurs dans les costumes et la photographie ! J'ai frôlé la nausée plus d'une fois ! Et pourtant, je suis très sensible à ces aspects dans une reconstitution historique (et j'adore les couleurs, les tissus...). Peut-être aurait-il fallu lancer cette série au printemps prochain ? ^^

En ce qui concerne les livres, non, je n'ai pas du tout l'intention de les lire, même si j'ai ouï dire que chaque tome serait consacré à l'un des enfants Bridgerton. Quant à la saison 2 (qui à l'heure actuelle n'a pas encore été commandée, mais cela ne saurait tarder), j'y jetterai sans doute un oeil pour confirmer mon impression négative. Mais j'avoue ne pas du tout comprendre ce qui peut susciter un tel engouement chez le public actuellement ? Parce que oui, à première vue c'est fastueux, ça en jette, mais à l'intérieur c'est terriblement creux et sans saveur. Et que dire de la révélation finale de la véritable identité de la mystérieuse et caustique Lady Wistledown (pourtant doublée en VO par Julie Andrews !) ?
Bon, il en faut pour tous les goûts après tout...
Mais si vous recherchez de la romance, de la reconstitution historique de qualité, ou que vous voulez de la Régence, jetez-vous plutôt sur les romans de Jane Austen (ou les films adaptés de son oeuvre avant-gardiste), ou Downton Abbey.

Mise à jour (2022) :
Fatalement, j'ai regardé la 2nde saison que j'ai trouvé bien meilleure ! Puis j'ai revu la série une seconde fois en mettant de côté mes anciens griefs et en voyant dorénavant ce programme comme une uchronie et non une reconstitution historique quelconque, et là ça a marché ! Sans pour autant être un coup de coeur ! Mais j'aime beaucoup la photographie, les costumes, les réorchestrations classiques de tubes modernes et ce point de vue davantage féministe dans le traitement de l'intrigue et de certains personnages. Et alors que j'ai commencé les livres dont est tirée la série, j'y ai vu de très grosses différences qui me font apprécier les deux supports, quoique très différents (évidemment, dans les livres de Julia Quinn il n'y a pas la touche "Shonda Rhymes, et ça fait du bien même si du coup l'histoire est bien moins riche et colorée que ce qu'on voit dans la série).
Comme quoi, les faux départs ça existe et j'aime croire que la série Netflix gagnera en qualité au fil des saisons !

charlotte_camden
7

Créée

le 3 août 2021

Critique lue 289 fois

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