S’il y a bien quelque chose dont je me rappelle du Comédien lors de ma lecture du kiosque Before Watchmen, c’est à quel point il m’avait été difficile d’aller au bout de cette mini-série ! Mais je me suis dis que, peut-être, une lecture globale apporterait quelque chose de nouveau, me donnerait une autre impression. Mais bon, comme on dit, c’est beau de rêver…

Héros de la guerre du pacifique, Eddie Blake, dit le Comédien y a noué des liens d’amitié avec un certain John Fitzgerald Kennedy. Mais, son assassinat dans les années 1960 a eu pour conséquence de faire voler en éclats les derniers vestiges d’idéalisme qui lui restaient. Désormais, le Comédien était devenu incontrôlable et n’avait plus qu’un but : montrer au monde l’étendue de la farce cosmique que représentait l’existence. (Contenu : Before Watchmen : Comedian #1-6)

Le Comédien est un personnage important dans Watchmen, c’est avec sa fin tragique que l’histoire commence en somme. Les héros de Watchmen se rassemblent autour de son cercueil, chacun y allant de son souvenir avec ce justicier implacable. Nous savions finalement peu de choses sur le Comédien, sur son passé. Juste qu’il se considérait comme un véritable patriote et avait œuvré au service de son pays.
C’est à Brian Azzarello que la tâche a été confiée d’éclairer un peu le passé du Comédien ! Mais la question est : Allons-nous avoir le droit au grand Azzarello de 100 Bullets ou Wonder Woman, ou bien à celui peu inspiré de Rorschach ?

On le sait, en 1940 le Comédien claque la porte des Minutemen ! Enfin disons que le viol de Spectre Soyeux précipite un peu les choses… Mais peu de temps après il est engagé par l’armée américaine pour participer à la guerre du pacifique. Sur place il va se faire un ami : John Fitzgrald Kennedy ! En 1960, ce même JFK, président des Etats-Unis d’Amérique, reprend contact avec Eddie Black pour qu’il aide Robert Kennedy, ministre de la justice à combattre la Mafia ! S’il participe de bon cœur à ces guérillas urbaines, il œuvre également dans l’ombre sur des assassinats visant à protéger son ami, comme le meurtre d’une charmante blonde aimant laisser le vent soulever sa longue robe blanche, pour ne pas la citer… Mais il est aussi et surtout manipulé car lors de l’assassinat de JFK il est envoyé par J. Edgar Hoover, grand patron du FBI, sur les traces de Moloch et la pilule passe très mal lorsqu’il réalise que ce dernier est innocent alors que son ami se faisait assassiner loin de lui ! Il n’en faut pas plus pour qu’un esprit fragile comme celui de Blake se tourne définitivement vers la violence et le chaos ! Et son second passage dans le pacifique est le théâtre des pires exactions qu’un homme puisse commettre, surtout lorsqu’il a pour philosophie que la vie n’est qu’une grande et simple farce cosmique !

Ce que l’on ne peut retirer au travail d’Azzarello c’est l’ancrage historique. Les périodes sont bien retranscrites, se rapprochent beaucoup de l’ambiance historique que l’on peut avoir dans Watchmen. Il donne du poids et du crédit à cet ancrage en utilisant des véritables personnages historiques comme JFK en faisant participer de près ou de loin à des événements historiques comme la guerre du Vietnam ou l’assassinat de JFK ! Brian Azzarello n’est jamais aussi fort et doué que lorsqu’il doit œuvrer sur des personnages sombres, violents et nous en dévoiler les coulisses, le passé. Le souci c’est que ce passé de violence, ce passé noir est intéressant disons le temps du début, lorsqu’Eddy est, disons, encore « humain ».

Une fois la mort de JFK effective, cela devient n’importe quoi ! Azzarello part dans son délire et entraîne Eddie Black dans une escalade de violence et d’actes honteux absolument dérangeants ! Personnellement, je suis on ne peut plus d’accord sur le fait que le Comédien est un vrai de vrai, un bad boy, mais de là à le voir massacrer tout un village au Vietnam, son rapport aux femmes, ce n’est plus un bad boy, c’est un sombre « connard », excusez moi l’expression. Qu’on en fasse un personnage qui aime marcher dangereusement sur la ligne je veux bien, mais Azzarello fini par nous proposer une suite chaotique de scènes chocs et violentes qui donnent l’impression que l’auteur a juste voulu faire écho à un aspect d’un élément de la personnalité de Black, la violence, à partir d’un événement marquant du personnage, le viol de Spectre Soyeux. Sous couvert de nous dire que Black vit mal la mort de JFK, il autorise le Comédien à commettre des actes honteux et choquants et à exprimer certaines idées dérangeantes.
Ce n’est qu’un comics, peut-être, et on peut sans doute traiter tous les sujets, faire faire beaucoup d’horreurs à ces personnages, encore faut-il que cela serve quelque chose, apporte un petit truc à l’histoire. Là, à partir d’un moment, Azzarello ne traite que la violence, le chaos, l’anarchie sans vraiment aborder ce qui tourmente vraiment Eddie Black dans le fond. La mort de Kennedy n’est qu’un simple déclencheur qui ne sera finalement, et malheureusement pas traité… Pour moi Le Comédien se résume à de la violence gratuite, cela n’engage donc que moi, et ne m’intéresse pas le moins du monde.

Si l’aspect historique était assez intéressant au début, il disparaît lui aussi bien vite. On navigue entre les époques, on se perd, comme si Azzarello en cours de route se disait « Ah mais Eddie aurait pu commettre cette horreur à l’époque ! » et hop on change d’époque pour une nouvelle scène de violence. Et puis Brian Azzarello se permet des libertés historiques un peu trop poussées…

Par contre s’il y en a bien un qui est constant c’est J.G. Jones au dessin ! On est dans le laborieux et la déception du début à la fin ! Là aussi, l’idée d’avoir un artiste de style plutôt réaliste était une bonne idée au début. Ce dernier a du mal à décoller, du mal à nous faire ressortir des émotions. Beaucoup de cases très moyennes, de visages pas très beaux, des absences d’expression qui empêchent une immersion dans l’histoire, de ressentir de l’empathie pour les personnages. Bien que ressentir de l’empathie pour un personnage comme Eddie Black serait assez spécial… Heureusement Alex Sinclair aux couleurs arrive à nous imprégner de l’époque ou des différents lieux où se déplace le Comédien, que ce soit aux Etats-Unis ou dans la jungle vietnamienne.

Bref, passés des débuts qui nous laissaient espérer quelque chose de sympa, c’est la douche froide. Une véritable déception de voir le Comédien traité de la sorte. Brian Azzarello passe totalement à côté du personnage, on nous annonce un personnage torturé, en proie au doute et on se retrouve avec de la violence à outrance, trop souvent non justifiée ou mal justifiée n’apportant strictement rien au personnage. Là où nous avons six épisodes, nous aurions largement pu en avoir un seul, version big size, tellement le scénario est vide ! Je ne vous dirais pas de passer votre chemin, car chacun doit se faire son opinion, mais jamais je ne conseillerais ce titre !
Romain_Bouvet
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le 12 juin 2014

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Romain Bouvet

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