2 tomes, 2 saisons

La qualité des dessins, la mise en page, la colorisation, le schéma narratif, le propos, … Il y a tellement de facteurs concourant à l’expérience de lecture et qui créent l’alchimie. Des fois, ça se fait de manière éclatante et je me trouve saisi du début jusqu’à la fin et des fois ça se fait de manière incompréhensible.

La lecture du premier tome de Versipelle m’a permis de comprendre la prévalence de certains facteurs dans le plaisir que je ressentais.

Cela faisait longtemps que je n’avais pas lu de BD comme ça. Quand je parle de ça, je parle de ma manière de lire et non de la BD en elle-même. Qu’est-ce qui a bien pu provoquer cet excès d’attention de ma part et cette propension à réfléchir en même temps que je lisais ?

Dès la première page, j’ai perçu trop de retenue dans la mise en page (des cases qui auraient pu s’étendre sont malheureusement bordées par de larges bandes blanches inexpressives), dans les couleurs utilisées (qui manquent à mon sens de profondeur et de vibrance) et dans la narration (avec des cases sans texte voulant planter un décor nocturne, in media res, mais de façon un peu confuse). Dans les 3-4 premières pages, j’ai pris cette retenue pour un manque d’audace… J’ai tenu à lire tout le tome avant de revoir mon jugement :

En fait, la lecture du premier tome m’a vraiment beaucoup plu. Au gré des pages, le récit se déroule de manière super fluide et agréable. C’est une belle histoire, claire avec un registre fantastique bien trouvé et super agréable à découvrir. La fin est bien amenée et donne vraiment envie de lire la suite. De ce point de vue, je trouve que la sauce prend bien !

Par contre, bien que la scénariste propose une belle histoire avec un angle de vue nouveau, la forme manque vraiment de piquant. Je pense qu’il y avait des manières d’amener les choses plus spectaculaires et immersives. Cela m’a particulièrement marqué dans la cabane de la fille hantée. Les angles de vue et la manifestation du daugr m’ont frustré ! Je pense que la dessinatrice aurait pu jouer davantage avec les cases et les dessins pour figurer la fille au milieu de sa cabane, avec toutes les armes sur des râteliers (oui, dans les faits on la voit bien avec ses armes autour mais c’est trop subtil !). Il y aurait pu avoir un gros plan sur une épée qui aurait pu se mettre en mouvement à mesure que le visiteur oppressant s’avançait dans la cabane pour au final, montrer toutes les armes se mettre en mouvement pour tailler l’air et la tête du bougre. Dans ce sens, j’aurais bien aimé plus de mouvement dans le dessin des armes lévitantes et surtout de les voir du point du vu du visiteur et non de la fille. Avec une grande case dessinée de manière horrifique figurant une pluie d’armes acérées fondre sur les intrus. Au lieu de ça, oui, le dessin insiste bien sur une épée mais cette dernière se retrouve d’un coup dans la gorge du premier intru. Avec le recul, ok je comprends le côté fulgurant de l’attaque mais, la mise en scène reste trop timide, pas de sang ni d’onomatopée.

Enfin, si les couleurs font la part belle au traitement de la lumière (que je trouve très bien exécuté), de manière générale je trouve les couleurs ternes. Enfin, je ne sais pas si c’est le coup de crayon, la colorisation ou bien l’association des deux, mais je trouve que les êtres vivants manquent de reliefs. Je retrouve la même chose dans le tome 2 sauf que dans le tome 2, la saison n’est plus la même et la représentation de la nature non plus. Les étendues de neiges, les flocons, tout ça laisse place à la verdure de la belle saison. Lumière ok, couleurs passables.

Je suis particulièrement critique dans ce cas parce que j’aime beaucoup l’histoire et je suis frustré de la forme choisie pour la raconter. Malgré cela, j’ai sincèrement passé un très bon moment et je vous conseille de lire cette BD !