Si il y a une version récente qui rayonne entre tous les enregistrements de ces fameuses "Pièces" de Rameau, c'est bien celle proposée par Pinnock et sa bande ! Sortie il y a dix ans au milieu de nombreuses reprises et orchestrations fantaisistes (et rafraichissantes), elle joue la carte de la "fidélité", avec instruments d'époque, clavecin, violon et viole de gambe, le tout porté par une prise de son chaleureuse et intime comme le mérite la musique de chambre.
Vous me direz, ça fait bientôt 300 ans qu'on joue ces pièces comme ça (à une flûte prêt, qui peut se substituer au violon), rien de bien fabuleux. C'est que la magie n'opère qu'à l'écoute. Pinnock est un virtuose, et ça tombe bien, car c'est ce que réclament ces 16 morceaux aux noms poétiques, sinon burlesques (au hasard, La Pantomime, La Coulicam ou Le Vézinet...). Le clavecin ressort comme le grand soliste du programme. Viole et violon se voient, une fois n'est pas coutume, relégués aux rôles d'accompagnants, habillants les envolées souvent vertigineuses d'un clavier mis à rude épreuve. On en viendrait presque à se demander si ces pièces ne seraient pas aussi solides sans eux ! Et je ne dit pas ça à charge pour le duo de scieurs d'écrins qui œuvrent ici, car l'osmose du trio est assez fabuleuse.

Les pièces pour clavecin en concerts sont et resteront les pièces les plus célèbres de Rameau, plus faciles d'accès que ses opéras pour qui n'est pas rompu à l'art lyrique. Poser une oreille sur les virevoltants et virtuoses L'indiscrète ou La Rameau, sur la tendre mélancolie de La Timide ou de La Cupis, sans parler des humeurs changeantes de la célèbre Forqueray ou du presque rock'n'roll Tambourin no 2, c'est goûter à la richesse d'une œuvre dont cette unique composition chambriste est un des plus brillants joyaux. Et pour apprécier à sa juste valeur la multitude de ces saveurs, cet enregistrement par Pinnock & co. est un point de départ plus que conseillé, tout autant qu'un incontournable pour l'amateur qui l'aurait raté à sa sortie !

P.S. : et pour tout ceux qui ne voient dans le clavecin que la machine bien huilée qu'en a fait Bach, la voltige que lui impose Rameau pourrait être une révélation !
Tom_A
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le 9 nov. 2014

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