Quelle drôle de bestiole que cet album ! Comment a-t-on pu imaginer un habillage pareil ? Par ce terme d'habillage, j'entends la structure de l'album où, de temps en temps entre les chansons, Eddy Mitchell insère d'une voix un brin nasillarde mais surtout un peu fausse, comme dans un mauvais doublage, des phrases sibyllines rappelant les poncifs du western hollywoodien qui a nourri la cinéphilie du bonhomme. J'ai toujours du mal à comprendre l'intérêt de ce procédé. Ça peut être lassant.

Musicalement, l'album m'a tout l'air d'être en très grande partie rempli de reprises. Comme les autres rockeurs français de l'époque, Eddy Mitchell faisait volontiers dans la francisation des tubes rocks et rythm and blues américains. Ici, si certains sont plutôt réussis, d'autres n'apportent pas vraiment grand-chose d'inédit. L'exercice est à la fois facile et casse-gueule : le piège type.

Dans l'ensemble, l'album a nécessité plusieurs écoutes pour afficher une allure acceptable. J'ai longtemps eu du mal à lui trouver du goût, trop hétéroclite sans doute. Les mélodies trop connues ont par ailleurs semblé appauvries.

Il y avait également le sentiment, peut-être juste, qu'une certaine forme de paresse avait présidé à l'élaboration du ce projet. Mais peu à peu, la forme incongrue surprend de moins en moins jusqu'à devenir correcte. Peut-être que ces "7 colts" n'est pas le plus grand album de M. Eddy, mais cet hommage en dit long sur l'univers culturel, cinéphile et musical de l'artiste et prend donc un sens quasi intime qui n'est pas négligeable.

1) Be bop a lula 68 : on commence en introduction avec ce Be bop a lula instrumental qui ne me touche pas particulièrement.

2) Sunny : l'original est tellement fort que cette reprise sans flamboyance finit par être très agréable à écouter. La voix roucoulante d'Eddy se marie parfaitement avec la chanson. Aussi, après plusieurs écoutes, j'apprécie énormément cet instant.

3) Quelqu'un a dû changer la serrure : voilà un morceau pas loin d'être catastrophique, mou. Les paroles ne fonctionnent pas avec la mélodie. Je ne sais pas. Électrocardiogramme inerte pour moi.

4) Elle me voit beau : bof. C'est très rythmé, remuant, mais pas de grand frisson. J'aime bien les grattes derrière, très "swinging London", mais les cuivres me saoulent un peu. Ça donne quelque chose de très moyen, d'autant que les paroles sont trop répétitives.

5) Bye bye love : plus calme, moins irritant de fait, ce morceau ne soulève pas non plus un enthousiasme démesuré. À noter que M. Eddy s'y livre en english.

6) Ordonne mais pardonne : là encore, j'aime particulièrement l'original et la reprise est agréable. Passé le trouble du texte français, oui c'est agréable. Le texte est tout de même difficile. Entraînant, mais très en deçà de l'original. C'est dans ces moments qu'on s'interroge sur les raisons qui ont présidé à l'élaboration de cet album.

7) 13 filles : très entraînant au départ, mais à la longue ça fatigue un peu. J'aime beaucoup le début de la chanson, la petite montée instrumentale et de la mélodie, ensuite, ça stagne un peu.

8) Le fou sur la colline : au départ difficile pour moi, je connais mes Beatles par cœur, sur le bout des doigts. La francisation de leurs chansons me pose davantage problème a priori. Mais le choix de cette chanson est tout de même compréhensible. C'est doux, plus calme et donne un temps de respiration à tout l'album. Cette reprise vient à point nommé pour éviter une lassitude qui pourrait gagner l'écoute. Oui, c'est plutôt bien fait et Eddy est excellent vocalement sur ce morceau la. Donc avec un peu de réécoutes, on s'habitue et on fini par y prendre plaisir.

9) Quitte à tout perdre : un peu simpliste, je trouve. Et surtout, répétitif. Et donc un peu lassant. Peut-être le morceau le plus chiant de l'album ?

10) Only you : dans le rythme et l'instrumentalisation, cela correspond bien avec le morceau précédent. Et qui sait si la filiation ne rend pas ce morceau assez peu plaisant également. Bof bof.

11) Tighten up : dernier épisode de l'album pour la première mouture. Et l'on a droit à un truc plutôt indigeste. Je retire ce que j'ai dit plus haut sur le morceau le plus chiant de l'album : c'est bien ce long discours d'adieux qui porte la couronne. Eddy Mitchell passe en revue tout son effectif. Lancinant, on a hâte que cela finisse.

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12) Je n'aime que toi : ahhh ! Heureusement furent ajoutées huit chansons supplémentaires. On ne pouvait pas finir sur les trois dernières et piteuses chansons. Celle-ci est très douce. Peut-être pas très subtile, un peu gnangnan, la mélodie me plaît beaucoup et me paraît très vite familière pourtant. M'enfin, il est vrai qu'on est loin du style de M. Eddy.

13) Un homme dans la foule : style différent, très seventies. Mais avec des violons en intro et en fond par moments. J'aime bien. Elle ressemble à rien de connu chez Eddy Mitchell. Elle monte et descend, remonte, redescend, j'aime bien sa progression.

14) J'ai semé le vent : bizarre intro. Il y a une espèce de lyrisme curieux. On dirait une musique de film par moment. Ce n'est pas désagréable, mais je reste un peu perplexe.

15) Carla : il y a encore ce style très étrange. Quelle drôle d'époque ! Très seventies. Pas mal mais sans plus.

16) Il a suffi d'une fille : j'avoue que cette chanson m'a plu. Je la trouve entraînante. Et je ne sais pas pourquoi. Le style est très banal pourtant. La mélodie me plaît bien je crois.

17) Où étais-tu ? Aouch ! Un violon crie dans la nuit. Une musique plus que baroque éclate, russe ? Juive ? Tzigane ? Un truc que je situe très mal. Faute de culture musicale correcte. Sans être indisposante, cette musique décontenance. On se demande si on n'est pas devenu fou, si on entend bien, si les chiens ne font pas des chats. Très curieux objet.

18) Ma première cigarette : j'aime bien. Très simple, on se laisse apprivoiser. La voix de M. Eddy qui semble coller à une chanson de James Bond… Oui, voilà, c'est ça ! Une chanson de film d'espionnage. Ah oui, on est bel et bien devant l'album très surprenant!

19) Par qui le scandale arrive : dernier morceau. Je ne le quitte pas fâché, mais disons que je suis assez content de passer à autre chose. Cette chanson ne sera pas retenue, car très répétitive. Je note qu'on peut faire ce reproche à beaucoup de morceaux de cet album.

Entre sa composition hétéroclite virulente et son écriture mélodique trop pauvre, trop répétitive, cet album ne restera pas comme l'un des plus forts de M. Eddy, loin de la.
Alligator
5
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le 9 nov. 2013

Critique lue 354 fois

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