L'ouvrage s'ouvre sur des personnages parlant d'un animateur de radio légendaire qui a connu un trou dans sa carrière. On suit ensuite une équipe de radio qui prépare le retour sur les ondes de cet animateur, dont on voit un portraît avantageux. Puis l'histoire véritable commence.

On suit une jeune femme années 1920 (chapeau cloche, robe de garçonne) qui voyage à travers les Etats-Unis. Dès qu'elle est face à un miroir, elle se parle à elle-même, ce qui entraîne des réactions d'incompréhensions. Son état est de plus en plus instable. Elle tombe sur une voiture en panne, que répare un homme très laid, sorte de Frankenstein triste. L'homme lui propose de venir chez lui se changer, se restaurer. Elle accepte.

Helen reste quelques jours. L'homme se révèle très cultivé. Misanthrope (on lui laisse ses courses à la boîte aux lettres), mais contemplatif. Peintre, mais torturé. Tous deux mènent leur vie l'un à côté de l'autre. L'homme réussit à faire voir à Helen la vérité en face : depuis la mort de sa soeur jumelle, elle souffre de dissociation de la personnalité. Ayant compris cela, la jeune femme part en lâchant des remarques aigre-douce. Arrivée à la gare, l'homme la rejoint, la supplie de rester. Elle l'envoie paître. Puis revient d'elle-même. Ils font l'amour. Elle rentre chez elle, se marie. Elle entend à la radio la voix de l'animateur et comprend qu'elle a redonné à cet homme très laid le goût de revenir sur les ondes. Cela presse son accouchement. On retrouve ensuite Helen vieille, avec sa fille, et son agonie d'un cancer.

Le graphisme noir et blanc fait penser à du Milton Canniff, avec un goût pour les applats d'ombre et des détails réalistes foisonnants sur l'Amérique des années 1920 : voitures, main street, drugstore, publicités imitant du Norman Rockwell ou du Hopper. C'est un véritable festival pour les yeux.

Quant aux dialogues, ils sont très personnels, et montrent bien comment ces deux individualités ne cessent de se blesser tout en se débattant avec leurs problèmes personnels. La puissance psychologique des non-dits est incroyable. Certains n'aimeront pas et trouveront ces dialogues empruntés un peu trop compassés, à la manière des films de la Nouvelle Vague, mais pour moi c'était une véritable bouffée de fraîcheur.

Je recommande chaudement cette BD fort personnelle, qui tire très bien son épingle du jeu à une époque où la BD historique devient trop prévisible.
zardoz6704
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le 9 juil. 2013

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