McCartney III
6.6
McCartney III

Album de Paul McCartney (2020)

Paul McCartney... Tu sais, le Beatle que certains ont toujours un peu méprisé, un peu regardé de haut, parce qu'il faisait des chansons « populaires », de la « musique de gonzesses », parce qu’il a épuisé deux de ses partenaires avec sa passion coupable pour le music hall qui plaît à ta mamie (Lennon, évidemment, mais aussi McCullough des Wings), parce qu’il a toujours un peu pondu des albums à la chaîne, privilégiant ainsi la quantité au détriment de la qualité… Regarde-le, maintenant, comme il a fière allure sur la photo de promo de l'album, à califourchon sur son cheval, avec sa belle crinière argentée et son port altier, le dernier des Fab Three (déso Ringo je t'aime bien quand même) qui, à presque 80 balais, continue à composer de la musique de vieux qui tient encore la route.


McCartney III vient clore une trilogie de concepts albums commencée en 1970. Trois disques enregistrés chez lui, sur lesquels Macca joue de tous les instruments. McCartney I enfonçait le premier clou dans le cercueil des Beatles avec des chansons intimistes et lo-fi pour la plupart trop anodines (en dehors du masterpiece Maybe I'm Amazed) pour ne pas s’attirer les foudres de la presse musicale rageuse de l’époque. En 1980, McCartney II refermait la parenthèse des Wings avec des sonorités plus électro, des expérimentations parfois assez radicales (Temporary Secretary), mais aussi le tubesque Coming Up qui, paraît-il, motiva le frère-ennemi Lennon à se remettre à écrire des chansons.


2020, encore une année de sortie toute ronde. On ne sait pas si McCartney III marque, lui aussi, à sa manière, une étape charnière de la carrière de Macca. Pas de groupe à enterrer, pas de carrière solo à relancer, la « logique » voudrait donc que III soit son dernier album solo, son œuvre testamentaire. À 78 ans, ce serait loin d'être déshonorant. Mais III ne sonne pas du tout comme un chant du cygne. De toutes façons, je ne pense pas que ce soit le genre de Paulo de tout balancer avant de tirer sa révérence. Il est fort probable que III ne soit au final rien de plus qu’un album de confinement, sans aucune autre justification que les contraintes sociales imposées par la pandémie de COVID-19. L’occasion fait le larron, comme on dit, ce qu’on pourrait déjà trouver suffisamment malin pour ne pas s’obliger à trop réfléchir pour chercher un sens plus profond à cet album.


Avec sa pochette assez moche (presque autant que celle du dernier Polnareff), ce troisième album 100% solo a les défauts et les qualités de ces deux prédécesseurs. Cohérent dans sa démarche, mais avec des compositions qui partent un peu dans tous les sens, une tracklist assez courte (Egypt Station, sorti il y a à peine deux ans, souffrait à l’inverse vraiment d’un trop plein de titres), quelques chansons au final assez anecdotiques, parfois beaucoup trop longues pour ce qu’elles ont à raconter (on sent bien passer les huit minutes de Deep Deep Feeling). Mais la modestie réussit souvent à McCartney, jamais autant à l'aise que dans la folk toute nue (remember Blackbird, Calico Skies, Jenny Wren...), surtout depuis que son timbre de voix a presque complètement perdu de sa douceur juvénile pour sombrer dans des profondeurs plus rauques, plus essoufflées, plus fatiguées, qui s’accordent mieux à son âge désormais avancé. Pas de grandes chansons à la Maybe I'm Amazed ici, pas de gros hit à la Coming Up non plus, mais une jolie boucle débutant avec un instrumental électrisant (Long Tailed Winter Bird) qui se prolonge, dans la dernière piste, par une jolie petite chanson folk (When Winter Comes).


On peut toujours se creuser la tête à chercher, en pure perte à mon avis, un fil conducteur à ce triptyque casanier sans queue ni tête. Comme McCartney I et II, III est juste un album DIY dans lequel il y a à boire et à manger, un disque où Macca, « the cook of the house », fait sa petite tambouille avec des restes, des trucs qui traînaient dans le frigo, pépouze à la maison, pendant que le monde extérieur s’écroule, sans se soucier de ce qu’il va laisser à la postérité.

Tonton_Paso
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le 18 déc. 2020

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