A Place in Time

Saison 1 (8/10) :

Pour ma 4400ème critique, quoi de mieux que cette passionnante série produite par maître Coppola himself? Sur une idée déjà très intéressante (4400 personnes disparues au cours du siècle réapparaissent mystérieusement, et ce sans avoir pris une ride), Scott Peters et René Echevarria livrent une réflexion fascinante sur notre société, le tout sans jamais négliger l'importante part science-fictionnelle du récit. Alors que l'on s'attendait surtout à une série efficace en bonne et due forme, on assiste ainsi à quelque chose de beaucoup plus profond, d'une grande lucidité quant à la façon dont serait géré un tel événement.

Aucun angélisme, donc, et si certains prendront évidemment parti pour les « revenants », ces derniers apparaissent souvent comme des cobayes que l'on devrait soumettre à des expériences, voire à des étrangers qui n'ont plus leur place dans cette société. Intérêts politiques et scientifiques, simple volonté de retrouver une vie paisible, comprendre ce qui a pu arriver à ces mystérieux disparus... Chacun a ici des motivations et intérêts très différents, ce que les scénaristes exploitent avec beaucoup de talent, trouvant un bel équilibre dans ce rapport de forces. Porté par l'excellent duo Joel Gretsch - Jacqueline McKenzie et des « premiers seconds rôles » de grand talent (Peter Coyote en tête), ce premier volet est une réussite : quelle chance, la suite le sera tout autant...

Saison 2 (7/10) :

Ouf ! Alors qu'il y avait toujours le risque de voir « Les 4400 » s'effondrer après un remarquable premier volet, il n'en est rien. Si l'effet de surprise est légèrement passé, il est plaisant de voir l'intrigue s'enrichir de manière étonnante, les créateurs trouvant la bonne formule pour explorer plus intensément les possibilités ouvertes dans la précédente saison, tout en évoquant de nouvelles pistes passionnantes, à l'image de cette lutte acharnée pour « contrôler » ces mystérieux revenants.

Étonnant, d'ailleurs, de voir au fur et à mesure à quel point la série devient un récit percutant sur notre société et plus généralement ce qui nous animent, les différentes mentalités et points de vue s'avérant remarquablement développés, le tout de façon relativement nuancé. De la science-fiction « réaliste » ? En tout cas, une seconde saison très pertinente, posant d'excellentes questions et toujours aussi plaisante à suivre : on en redemande...

Saison 3 (7/10) :

Des personnages toujours plus intrigants et parfois mystérieux, un univers vraiment séduisant, un propos intelligent et souvent subtil : pas de doute, cette troisième saison fait honneur à celles l'ayant précédé, d'autant que la tension grandissante entre pro et anti-4400 trouve ici son paroxysme. Il n'est jamais évident de se renouveler tout en gardant une cohérence avec ce qui a été fait précédemment : Scott Peters et René Echevarria le font avec beaucoup de talent, à l'image de l'incroyablement charismatique Jordan Collier, prenant une place de plus en plus importante pour notre plus grand plaisir.

Alors, effectivement, parfois les scénaristes vont un peu loin et on ne voit pas toujours où ces derniers veulent en venir, mais que ce soit la belle intensité dramatique de nos deux héros, l'utilisation intelligente des effets spéciaux et un sous-texte politique toujours percutant, on ne se lasse pas de suivre ce récit vraiment pas comme les autres : en espérant maintenant que le quatrième et dernier volet sera à la hauteur...

Saison 4 (7/10) :

Eh oui, « Les 4400 » s'arrêtent à leur quatrième saison et c'est bien dommage tant la série produite par Francis Ford Coppola avait su nous offrir le meilleur de la science-fiction à la télévision ces dernières années. Pourtant, les tout premiers épisodes de cette ultime saison inquiètent un peu : intrigues moins créatives, ambiguïté moins présente... Heureusement tout ceci ne dure que peu de temps et c'est de nouveau avec plaisir que l'on se replonge dans cet univers mélangeant habilement science-fiction pure et constat social, et ce sans jamais tomber dans la caricature ou la facilité. Alors c'est vrai qu'on pourra peut-être regretter que les deux personnages principaux soient moins présents dans cette dernière saison tant ils forçaient la sympathie, mais c'est en définitive un mal pour un bien tant cette quatrième saison décide de jouer la carte de l'audace en rompant avec ce qui avait pu faire la particularité des saisons précédentes.

En effet, alors que nous soutenions jusqu'alors corps et âme les forces du NTAC, voici que nous nous interrogeons, nous questionnons... Les auteurs ne répondent d'ailleurs jamais à cette question : qu'est-ce qui est au fond préférable pour l'avenir de la planète? Jordan Collier et son fanatisme exacerbé mais sincère et proposant, malgré les dangers, de vraies solutions? Ou au contraire les problèmes moraux que viendraient à imposer un changement aussi radical restent-ils trop importants pour que l'on puisse les accepter? La fin laisse pourtant entrevoir une réponse, mais n'était-ce pas à ce moment en prévision d'une nouvelle saison? Et combien de temps cette situation pourra t-elle durer? Belle réussite en tout cas de divertissement intelligent et séduisant : honnêtement, on en aurait bien repris une petite cinquième...

Critique globale (7/10) :

Les séries parvenant à tenir la distance de la première à la dernière saison sont rares, et rien que pour cela il faut tirer un grand coup de chapeau aux « 4400 ». Cette dernière n'a beau eu avoir « que » quatre volets, celle-ci a su se montrer toujours intelligente et inventive du premier au dernier épisode, ce qui n'est pas donné à tout le monde, loin s'en faut.

D'ailleurs, la fin ouverte de l'ultime saison en dit long : Scott Peters et Rene Echevarria auraient sans doute trouvé sans grande difficultés à aller toujours plus loin dans leur exploration de l'humain et de la société, le tout à base d'enjeux politiques, moraux et sociaux souvent captivants. Les personnages sont pourtant nombreux et auraient pu gêner ces recherches, mais nos deux créateurs parviennent toujours à trouver un brillant équilibre, si bien que ces derniers ne se « gênent » jamais et s'avèrent très complémentaires.

Nous ne sommes jamais dans la « science-fiction pop-corn », et si le spectacle est parfois spectaculaire, il est toujours au service d'une idée, d'un message, offrant à l'ensemble une épaisseur toujours plus grande, d'autant que l'ambiguïté qui s'en dégage parfois s'avère salutaire.

Personne n'est jamais totalement noir ou blanc, et s'il y a quand même moyen de distinguer en général les « bons » des « méchants », la question se pose parfois en d'autres termes, à l'image de ce saisissant « héros » qu'est Jordan Collier. Bref, voilà une série ouvrant beaucoup de portes, lucide sur le monde où nous vivons tout en gardant un minimum foi en l'humain : un divertissement très séduisant, et sans doute un peu plus...