Déçu par mes tous premiers pas sur Terre, je reportais mes espoirs sur l’avion. J’appris à lire dans Tanguy et Laverdure, Buck Danny et Dan Cooper. Mon frère aimait les voitures. Comment peut-on se passionner pour ces boites à quatre roues alors que le génie humain s’évertue à créer, chaque année, de nouvelles machines volantes ? En terme de BD, son choix se réduisait à Michel Vaillant. Le dessin est d’un classicisme « ligne claire » absolu. Le héros est insipide et sa perfection à hurler. Quelqu’un saurait-il pourquoi Jean Graton a omis de lui adjoindre un Haddock ou un Laverdure ?


Michel Vaillant est l’avatar contemporain et illustré de Bayard, le « chevalier sans peur et sans reproche » d’un roman national désormais obsolète. Pierre Terrail de Bayard fut un authentique féodal dauphinois de toute petite noblesse, monté par le rang et la bravoure, qui arma chevalier le jeune François Ier. Alors qu’il couvrait la retraite de nos troupes bousculées par celles du connétable (félon) de Bourbon, il sera lâchement tué d’un tir d’escopette ; l’arme à feu abolit, sur les champs de bataille, les privilèges du sang bien avant l’irruption de la guillotine ; dans le dos à Romagnano Sesio. Vous trépignez : Michel Vaillant ne porte pas d’armure et ne guerroie pas en Italie. Certes, lorsque Graton crée Michel pour le Journal de Tintin en 1957, l’époque est pacifiée, les armes se sont tues et les nationalismes font profil bas. Menacés de disparition, ils ne devront leur survie qu’au triptyque sportif football-vélo-automobile.


Michel Vaillant est pilote de Formule 1, la catégorie reine. S’il ne se revendique pas de sang bleu, notre homme est le cadet d’une jeune dynastie industrielle, les Vaillant. Le père incarne les valeurs d’un patronat paternaliste, catholique et bourgeois, aujourd’hui en péril. Les mères et épouses du clan restent à leur place : la maison, auprès de leurs enfants et maris. Les deux fils s’entendent à merveille. Jean-Michel se prépare à succéder au père, en travaillant avec acharnement sur les Vaillantes. Michel conduit, et se conduit, fort bien : point de maitresses et de frasques pour cette âme pure. Le héro accumule les titres de champion du monde et les éloges pour sa droiture. Comment conserver un minimum d’intérêt à une série qui franchira le cap des 70 tomes ? En variant les plaisirs. A l’image de son contemporain Buck Danny, prié de changer d’arme et de continents, Michel voyage. Après le transport routier (Route de nuit), les prototypes et les GT (Le Circuit de la peur), les 24 heures du Mans (Le 13 est au départ), place au cinéma : Michel sera cascadeur. Le scénario se veut pédagogique et le lecteur attentif n’ignorera plus rien du travail des doublures. Le fort courtois Michel ne se reconnaît aucun ennemi, seulement des adversaires. Il affrontera pourtant une ombre sinistre surgie de son passé. Il la vaincra et l’épargnera. Michel, t’es trop sympa mais tes bouquins m’assomment. Pardon frérot.

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le 4 juil. 2016

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Step de Boisse

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