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Ce troisième épisode marque la fin de la première époque. En seulement 42 planches (numérotés de 87 à 128), cet album achevé le 3 novembre 1984, montre Celui qui est né deux fois dans son rôle d’homme-médecine. Ayant beaucoup appris avec Ours qui court vite, son grand-père adoptif, le jeune homme devient le guérisseur de la tribu. Le feu reste son ami et il a des visions qui lui permettent des prédictions, qu’elles soient heureuses ou avertisseuses. Il prédit ainsi un hiver difficile, encourageant ses frères à redoubler d’ardeur à la chasse aux bisons. Sa vision de l’arrivée de l’homme blanc, très inquiétante, le laisse malheureusement sans moyen de réaction et même beaucoup trop naïf, car trop confiant dans la pratique des échanges de bons procédés, qui lui vaut notamment la reconnaissance éternelle de Cerf rouge.


Point positif par rapport au premier épisode, cette fois on comprend pourquoi des tribus indiennes peuvent s’affronter. Celui qui est né deux fois est confronté à une initiation inattendue, celle de la vie amoureuse qui le verra fonder une famille avec Lys blanc. De cette union naissent deux fils, Ecureuil rapide et Petit soleil qui vont passer l’épreuve de la danse du soleil sous la direction de leur père. Celui qui est né deux fois réussit à transmettre ses connaissances à Cerf rouge, achevant ainsi le cercle de la vie.


Cet album est à la fois simple et complexe, puisqu’il est question de destinée qui s’accomplit. Outre celle de Celui qui est né deux fois, il y a celle d’Ours qui court vite. Une fois encore, les rites sont d’une importance capitale et Derib réussit la gageure de faire passer beaucoup d’éléments essentiels en une quarantaine de planches sans se montrer particulièrement bavard. Le dessin est à l’avenant, avec le trait qu’on lui connait agrémenté de couleurs qui donnent un magnifique rendu à de nombreuses vignettes, une belle science de la narration et de l’utilisation de l’espace disponible sur une planche (utilisation de quelques doubles planches dans le sens de la largeur), toutes les visions étant présentées avec des couleurs particulièrement chaudes. On peut reprocher à ces planches un certain simplisme que les détracteurs pourraient qualifier de naïveté. Il n’empêche que Derib montre une belle connaissance des pratiques et croyances indiennes qu’il illustre dans un album de belle facture qui gagne à être lu et relu. La représentation de la nature est encore une fois une petite merveille, en particulier dans les ambiances nocturnes.


C’est la fin d’une époque et, logiquement, la mort est très présente dans l’épisode. Dans le plus parfait esprit Indien, ces morts sont compensées par des naissances. Pourtant, même si le nouveau rôle de père de Celui qui est né deux fois apporte du positif et une touche d’insouciance, les disparitions marquent davantage. La première est celle de la sagesse, celle qui respecte à la lettre les coutumes indiennes. La seconde est celle qui marque le choc entre deux civilisations, les Indiens bien que prévenus par les visions de Celui qui est né deux fois n’étant absolument pas préparés à ce qui risque de leur arriver. Ils savent que certains besoins peuvent pousser les hommes aux pires extrémités (le premier de ces besoins étant d’assurer sa subsistance), pourtant celui qui devrait se méfier avant tout se laisse surprendre comme un bleu.


Ceci dit, la fin apporte une certaine sérénité en montrant que la mort demande avant tout le détachement de notre monde et de ses valeurs matérielles. La conclusion n’est pas sans rappeler le final du film 2001, l’odyssée de l’espace en moins énigmatique puisque quelques lignes de texte font le lien entre la conscience et le temps.


L’album illustre parfaitement les paroles de Derib « Toute vie a un sens. Chacun doit travailler sur lui-même pour découvrir le sens unique et personnel de sa vie. L’homme porte en lui des capacités, quelque chose de non conscient qu’il peut révéler s’il les cherche. » D’une certaine manière, dans cet album, Celui qui est né deux fois va au bout de sa destinée. Malheureusement, l’album marque aussi la fin d’une époque et le déclin irrésistible de la nation Indienne avec l’irruption de l’homme blanc sur un territoire qu’il considère comme vierge…

Electron
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le 21 déc. 2017

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