Bonjour, un titre de critique en référence à un journal emblématique des années 60. " L'honneur du samouraï" ne fut pas mon épisode préféré durant ma jeunesse. A l'âge adulte je l'ai relu dans le cadre d'une étude sur la BD et j'y ais trouvé pas mal d'éléments révélateurs des tourments qui animaient la jeunesse durant les années 60. L'amour / la sociabilité / la jalousie / l'amitié, tout cela assez mélangé et face auquel le héros a bien du mal a se définir. Il est frappant de constater l'évolution d'un héros (Michel Vaillant) bien présenté en fils parfait tenant d'une morale traditionnel assez peu de temps auparavent dans l'épisode Route de nuit, devenir sinon un rebelle du moins un personnage qui doute quand à son attitude face à ses sentiments.


Intéressant également de découvrir comment les parents Vaillant cesse d'être des archétypes pour devenir la proie de sentiments. La mère participe à un rallye automobile pour que son mari la regarde à nouveau, le père s'inquiète pour elle malgré l'exaspération de façade qu'il manifeste bruyamment.
Les sentiments traversent les générations, le message envoyé, en 1964, au jeune lecteur est assez novateur, il lui explique combien il est normal de ne pas savoir comment agir vis à vis des sentiments que l'on ressens et combien cette sensation est partager par tous.


Pour approfondir cette réflexion je vous propose ci-dessous quelques éléments concret d'analyse, attention la numérotation des pages utilisée correspond à celle indiqué par le dessinateur sur ses planches.


L’anniversaire de Françoise Latour.


La séquence de la réception (Pl. 15-20) organisé par F. Latour à laquelle se rend Michel Vaillant et Steve Warson est révélatrice à plusieurs égards.


La réception, qualifié de cocktail, organisé par Françoise Latour pour ses 19 ans, correspond pour la jeune fille à une entrée dans le monde.


La mise en scène de la réception s'inscrit dans une logique de représentation trans-classe propre à la série.
Elle accumule les signes renvoyant à la représentation des classes sociale élevés château luxueux, invités de prestige (Michel Vaillant est invité), voitures de luxes devant le château domestique en livrée. Le fait que le père de Françoise soit présent ainsi que leur invité étranger, le pilote Yori Yoshisa, atteste que les lieux correspondent à la demeure familiale. Cependant par la pratique de danse identifiable comme typiquement jeune (pl. 16) type twist ou machpotetoes mise en vogue par Johnny Hallyday, la réception peut se rapprocher de l'image des surboum qui constitue un élément important de la sociabilité adolescente de l'époque. Le propos semble être que peut importe le luxe ou la modestie du décor, les jeunes partagent le goût pour les même distractions.


Rituels amoureux.


A l'instar des « surboum » le cocktail de Françoise Latour apparaît comme l'espace privilégié de mise en place de rituels amoureux.
Garçons et filles s'y rendent avec leurs a priori à l'égard de l'autre sexe.
Michel Vaillant se fait accompagné de son copain Steve Warson et échange avec lui une réflexion qui correspond à l'image que les garçons se font des filles.
Pl. 16 2/1 :
Steve Warson : « Où est-elle ?
Michel Vaillant : Cherche ! Elle est brune, maigrichonne, pas féminine pour un sou. »


Françoise Latour adopte un comportement qui révèle la maitrise d'une véritable stratégie amoureuse. Après avoir invité, par courrier, le garçon sur lequel elle a jeté son dévolue, elle s'emploie à le séparer de son copain, afin de pouvoir s'isoler avec lui.


Pl. 16 3/2 & 4/1 :
Françoise Latour : « […] Michel... Mais venez par ici … J'ai à vous parler de choses très graves ! // Patricia... Steve a une envie folle de danser avec toi. »


''La chose très grave'' consiste en l'irruption d'un rival qu'elle lui présente et qui se proclame comme son rival. De manière explicite sur le thème sportif et sous entendu sur le plan amoureux.


Quand Michel propose à Françoise d'entamer avec lui la poursuite du rituel amoureux, elle refuse.


Pl. 18 3/1 :
Michel Vaillant : « Françoise... Ecoutez... On joue un slow... Vous dansez ?
Françoise Latour : Non, Michel ! Vous n'avez pas compris … Cette affaire est plus grave que vous ne pensez... »


Derrière la métaphore assez transparente d'une rivalité sportive entre Michel Vaillant et Yori Yoshisa l'ensemble de l'épisode s'emploie à mettre en scène, un triangle amoureux au sein duquel la femme semble mener le jeu.
Pl. 3/3 & 4/1 :
Michel Vaillant : « Oh, vous Françoise, je ne vous ai rien demandé ! Ceci est une affaire d'homme et vous n'avez pas à vous en mêler !
Françoise Latour : Je m'en mêlerai si je veux ! Vous vous imaginez sans doute qu'il n'y a que Michel Vaillant pour pouvoir sortir Yori du pétrin !? Eh bien c'est faux ! Il s'en sortira tout seul ! »


Affirmation féminine qui marque une remise en question du modèle de la virilité masculine se structurant entre homme .
Le refus de la loi des mâles s'exprime également à travers la volonté des femmes de participer à un rallye automobile dans une logique de contestation de la loi des mâles qui fait du sport « un fief de la virilité » .


La mère de Michel se proclame directrice de course à l'instar de son mari.
Françoise et Agnès deviennent les pilotes.


Fonctions Groupe masculin Groupe féminin Liens Caractéristique physiques
Directeur de course Henri Vaillant Elisabeth Vaillant Mari / Femme

Pilote 1 Michel Vaillant Françoise Latour Amoureux Brun / Brune
Pilote 2 Steve Warson Agnès Vaillant Blond / Blonde


Le démarquage homme / femme n'est cependant pas égalitaire les femmes courent en amateur un rallye féminin tandis que les hommes se consacrent professionnellement au championnat du monde de formule 1.
La place de parents.


Le désarrois qu'éprouve le père Henri Vaillant vis à vis du fait que sa femme participe à une course automobile, opère un rapprochement de la figure paternelle par rapport à ses fils. En montrant que les parents éprouvent des sentiments et des difficultés identiques dans leurs rapports intersexe.


Dédramatisation des figures parentale qui s'exprime dès l'ouverture de l'épisode quand on voit le père chuter de son vélo.


Les relations amoureuse s'effectuent néanmoins sous l'étroite surveillance des parents.


Le cocktail d'anniversaire de Françoise Latour s'effectue dans la demeure paternelle.
Le père de Françoise rentre plus tôt pour assister à la fête.
Si Yori est hébergé chez les Latour, le père semble présent entre lui et sa fille.
La mère de Michel lui impose de se rendre au cocktail de Françoise.
Après l'accident entre Michel et Yori c'est le père de Michel qui règle le conflit en imposant aux deux adversaires les limites de son autorité.

Pl. 59 1/3 & 2/1 :


Henri Vaillant : « J'ignore sans doute la tradition ''samouraï'' ! Mais j'ai du mal à admettre qu'elle s'oppose à une offre d'amitié lorsqu'elle est sincère ! Yori est peut-être un fier descendant de samouraï, mais moi tout père Vaillant que je suis, je lui dis en face qu'il me fait aussi l'effet d'un orgueilleux gamin affublé d'une solide tête de mule !
Michel Vaillant : Papa !
Henri Vaillant : Quoi, Papa ?! Ça vous amuse sans doute de jouer aux mousquetaires, mais alors, trouvez un autre truc qui vous évite de bousiller mes voitures ! Tenez ! Réglez ça au judo ! Ça vous connait ! »

Cependant la conclusion de l'histoire ne s'effectue que grâce à l'intervention des parents qui après avoir incité leurs enfants à se fréquenter arrêtent un jeu qui devient dangereux où les protagonistes en arrivent à risquer leur vie.

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le 30 oct. 2021

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