Dire que j’attendais avec impatience cette reprise des aventures de Buck Danny est un doux euphémisme. Les derniers albums m’avaient laissé un goût étrange, celui d’une série fantastique qui s’essoufflait doucement mais surement . Si retrouver le trio était toujours un plaisir, l’écriture était moins enlevée, ce que les dessins toujours très bons parvenaient de moins en moins à occulter. La série a déjà connu pareils moments de faiblesse, notamment après la séquence guerre du Pacifique ou, plus tard, à travers les tomes 36 et 37. Mais les auteurs avaient toujours su rebondir, pour toucher l’excellence, ainsi lors de la séquence nucléaire du tryptique tomes 41-42-43, véritables perles du genre.

Avec l’arrêt de Bergèse il était évident que la succession serait difficile. Buck Danny étant avant tout une œuvre de niche au milieu d’une industrie de plus en plus vaste et, souvent, médiocre, il fallait être capable de renouveler le genre, tout en restant fidèle aux personnages pour être capable d’attirer les fans et, peut-être chercher à en trouver d’autres, plus jeunes.

Le parti pris de F. Zumbiehl a donc été de construire un scénario somme toute classique, autour d’enjeux géopolitiques actuels. Buck et ses compagnons vont ainsi se retrouver en Iran – ici le Basran, par peur d’un procès des Mollahs sans doute … - dans une intrigue collant à l’actualité ; la duplicité de la Russie, Israël, la course au nucléaire, tout y est. On rajoutera une petite incursion en Afghanistan, retour plutôt comme le trio s’y était perdu lors de l’album précédent. De manière générale ce scénario tient la route, sans chercher à révolutionner le genre. On est dans un album de reprise, ça me semble donc un choix cohérent, à défaut d’être courageux. Après tout, il faut prendre ses marques.

Côté dessin Francis Winis s’en sort avec les honneurs. Oui, j'assume. Les zincs sont très satisfaisants, avec en bonus la joie de croiser toute une panoplie russo-soviétique, y compris des Mig 23 et des Mig 21 ; franchement, ça m’a fait plaisir. Les deux héros sont les Su 27 et Su 34, zincs magnifiques au possible, victimes d’une inversion (confusion autour des biplaces entre Su 27 et 34) mais bon, rien de fondamentalement horrible pour le grand public. C’est juste dommage car de nombreux détails pour spécialistes viennent agrémenter certaines séquences. Le découpage emprunte à des classiques de la série, la reprise de certaines cases MAIS, même s'il se fait lyncher par la "buckosphère" des hardcores passionnés qui connaissent bien mieux l'oeuvre d'Hubinon et Charlier que les auteurs eux-mêmes, j'ai envie de le soutenir. C'est son premier véritable travail, il s'attaque à un monstre et doit faire ses gammes. Alors oui, plus d'une fois certaines cases sont médiocres, certains visages, oui, la marge de progression est évidente, oui, ce n'est pas encore du grand art mais merde, on peut aussi laisser du temps. Il serait aisé de reprendre les anciens albums pour voir à quel point le dessin ou le découpage ont pu être décevants par moments. Même Bergèse n'a pas atteint le nirvana immédiatement.

Une reprise intéressante, encore perfectible (les dessins des persos notamment, la construction des pages) mais j’ai bon espoir. Buck est étrangement en retrait, ma fois, ça change un peu. Tumb garde sa place, la vedette restant ici Sonny le gaffeur et dragueur. De nombreux clins d’œil aux anciens volumes, comme le retour de Slim, ce qui me laisse optimiste quant à la suite. J’espère vraiment que la greffe va prendre et ce 7 est un encouragement. Messieurs les auteurs, prenez vos aises et lâchez-vous !

Quant au rageux, j'ai l'impression de retrouver les napalmeurs qui flinguaient allègrement Jackson comme un hérétique ayant massacré Bilbo et LORT en général, ceux encore dézinguant la modernisation de Conan dans les comics dernièrement sortis etc etc. Et bien un coup de coeur en bonus, histoire de rappeler qu'on a le droit d'avoir du temps pour s'améliorer et que, au moins Buck vit toujours là où Tintin est mort avec Hergé.
Aqualudo
7
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le 15 nov. 2013

Modifiée

le 15 nov. 2013

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Aqualudo

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