La Famille, c'est (presque toujours) bien

Saison 1 (6/10) :

Plutôt habitué aux séries sombres et tourmentées, je me suis laissé tenter par « This Is Us », production plus familiale à base d'amour, de famille, de solidarité, de disputes, de réconciliations... Je ne vais pas vous la faire à l'envers : sur certains aspects, c'est très formaté. Tout le monde est gentil, s'aime, se fait des bisous... Bref, beaucoup, beaucoup d'amour, de tendresse, à base de tolérance et de jolis discours : vous voilà prévenus. Il serait pour autant injuste de résumer cette première saison à ce simple aspect. Si la réalisation est assez classique, il y a un réel effort de sobriété, même la musique n'étant pas trop envahissante ou choisie à bon escient.

De plus, il y a un point où la série fait preuve d'originalité voire d'audace : la narration. Jouant habilement des différences temporelles pour éviter la linéarité, elle peut également s'appuyer sur un scénario réservant, mine de rien, pas mal de surprises, plusieurs moments sachant habilement détourner des scènes semblant courues d'avance de façon étonnante, voire émouvante. Enfin, il y a une belle galerie de personnages, en faisant, certes, parfois un peu trop, mais sensibles, auxquels on peut s'identifier quant à leurs doutes, leurs espoirs, leurs blessures...

Casting homogène (avec un petit faible pour la plus que charmante Mandy Moore), globalement de qualité, où chacun a des épisodes pour briller sans pour autant éclipser les autres. On se sent proches d'eux, même si nous n'avons pas toujours les mêmes préoccupations. Ce n'est jamais trop simpliste, il y a une dramaturgie relativement forte, notamment quant à la mort du père, dont le mystère reste savamment entretenue jusqu'au bout. Une série grand public, légèrement bisounours, avec un petit côté « leçon de vie » à base de « la famille, c'est ce qu'il y a de mieux » (ou presque), mais un bon moment à passer, aux protagonistes attachants et aux enjeux suffisamment prenants pour que l'on ait envie de suivre la seconde saison : malgré quelques épisodes assez moyens, les triplés (et leurs parents), on vous aime.

Saison 2 (5/10) :

J'avais plutôt bien aimé la première saison qui, malgré un discours d'une tonne sur la famille, savait proposer quelques vraies surprises et un travail de montage étonnant, rendant son déroulement parfois assez imprévisible. C'est un minimum le cas encore ici, mais un sentiment de lassitude se met manifestement en place, surtout avec ce format d'à nouveau 18 épisodes. Alors je ne dis pas : ce n'est jamais désagréable, plusieurs épisodes sont même assez réussis et on s'est suffisamment attaché aux personnages précédemment pour les suivre avec un minimum d'intérêt, mon coup de cœur pour Mandy Moore se confirmant et mon affection pour Susan Kelechi Watson grandissant, mais vraiment, aussi agaçant soient-ils parfois, globalement je les aime tous bien.

Maintenant, force est de reconnaître que l'on a pas avancé des masses non plus. OK, on sait désormais comment le père adoré est mort, Kevin creuse son sillon et affronte ses propres démons, Randall trouve un nouveau sens à sa vie, Kate

mais aucun de ses aspects ne s'avère réellement captivant. Finalement, on a l'impression que presque tout avait été dit auparavant et qu'il est vraiment difficile de trouver de nouveaux arcs narratifs pour les protagonistes. Au moins approfondit-on certains aspects et « angoisses » de la famille Pearson, la partie « cinéma » touchant à Kevin m'ayant assez plu (avec caméos de

s'il vous plaît!)...

De plus (et je l'avais déjà remarqué), les créateurs s'avèrent beaucoup plus convaincants lorsqu'ils osent le drame à fond que le mélo parfois vraiment, vraiment sirupeux (les discours de Randall : une fois ça va, à la fin c'est lourd), preuve d'un réel potentiel « mélancolique » peu exploité. Enfin, bien que ce fut moins le cas ici, le récit n'est parfois pas trop prévisible, aimant gentiment nous mener en bateau devant des scènes que l'on imaginait courues d'avance. Pas antipathique, donc, loin de là. Mais cet éloge vraiment très, très appuyé à la famille commence sérieusement à montrer ses limites (cette incapacité à rester fâché plus de dix minutes (maximum), je trouve ça notamment assez fou), et même si on a droit à une tentative (assez efficace, osons le dire) de nous vendre la saison suivante, pour moi, « This Is Us » s'arrêtera sans doute là. Dommage.

Saison 3 (6/10) :

Voilà, c'est reparti pour une salve de « This Is Us » avec cette troisième saison, peut-être légèrement supérieure à la précédente mais confirmant indéniablement un essoufflement. On ne peut enlever à Dan Fogelman un évident savoir-faire, une habileté à mélanger les époques et à proposer des scènes efficaces, touchantes, notre attachement pour les personnages (au moins certains) étant évidents. Mais bon, bien que je n'ai aucun déplaisir à suivre la série lorsque je suis devant (bon, je dis ça mais certains épisodes sont quand même assez longuets, notamment cette interminable visite de Kevin et Zoe à leur arrivée au Viêt Nam), je n'avais jamais spécialement envie de m'y replonger non plus.

L'impression que l'essentiel a été dit semble pousser les scénaristes à tirer parfois méchamment sur la corde, ces derniers apparaissant pas mal en galère pour proposer de « nouvelles » pistes narratives (du moins vraiment dignes d'intérêt). Alors on s'intéresse au moindre détail du passé, on imagine des récits parallèles, des rebondissements, de nouvelles aspirations pour de nombreux protagonistes. Je ne dis pas : c'est plutôt bien fait, donc. Reste qu'à force de vouloir tout, tout, tout nous dévoiler, non seulement on se lasse, mais cela enlève une part de mystère, de choses que l'on aurait pas forcément voulu savoir, au moins laissées en « suspens ».

Certains aspects sont donc peu passionnants, et certains qui l'étaient plus sont beaucoup moins développés

Après, dans le registre série populaire assumant pleinement son côté mélo, celle-ci tient quand même pas mal la route, et sans doute n'étais-je pas, dès le départ, le cœur de cible de la production. Il semble que la suite des événements soient nettement plus réussie : j'en serais ravi, en espérant sincèrement que l'on ne fasse pas remonter le fil narratif sur quatre générations, car je risque de lâcher pour de bon, cette fois.

Saison 4 (7/10) :

La précédente saison ne m'avait vraiment pas emballé outre-mesure, au point d'hésiter à voir celle-ci : bien m'en a pris. Les scénaristes semblent avoir enfin pris conscience que la série était un peu à bout de souffle et l'ont régénéré intelligemment. Pourtant, sur le fond, pas grand-chose n'a changé : on oscille toujours entre présent, passé voire un peu futur, Jack est toujours un « mort très présent », nos héros ont toujours des problèmes personnels qu'ils s'efforcent de résoudre du mieux possible...

Mais c'est moins lourd. Plus subtil. Les conflits sont plus nombreux. Les problèmes ne se résolvent plus aussi facilement. Certains protagonistes sont (vraiment) en souffrance. De plus, cette manie d'ausculter le moindre élément du passé m'a moins gêné, peut-être parce que cela apporte vraiment quelque chose à la personnalité de chacun ou peut-être simplement parce qu'ils sont plus intéressants.

Ce que vit chacun de façon générale est plus intéressant : Kate et Toby avec leur enfant, les atermoiements sentimentaux de Kevin offrent quelques très jolies scènes, le « trauma » de Randall est montré sans caricature, les nouveaux venus apportant tous, à leur manière, quelque chose à la série. Bref, si les bases du mélodrame familial restent les mêmes, j'ai été agréablement surpris par la tournure rapidement prise par ce quatrième volet, ravivant (nettement) l'intérêt que je pouvais avoir pour la série : en espérant que les auteurs resteront désormais sur cette émouvante lancée.