Lorsque j'ai commencé à m'intéresser à Ayreon il y a quelques années de cela, l'album The Human Equation était un peu passé à la trappe pour je ne sais quelle raison. Je trippais sur 01011001, dernier né de l'esprit génial d'Arjen Lucassen à l'époque, puis sur Into The Electric Castle et même The Final Experiment, mais The Human Equation passait encore curieusement entre les mailles. Puis un beau jour, j'ai essayé. Tout d'abord, il ne m'a pas tant marqué que ça... mais c'était à peu près le cas de tous les autres albums d'Ayreon. Je savais qu'il fallait du temps, lui donner plusieurs chances. Bien m'en a pris, car il s'agit sans doute aujourd'hui de mon album préféré de tous les temps, tout simplement.


Le temps passant et l'album faisant son effet, j'ai fini par me pencher un peu plus sur son concept, lire les paroles, le connecter avec tout l'univers d'Ayreon. C'est à peu près à cette période là, et sans doute grâce à cet album, que le projet d'Arjen est devenu mon "groupe" préféré. J'écoutais donc de plus en plus The Human Equation, tout en me surprenant à imaginer des images... Des images d'une représentation scénique de l'album. Un petit lit d'hôpital à gauche de la scène, un écran au dessus pour diffuser les flashbacks, et tout le cast déambulant sur la scène devant les musiciens. Au fur et à mesure des écoutes, ces images devenaient de plus en plus précises. Je rêvais secrètement que cela se réalise un jour, sans oser l'espérer. Après tout, quelles étaient les chances qu’Arjen ou quelqu’un de son entourage ait justement cette ambition là ? Et pourquoi avec cet album en particulier et pas un autre ? Et comment parvenir à réunir tout ce beau monde sur scène ? Pour moi il était clair que cette idée resterait à jamais une utopie.


Why should you even try?... But still...


Et pourtant, et oui pourtant, cela a fini par arriver. Lorsque cette série de représentations uniques de l'album à Rotterdam a été annoncée, autant dire que j'osais à peine en croire mes yeux. Bien que friand de concerts, lorsqu'ils sont données à proximité de chez moi, je ne suis pas du genre à me déplacer à l'étranger pour cela. Je ne l'avais fait qu'une seule fois auparavant (pour le concert Elements de Within Temptation à Anvers), mais là, il m'était tout bonnement interdit d'hésiter. Place prise dès que disponible, il a ensuite fallu attendre, puis planifier tout ça... jusqu'au jour J. Que dire ? Superbe salle, superbe spectacle, superbes musiciens, superbes chanteurs, superbes larmes sur mes joues, rencontre avec Arjen himself à la fin...


Sometimes the dream becomes reality


Oui, on peut le dire, c'était vraiment un rêve devenant réalité. Deux même : celui de voir cet album représenté sur scène et celui de rencontrer Arjen. Et voir cela finir en CD/DVD est un accomplissement. Alors oui, évidemment, tout n'était pas comme je l'imaginais. Le lit était au centre de la scène et non pas à gauche ; je n'avais bien-sûr pas imaginé le reste du décor et les costumes – très réussis au passage ; et tout le cast original n'était pas sur scène. Pas tout le cast, certes, mais presque, et c'est déjà un exploit ! James LaBrie (Dream Theater), véritable tête d'affiche de la représentation, reprend ainsi son rôle de "Me", personnage central de l'histoire, et signe une très bonne prestation malgré ce qu'on peut entendre dire de son chant en live. On retrouve également pour mon plus grand plaisir l'excellente Marcela Bovio (révélée par l’album et depuis lors à la tête de Stream of Passion, qui a cependant récemment annoncé son split – RIP) dans le rôle de "Wife" ou encore l'impressionnante Irene Jansen, sœur de Floor Jansen (cela s'entend et se voit !) dans le rôle de "Passion". Magnus Ekwall ("Pride"), Devon Graves ("Agony"), Eric Clayton ("Reason") et Heather Findlay ("Love"), que je connais moins, reprennent également brillamment leurs rôles respecifs. Manquent donc à l'appel Arjen lui-même dans le rôle de "Best Friend", Mikael Åkerfeldt d'Opeth ("Fear"), Devin Townsend ("Rage") et le regretté Mike Baker ("Father"). Mais est-ce que cela est préjudiciable ? Que dire de leurs remplaçants ? Anneke van Gierbergen, que j'admire, prenant la place de Mikael Åkerfeldt ? Un choix surprenant mais payant ; la dame m'a enchanté tout le long, donnant une nouvelle dimension fragile à son rôle. Jermain van der Bogt, aka "Wudstik" – que j'ai justement connu grâce à Ayreon avec sa prestation dans 01011001 puis dans les vidéos de la relase party de ce même album où il m'a grandement impressionné, avant de découvrir qu'il était le chanteur du très sympathique side project de Ruud Jolie, ForAllWeKnow – remplaçant Arjen lui-même dans le rôle de "Best Friend" ? On sait qu'Arjen ne veut plus faire de scène, c'était donc logique qu'il n'en soit pas. Et puis, avec tout le respect et l'estime que j'ai pour le maître, il clame lui-même sans fausse modestie qu'il n'est pas un grand chanteur, et je suis plutôt d'accord sur ce point. Son timbre est original et pas dénué d'intérêt, et il sait très bien chanter, mais il n'a pas le genre de voix à faire des envolées lyriques ou des moments plus hargneux... ce que son remplaçant ici sait très bien faire. Donc le choix de Wudstik ne pouvait pas me décevoir. Quant à Mike Mills – que j'ai également précédemment connu grâce à Ayreon, sur le dernier album The Theory Of Everything – il ne correspond pas forcément au type de voix que je préfère mais force est de constater qu'il réalise une performance assez incroyable en jouant non pas un mais deux rôles ("Rage" et "Father"), et on retiendra son impressionnante prestation sur le titre Loser où il sait parfaitement retranscrire – et même adapter à sa propre personnalité – la folie des deux personnages et de leurs interprètes originaux.


Can't you feel that fire, can't you feel it burn?


Les vocalistes sont au meilleur de leur forme et s'emparent de leurs rôles à merveille, mettant tour à tour toutes leurs tripes ou leur fragilité aux moments opportuns et retranscrivant parfaitement les émotions qui sont au centre de l'histoire. De toute évidence, les musiciens font également un excellent job, car il ne doit pas être facile de reproduire les structures complexes imaginées par Arjen. Joost van den Broek fait un très bon boulot en adaptant les musiques aux contraintes de la scène, et certains nouveaux arrangements sont très bienvenus (je pense notamment à Betrayal, dont le nouvel arrangement donne des frissons). Et quel plaisir de retrouver encore une fois autant de têtes connues, derrière les instruments cette fois ! Ed Warby (batterie), Jeroen Goosens (flûtes) et Ben Mathot (violons) sont des habitués d'Ayreon qu'il est logique de retrouver là, et ce n’est pas pour me déplaire. D’autres, comme Johan van Stratum (Stream of Passion) à la basse ou encore Maaike Peterse (Kingfisher Sky) au violoncelle sont autant de têtes qui me font personnellement plaisir à voir !


Pour couronner le tout, une petite chorale, The Epic Rock Choir, auditionnée sur le volet pour les besoins de la représentation, s’ajoute à ce beau monde pour apporter encore plus d’intensité à certains titres et réaliser quelques interludes ou reprises. Quatre de ses membres se joignent par ailleurs au cast pour jouer de nouveaux personnages (un docteur, deux infirmières, et la mère du personnage central). Pour l’occasion, certaines paroles sont remaniées pour pouvoir les faire intervenir. Une petite innovation intéressante, bien que l’on puisse regretter parfois qu’ils "volent" les passages du cast principal.


Si on résume ce que nous donne cette nouvelle équation, nous avons donc : des vocalistes d’origine qui se donnent à fond, des remplacements judicieux, des musiciens hors pair, de nouveaux arrangements frissonnants, une chorale épique, des décor et costumes réussis... De quoi donner un résultat parfait, peut-être même mieux que l’original à l’écoute ! Le seul gros bémol est que le DVD s’avère plutôt mal tourné. Arjen admet lui-même être tombé de haut et avoir passé des nuits blanches en ayant vu les résultats du film. Plans flous, caméra qui tremble, zooms non maîtrisés, et le tout dans une sorte de lumière brumeuse et sombre, font en effet du film de ce concert le gros point noir de cet album live et justifient ma note de 9/10 au lieu de 10. Seulement un point en moins parce que le son, lui, reste parfait, et parce qu’il faut tout de même saluer tous les efforts mis dans ce projet et le talent remarquable de tous ceux qui y ont contribué, et qui font que je n’oublierai pas cette représentation et l’album qui l’a inspirée de sitôt !


Dream Sequencer System offline.
The Human Equation… I remember…

Evanizblurk
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le 28 juil. 2016

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