Troisième tome de la série, ce DoggyBags nous emmène



au cœur d'un Mexique sordide, rongé par la violence des narcotrafiquants et des cartels



qui imposent leur impitoyable et sanglante loi sur l'ensemble du pays. Corps démembrés, décapitations et exécutions, mises en scènes macabres et sanguinolentes, les artistes réunis par Run pour ce numéro s'en donnent à cœur-joie pour notre plus grand plaisir et ç'a beau être dense, c'est muy bien y rapido comme une sentence immédiate.


Run au scénario ouvre l'ouvrage avec Room 213, un récit en deux parties autour d'un impitoyable tueur à gages des cartels chargé de punir ceux qui pensent pouvoir jongler avec les règles imposées : après une exécution sanglante engagée par une impressionnante et glaciale décapitation au fond d'une ruelle sordide, la narration développe



le délire halluciné et hanté de ce bourreau à l'âme souillée



jusqu'au crash final.



Putain ! Tu connaissais les règles, bordel. Tu ne peux t'en prendre
qu'à toi-même !



Au dessin, Neyef a le trait sec autant que cassant. Les ambiances – embrasement caniculaire de la ruelle et crépuscule sombre, lugubre, de la chambre d'hôtel – soulignent idéalement les deux parties de l'histoire, enveloppent le personnage dans la lumière des horreurs qu'il accomplit d'abord avant de le submerger sous les noirceurs qu'il porte jusqu'au cœur de son sommeil : grande momento !


Florent Maudoux suit avec La Danza de los 13 Velos où trois sales types se retrouvent dans un club glauque et privé près de la frontière, côté Mexique, pour échanger leurs petites histoires en réglant les détails des prochains trafics face à



la beauté saisissante d'une strip-teaseuse qui exhibe patiemment ses charmes au compte à rebours des voiles de tissu qui volent.



Tandis que chacun des ignobles protagonistes raconte au secret de l'alcôve ses démêlés avec une jeune femme mystérieuse, la danseuse, sans un mot, écoute.



À l'heure qu'il est, elle doit sécher quelque part dans le désert.



Le scénario tisse une toile de sexisme dégueulasse dans la bouche des personnages pour le plus grand plaisir du lecteur qui reconnaît doucement l'héroïne et, l'élastique toujours plus tendu, attend impatiemment un dénouement vengeur tranchant, expéditif autant que mérité.


Ce retour jouissif de Masiko


donne alors



une bonne grande leçon de féminisme rageur avec maestria,



et le dessin précis, doux autant que dynamique de l'artiste est un joyau visuel qui sublime la beauté des femmes autant que la précision du récit. Très caliente !


Pour clore l'ouvrage, Dia de Muertos met en scène, dans la nuit noire de la fameuse Fête des Morts, une milice fantomatique qui proclame agir au nom du peuple afin d'accomplir sa vengeance contre les massacres des cartels locaux. Le scénario de Francesco Giugiaro est précis, ambiance posée d'abord, avant de prendre à bras le corps les festivités sur une implacable lancée.



On le tuera... Et on tuera le suivant. Jusqu'à ce que plus personne
ne veuille mourir pour occuper cette place.



Trois hommes masqués sous leurs tenues de squelettes, armés jusqu'aux dents, lancent



un assaut millimétré, silencieux et meurtrier,



contre la petite armée supposée protéger le parrain local au cœur du complexe de villas qui constitue sa place fortifiée. Le dessin de Jérémie Gasparutto est malheureusement un peu en-dessous de ce qui a été présenté jusque là et c'est dommage, notamment au montage qui n'envoie pas la dynamique adéquate et vient parfois ralentir la fluidité d'un récit pourtant joué sur la furtivité, agressif et déterminé, mais bon, Santa Maria de Sangre, que bonito !


Maquette sublime pour ce nouveau numéro dédié aux cabrones de Mexico, où l'on se régale autant des récits que des pléthores d'informations autour du narcotrafic, de l'économie du kidnapping, et de la corruption qui gangrène les services de police et l'armée du pays. ¡ Violencia y Terror en Juarez ! est-il annoncé en couverture, pas de déception à ce niveau :



les auteurs exécutent sans pitié ces récits expéditifs teintés d'angoisse, laissent merveilleusement monter la tension et exploser leur dénouement



et si tout ce que vous saviez du Mexique jusqu'à présent se résumait aux plages idylliques de Cancun, bienvenida en Juarez : aqui es sangre de narcos ! DoggyBags étripe, décapite et arrange ses mises en scène à l'imagerie gore d'un quotidien plombé de haines et de rancoeurs jusqu'à baigner dans le sang au risque de vous laisser trancher la tête !
¡ Tres historias fatales cabron, y viva la Santa Muerte !

Matthieu_Marsan-Bach
7

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Créée

le 4 févr. 2018

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