Love It to Death
7.6
Love It to Death

Album de Alice Cooper (1971)

La longue incantation du vaudou Alice Cooper

D'abord un grand merci à Pheroe et SanFelice de m'avoir dirigé vers cet album qui m'a quand même foutu une sacré et immense claque. Ne m'attendant à rien avec mes quelques préjugés sur Alice Cooper et ses cirques grandiloquents, c'était donc d'autant plus surprenant de me retrouver face à tant de génie, créativité et même virtuosité. Depuis, j'ai pu découvrir un peu d'autres œuvres de Mr Furnier, confirmant, à travers quelques excellents albums (Killer, Billion Dollar Babies, Welcome to My Nightmare...) que j'étais dans l'erreur, mais c'est vraiment Love it to Death que je considère comme son sommet, la claque absolue.


Après deux albums psychédéliques sous la houlette de Frank Zappa, le groupe quitte Los Angeles pour Détroit puis rencontre Bob Ezrin. C'est à partir de ce moment-là que le succès viendra après des débuts où ils feront plus parler d'eux pour leurs faits divers scéniques (notamment celui où, selon la légende, Mr Furnier aurait balancé, et donc tué, un poulet involontairement, prétextant qu'il pensait que ça pouvait voler) que leur musique ou place au hit-parade. C'est vraiment là que tout commence, que ce soit le début de l'âge d'or musical ou le personnage qu'Alice Cooper va se concocter au fil des années et quelle réussite ! Il arrive à instaurer une ambiance cauchemardesque, parfois même malsaine tout le long de l'album, tout en faisant preuve d'une grande créativité musicale, arrivant à créer un son unique en mêlant un peu de heavy et de glam dans leur rock bien nerveux.


Accompagné du duo de guitaristes Glen Buxton/Michael Bruce (qui s'occupe aussi des claviers), puis de Dennis Dunaway à la basse et Neal Smith à la batterie, Alice Cooper bénéficie ici d'un groupe alors au sommet. Tous sont capables de composer des chansons et surtout de l'accompagner avec brio, sachant créer des rythmiques implacables et faire parler leur virtuosité lorsqu'il le faut. Mais ce qui change ici, c'est aussi la production avec un Bob Ezrin capable de faire ressortir toute l'ambiance malsaine du groupe mais aussi le lyrisme et l'émotion de certaines de leurs compositions. Love it to Death ne compte aucune fausse note, c'est même tout le contraire et, en plus de tout le long maintenir son ambiance, il contient ce que je considère comme trois des plus grands sommets du groupe, trois immenses morceaux qui dépassent le cadre de l'album, à savoir I'm Eighteen, Black Juju et Ballad of Dwight Fry.


I'm Eighteen, c'est le hit de l'album, la chanson qui lancera définitivement la popularité d'Alice Cooper, et quelle chanson ! Riff aussi puissant qu'efficace, l'harmonica qui vient juste au bon moment puis la voix parfaite d'Alice Cooper viennent ouvrir cet irrésistible et génial hymne à l'adolescence. Mais Alice Cooper nous réserve deux autres immenses pépites avec d'abord Black Juju, une lente et longue incantation qui monte crescendo vers des sommets d'intensités et de puissance. Difficile de ne pas imaginer Alice Cooper himself faisant office de gourou vaudou et s'occupant des âmes damnées qui viendraient à lui. Un tout petit moins de 10 minutes où une ambiance quasi-satanique est à son apogée, magnifié par l’envoûtant orgue, jusqu'à un final explosif. Et puis Ballad of Dwight Fry, ma claque ultime, celle qui m'a le plus marqué lors de ma première écoute (au point d'être maintenant dans mon top 10). Les magnifiques quelques notes de pianos ouvrant l'album, accompagné d'une voix d'un enfant demandant à sa mère où est son père ("Mommy, where's daddy ? He's been gone for so long, Do you think he'll ever come home?") n'ont pas fini d'hanter mon esprit. La suite, c'est un peu plus de 6 minutes d'une ambiance aussi lyrique que malsaine pour une ballade théâtrale grandiose où il dévoile tous ses talents de chanteur/compositeur et la manière dont ce groupe est capable de poser une ambiance vraiment prenante et d'en faire ressortir toutes les émotions qui en découlent.


Les six autres chansons de l'album participent pleinement à la mise en place d'une atmosphère tenant tout le long, et même prolongé par les prochains albums d'Alice Cooper. L'ouverture Caught in a Dream est rock'n roll à souhait, efficace et rondement menée, même remarque pour le nerveux et rapide Long way to go (avec un excellent solo à la clé) ou encore le génial Is it my Body, un peu plus calme avec, là aussi, un super riff et un excellent jeu de basse. Néanmoins, ce sont les titres de la seconde face qui renforce vraiment l'ambiance quasi-mystique de l'album, à savoir Hallowed Be My Name avec ses claviers omniprésents et son côté très théâtral, puis Second Coming, l'une de mes autres favorites de l'album qui dévoile à nouveau le côté mélodique et créatif du groupe, avec ses changements de tons, ses excellentes idées (le refrain) puis les coups de batteries et les notes de pianos qui achèvent merveilleusement cette chanson. Sun Arise conclut avec une note plus joyeuse, voire même pop, l'album.


Un immense album qui m'a permis de casser tous les préjugés que je pouvais avoir sur Alice Cooper, un album riche, créatif où une ambiance malsaine, sombre voire envoûtante, plane tout le long, pendant que cet excellent groupe, capable d'allier virtuosité et rythmique implacable, crache des riffs d'enfers, des mélodies lyriques, des intenses incantations ou encore un irrésistible et ravageur hymne à l'adolescence.

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le 31 mars 2015

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Docteur_Jivago

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