La musique de Panda Bear, c'est comme les huitres

En écoutant le dernier album de Panda Bear, je me suis fait la réflexion que la musique de certains artistes ressemble pas mal à des huitres. Objectivement, les huitres, c'est dégueulasse. C'est quand même une espèce de poubelle de mer visqueuse, salée, iodée, qui pue, demande des efforts démesurés pour être consommé et qui vous rend malade une fois sur deux. Pourtant, vous trouverez toujours des foodies pour vous les vanter comme un met des Dieux, pour louer la minéralité qui se dégage de leur fumet. Certains chefs tenteront de vous les préparer au gratin ou en carpaccio pour cacher derrière des épices leur goût immonde, derrière des artifices leur consistance peu ragoutante. Les plus doués réussissent à maintenir l'illusion les premières bouchées, mais très vite, la réalité putride de l'huitre rattrape leur plat.

Et bien, la musique de Panda Bear (et par extension celle d'Animal Collective), c'est exactement ça. Il y a quelques années, il était facile de tomber dans le panneau. On aura pu vous parler d'incantation chamanique, de trance psychédélique. Et même affirmer, avec Merriweather Post Pavilion, qu'Animal Collective, c'était la musique du futur. Sauf que le futur est là, et que la rencontre de Panda Bear avec le Grim Reaper débouche encore et toujours sur la même tambouille indigeste faite de boucles pourries, de voix monocordes et de claviers du plus mauvais goût. Si certains avancent que cet album est plus facile d'accès, et que l'effort est en soi louable, il faudra bien leur rétorquer que Panda Bear n'est accessible que si on n'écoute que de la pop expérimentale (ce qui est très bien, par ailleurs), et que cela ne change rien au fait que ce disque est ennuyant comme la pluie: il ne parle ni au coeur, ni à la tête, et encore moins aux jambes. Dans les meilleurs morceaux (ceux où un minimum d'effort a été mis dans la composition), cela nous évoque un mauvais Beck. Dans les pires, cela ne nous évoque rien, mais sans susciter la moindre curiosité pour autant.

Bref, cela fait bientôt 10 ans qu'on écoute Pitchfork essayer de nous vendre de l'huitre, mais ce dernier plat est celui de trop. La folie débridée et les talents de composition de Panda Bear sont perdus depuis longtemps (depuis Sung Tongs, probablement), et cette fois-ci, la posture moderniste et l'ambition entretenue par complaisance ne suffiront pas à nous faire oublier la pauvreté de ce qu'elle cachait, en fait bien mal, jusque-là.
ylebout
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le 26 janv. 2015

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