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Connaissant bien le manga Hana yori dango ainsi que son adaptation japonaise en série (datant de 2005), j'avais quelques attentes concernant cette version chinoise de 2018.
Attention, il faut apprécier le genre "drama" qui est particulier pour le public occidental. Cette série constitue néanmoins une bonne entrée en matière pour découvrir les séries romantiques asiatiques. Il faut être prêt, intellectuellement, à baisser sa garde et à absorber des stéréotypes en pagaille.


Commençons par l'histoire en elle-même: il s'agit d'une histoire d'amour mélo-dramatique à souhait, comique, rocambolesque, excessive et à l'eau de rose, bref très fidèle aux "dorama" asiatiques (drama).


D'un côté, une jolie petite étudiante fraîche et naïve (Dong Shancai), arrivée dans une université prestigieuse de Shanghai grâce à ses résultats scolaires et au prix de gros sacrifices financiers pour ses parents. Elle appartient à un milieu social peu aisé et à une famille de petits commerçants dont la culture est simple et sans prétention. Shancai est mignonne, souriante, pleine de confiance en l'avenir. C'est une jeune femme également déterminée et combative qui n'a pas sa langue dans la poche.
De l'autre, nous avons Daoming Si, étudiant plus âgé de la même université, beau, très riche, leader charismatique et redouté d'un quatuor détonant, les "F4". Il s'agit là de quatre garçons très populaires, qui déchaînent les passions des filles et suscitent l'envie ou la crainte auprès de tous les étudiants. Chaque apparition des F4 crée l'émeute, bien que les quatre play-boys sillonnent dédaigneusement la masse de leurs fans en haussant à peine un sourcil.


Les F4 font clairement tout le sel du début de la série, et notamment des premiers épisodes, que je trouve très divertissants: on apprend que les 4 beaux gosses ont des talents exceptionnels, atypiques, qu'ils réussissent non seulement parce qu'ils sont nés dans des familles richissimes (souvent des empires commerciaux chinois), mais aussi grâce à leurs dons naturels, leur intelligence, leur sens inné de la distinction, leur goût pour la prise de risque et la domination sociale. Armés d'un dédain permanent pour le commun des mortels, ils s'adonnent régulièrement à une violence gratuite sur leurs pairs, autant psychologique que physique, par le biais de "convocations" à d'humiliantes parties de bridge. Et oui, les F4 sont champions du monde universitaires de bridge, rien que ça.


Détestables?
Oui, pour la petite Shancai, leur attitude est hautement condamnable et elle est bien déterminée à ne pas se laisser faire.
Non, pour le spectateur, et surtout la spectatrice, tout est désirable dans cette bande.


Les premiers épisodes s’enchaînent, on se sent bien dans ce scénario prévisible et confortable, on ressent des émotions positives, on partage les espoirs et les révoltes de l’héroïne, on dévisage avec le même air ébahi les principaux protagonistes. On a le cœur qui chavire, tout va bien, on était justement là pour ça.


Mais....première déconvenue: Daoming Si, dont l'attitude de départ fonde 90 % de son charisme, se révèle très rapidement immature, puéril, inconstant, pataud voire même comique. La tension dramatique qui pesait sur les épaules de la jeune Shancai descend d'un cran. Très rapidement aussi, le héros passe d'une attitude agressive envers Shancai à une phase de séduction qu'il ne quittera plus jusqu'à la fin de cette trèèèès longue série. Aucun suspens...
Autant la séduction du départ, qui n'allait pas de soi, avec un Daoming Si méprisant et violent, rattrapé par son attirance pour Shancai, pique la curiosité, autant la suite, plus convenue, stéréotypée et mielleuse, nous laisse sur notre faim.


Le scénario de ces très nombreux et très longs épisodes détaille ensuite le parcours semé d’embûches des deux amoureux et de leurs amis. Au bout d'une cinquantaine d'heures d'aventures incroyables, d'obstacles apparemment insurmontables, de torrents de larmes (c'est un drama!), de sourires béats, l'histoire se termine enfin.Ouf!


J'ai trouvé que le premier tiers de la série était de loin le plus intéressant puisqu'on y trouve le nœud de l'intrigue.
Ensuite, le second tiers nous livre ( je dirais plutôt ressasse) une histoire d'amour sans vraie surprise, ainsi que des histoires d'amour secondaires plus ou moins intéressantes.
Le dernier tiers est filmé de manière étrange: les faux rythmes, les invraisemblances se multiplient et on est quand même un peu lassé des méandres amoureux dans lesquels les personnages tentent constamment de surnager. Bref, une fin peu fameuse.


Parlons des qualités principales de la série: il s'agit pour moi: 1) du choix des acteurs masculins, 2) de la qualité des images et des décors, et 3) de la bande originale.


Le casting masculin des F4 a été soigné pour que chaque protagoniste puisse briller dans la série.
Les acteurs Dylan Wang et Darren Chen ( Guan Hong) incarnent bien les personnages qui leur sont attribués:
Le premier, qui incarne Daoming Si, est touchant, amusant dans ses mimiques. Il joue aussi bien le jeune homme pourri gâté, impatient et colérique que l'amoureux attendri et doux. La partie des dialogues qui lui revient est souvent spontanée et cocasse. J'ai trouvé que globalement, il offre un jeu d'acteur à peu près convaincant, à l'exception de quelques scènes un peu trop excessives. Impossible d'être insensible à la beauté de cet acteur, dont le visage quasiment parfait crève violemment l'écran tout au long de la série. Mais est ce suffisant ?

Le second, Darren Chen (Guan Hong), vient équilibrer le tableau. Il joue le meilleur ami du personnage principal, et l'élément structurant du trio amoureux (qui existe, je pense dans presque tous les dramas asiatiques). L'acteur a un joli minois très doux et enfantin, qui colle à la perfection à Huaze Lei, ce personnage rêveur, calme, contemplatif, dont les sentiments sont sans cesse contrariés. Il rayonne de sérénité mais souffre en silence d'un amour passionné et malheureux. J'ai beaucoup aimé ce personnage tout au long de la série, car la souffrance le rend attachant. Tout est cohérent: son mode de vie dans le luxe discret, son style vestimentaire élégant et épuré, son goût et son talent pour la musique, sa voix douce et posée, le regard poétique, bienveillant et triste qu'il pose sur Shancai, les lieux dans lesquels il évolue, son humour décalé. Ce jeune acteur nous livre cet univers de manière saisissante dans des scènes parfois d'une grande beauté.
Les deux autres membres du F4 sont intéressants également, et le scénario nous permet d'en savoir un peu plus sur la vie des personnages secondaires, ce qui finalement nous distrait un peu de l'amour tumultueux et fatiguant des deux personnages principaux.


L'actrice principale a un physique adéquat pour le rôle: petite, dynamique, mignonne sans être absolument fabuleuse, d'une morphologie normale, habillée de manière classique. Elle nous est présentée comme naturelle et normale, comme vous et moi. Elle est sensée rendre l’héroïne crédible, et nous apparaître comme sympathique et juste dans ses prises de positions. Malheureusement, elle incarne un personnage qui finit par être un peu agaçant, voire même chiant comme la pluie. Sous des dehors de femme forte qui exprime vivement son indignation, Shancai est en fait une parfaite épouse asiatique: complètement prude, bonne cuisinière, elle est disposée à faire plaisir à son homme avant tout. J'ai aimé son regard étonné, naïf et éperdu des premiers épisodes, son sourire incrédule, ainsi que sa moue boudeuse et déterminée. Ensuite, passé une dizaine d'épisodes, je me suis un peu lassée de son regard tout rond et larmoyant, et de ses expressions répétitives. Au bout de 20 épisodes, ça m'est devenu carrément pénible de regarder son air effarouché, de supporter son indécision et surtout sa pudeur excessive.


Voilà en effet le problème avec les dramas asiatiques : pas de vraie violence, pas de sang, pas de sexe, même pas de vrais baisers. C'est le genre qui veut ça, d'autant plus que Meteor Garden est une adaptation du manga japonais shojo Hana Yori Dango, qui s'adresse initialement à un public féminin très jeune ( à partir de 8-10 ans). Mais ça devient un problème dans une série aussi longue où sur une cinquantaine d'heure, on doit se contenter de 5 bisous. Le sexe est maladroitement suggéré comme étant "naturel" mais jamais pratiqué, ce qui semble vite absurde avec des personnages sensés vivre en fac, âgés de 18 à 25 ans environ. De naïfs, les personnages principaux, complètement coincés, en deviennent nunuches et c'est très agaçant. Du coup, la scène dans la chambre d'hôtel avec Ximen est rassurante: il ne se jette pas sur l'amie de Shancai ce soir là, mais on devine que c'est son mode de vie habituel. Il faudra s'en contenter.


La question de la richesse m'a aussi interpellé. L'argent est finalement ce qui rend les personnages du F4 populaires, bien plus que leur physique. Ils sont admirés pour leur train de vie et craints pour la capacité de leur famille à écraser économiquement les autres. Arrive Shancai, brave petite que cette puissance financière n'impressionne pas. Elle doit travailler en plus de ses études , la pauvresse, d'autant plus que son père finit par endetter sa famille en spéculant de manière irresponsable. Daoming Si, grand seigneur, paye les dettes de la famille de Shancai avec le million de yuans qu'il a gagné en bourse à l'âge de 18 ans. Avait-il d'ailleurs besoin de ce million de yuans ? Non, simple hobby de gens riches, mais qui sert à faire le bien puisqu'il sauve des gens pauvres. On y croit pas une seule seconde. Les bons principes de Shancai sont ils crédibles lorsqu'elle s'envole pour le Canada ou Hawaï vivre son conte de fée dans les villas de luxe de son petit ami ? Elle s'en défend, mais on y croit toujours pas. Les parents sont bien plus crédibles: ceux de Shancai qui se félicitent de ce gendre richissime, et la mère de Daoming Si, qui se refuse à mêler son fils au bas peuple.
Trop parfaite, Shancai en devient détestable: a-t-elle seulement des défauts ? Non, comme ces gens qui pensent qu'être "perfectionniste" est un défaut, Shancai reconnaît qu'elle manque de confiance en elle. Ce sera là sa seule faille, elle si douée, gentille, modeste, courageuse, désintéressée, travailleuse. Elle passe son temps à se sacrifier pour les autres, telle une sainte. Sérieusement ?


Concernant les décors, la lumière et les costumes, je considère qu'il s'agit de gros points forts, l'université Mingde étant particulièrement belle. Les scènes tournées sur le toit de l'université sont très bien filmées. Les scènes de nuit au milieu des grattes-ciels sont superbes.
Les costumes ont été choisis judicieusement, en particulier ceux du F4. On retrouve 4 styles vestimentaires illustrant parfaitement mais de manière différente le statut social privilégié des protagonistes: tapageur, street wear et moderne pour Daoming Si, épuré et élégant pour Huaze Lei, affuté et pointu pour Yan Ximen, décontracté pour Feng Meizuo. Les robes de soirées sont aussi révélatrices: immaculées, élégantes, somptueuses pour Teng Tangjing , jolies et discrètes pour Shancai, chargées et vulgaires pour les personnages féminins qui s'opposent à Shancai.


Enfin, il faut mentionner la BO, qui est interprétée en partie par les acteurs eux-mêmes, et qui contribue grandement à insuffler de la modernité et du rythme dans la série. Les morceaux sont vivants, doux, gais. Mention spéciale pour le titre " Hua Bei Hou de Wen Rou" de Darren Chen, qui accompagne les moments tristes de la série ( et il y en a beaucoup autour de Huaze Lei). J'ai bien aimé également " For You" de Darren Chen, " Xiang Dou Bu Yong Xiang" de Dylan Wang et Darren Chen. Le titre qui résume bien l'ambiance de la série est pour moi " Cong Lai Mei Xiang Dao" interprété par les 4 acteurs principaux.


Pour conclure, je dirais que cette série a bien évidemment des défauts: un scénario soit trop prévisible, soit trop chaotique, une durée beaucoup trop longue (on aurait pu condenser les 49 épisodes en une vingtaine grand maximum), des personnages un peu agaçants et stéréotypés, des acteurs qui en font des tonnes dans certaines scènes et une fin complètement ratée (selon moi).
Mais ce qui sauve Meteor Garden 2018, c'est la qualité de certaines scènes que j'ai trouvé très belles, la justesse des choix de décors, costumes, le travail réalisé pour mettre en évidence les différences sociales, la bande originale et les deux acteurs masculins principaux.

petitgris
6
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le 23 avr. 2020

Critique lue 6.4K fois

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petitgris

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