Une première écoute suffit parfois à elle même pour nous comprendre nous même. Une oeuvre sert à nous rappeler qui nous sommes ou à nous perdre dans ce que nous pensons être. Le but de l'art reste la recherche de la beauté. Mais pas selon des critères dogmatiques encastrés dans l'ancienneté et le passé, mais selon des critères perceptifs relatifs à tous et chacun. On ne cessera de tergiverser sur le but et le sens de l'art, mais n'oublions pas une chose objective, est qu'il est relatif.


Cette critique prend place en 1970. Dans un contexte de violence, de paix et d'amour, bla bla nous situons tous cette époque et avons tous vu/lu/écouté des créations artistiques se situant pendant la guerre du Viet-Nam et le temps des hippies. Je ne reviendrai pas en trombe sur eux, m'étant assez exprimé dans ma review d'Easy Rider sur ce contexte.
Dans cette "critique", je vais pouvoir donner les lignes de force à un tout autre cadre, bien californien et respirant bon le palmier : "Laurel Canyon".


Laurel, Mandeville, Topanga, Beachwood Canyon sont les lieux emblématiques du Wild Los Angeles. Des collines sauvages vallonant (un néologisme qui me plaît) Hollywood, un peuple qui cherche la paix et fuit la vanité des grands studios de cinéma américain, avant de rêver leurs vies et de leur racheter des maisons sur Beverly Hills une fois que leur crise d'ado hippie sera volatilisée. Mais, point de critique envers cette génération portant la torche et la flamme d'un art limpide et poétique, le renouveau folk californien. Émergence des singers songwriters, de la country rock, berceau des hybrides et des anges déchus du Brill Building, Laurel Canyon est le coeur névralgique de l'ode à la nature dans l'art. Fuyant la ville dans laquelle ils vivotaient dans des taudis plus énigmatiques et sombres les uns que les autres, une fois l'argent des deux trois premiers records amassés, s’empressèrent d'acheter villa surplombant les hauteurs de la Cité des Anges, ville de la renaissance pour celui qui veut lâcher la grappe de l'East Coast et du Village. Parmi ces fuyards, 4 bons Hommes : Michelle, John, Mama Cass et Denny. Tous démarrèrent dans divers folk bands à la Kingston Trio, comme les Mugwumps pour les deux derniers, avant de se retrouver au coeur d'un groupe devenu emblème du flower power avec Airplane et le Dead, les Mamas & Papas. Analysant les tendances de leur époque, les remettant au goût des jeunes (et jours) de Haight Ashbury, les M & P s'octroient le plaisir de guider la nouvelle tendance folk pop et bien entendu, rock. Leur histoire est connue, beaucoup d’engueulades, des egos surdimensionnés, de la coke et des soirées trop arrosées, ont eu raison d'eux en 1971, 6 ans après leur début.


John Phillips, plus âgé en 1969, étant donné qu'il avait déjà une trentaine et demie, nous montre sa maturité de songwriter avec des lyrics poétiques, surfant sur l'intimisme musical des canyons californiens. Cet album est une carte postale et concentré de ce qu'on appel "la faune du canyon", et ce dernier en extrait le meilleur, voir "Topanga Canyon" la seconde piste. Voyant que le flower power a moins la cote, et que l'heure est aux harmonies vocales et à une espèce de néo folk baroque suresthétisée (hmm le néologisme) ou bien au country rock, Phillips suit le vent en poupe, et flair son air. Au lieu de faire évoluer le groupe, il se dissout de plus en plus pour que chacun fasse studio à part. Cass avec Mason de Traffic, Doheny en solo, Michelle se marie avec Hooper et tourne le chaotique The Last Movie. Pendant ce temps, John fait des courses de moto avec Gram Parsons. Et ça, on l'entend bien sur cet album. Les deux noceurs s'entendent bien, et ont le même sens de la débauche.
Les deux s'influencent.
Les deux se défoncent.
Phillips, lassé de la sonorité trop pop et lisse de son groupe, nous emmène dans un voyage exquis ici. De la première à la dernière track, l'univers est magique. Les plus beaux sont sûrement "Topanga Canyon", ultime représentation musicale et picturale, telle une image d’Épinal Californienne, et Captain, morceau sur le magnétisme animal d'un Homme face à des sirènes californiennes. Ici les choeurs sont tenus par de comparses chantant telles des nymphes ensoleillées. Fleur bleue, poésie et rêverie, danse et nostalgie avortée, voilà ce que nous fait ressentir cet album. Classique pour une oeuvre de singer songwriter dans les thèmes choisis, mais la composition est complète et complexe. Une palette de styles musicaux ornent cet LP jamais loin trop loin de l'océan et jamais trop loin du désert aride et craquelé. Phillips nous dévoile des couleurs toutes plus baroques les unes que les autres, pour nous surprendre de cour avec une singularité inévitable dans une carrière si policée.
Parmi ces albums connus depuis peu, mais qui sont entrés dans ma fresque musicale dès la première écoute, John, the Wolf King of L.A. figurerait au panthéon avec par exemple Song to a Seagull ou Desperado, ou encore Grievous Angel. Des albums qui ont comme été là auparavant, mais qui n'avait pas encore reçu le regard qu'ils attendaient, le regard de tous et chacun entrant dans leur univers ; pour qui désire voyager avec eux musicalement.


EDIT : Cela dit, fuck john philips, auteur d'une relation incestueuse avec sa fille.

PaulClair
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le 4 juil. 2019

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