Un vieux couple menant une vie paisible aux environs de Prairie Rose ; un homme de main, violent et rongé par un terrible secret, lâché dans les environs du casino de Red Crow ; un revenant, un soldat, à qui la mort semble refuser le repos, retourne à la réserve avec pour dernière volonté de retrouver l’amour de sa vie ; et deux âmes torturées se débattant dans les volutes toxiques de leurs accoutumances, perdues entre leurs souvenirs pourris et l’espoir mort-né d’une nouvelle vie. Bienvenue à Prairie Rose.

J’ai mis un peu de temps à lire le tome 7 après avoir fini le 6 ; En effet j’étais resté sur une telle qualité, sur un tel plaisir de lecture, sur un tel génie de Jason Aaron que j’avais un peu peur d’être déçu et que tout cela retombe. Peur d’avoir un tome qui n’arrive pas à surfer aussi haut que le tome précédent. Pas facile de voir une série descendre de son piédestal. Cela va-t-il être le cas ici ? Nous allons voir cela. Mais avant, de quoi parle le tome 7 ?

On commence ce tome 7 « Red Blues » avec un chapitre ovni, un chapitre auquel je ne m’attendais pas du tout. Pas de Dashiell, pas de Carol, par de Red Horse, pas de Prairie Rose ! Juste un joli petit couple d’Indiens à la retraite. Mance et Hazel. Mance aime Hazel à la folie, plus que tout. Hazel aime Mance à la folie, plus que tout. On va suivre une tranche de leur vie. Une vie dure, Hazel est malade, Mance se remet de blessures, mais l’hiver arrive et les provisions récoltées ne sont pas suffisante pour traverser cette saison difficile. Mais qu’importe, seul leur amour les fait tenir. Et à travers une narration de génie, mêlant paroles et pensées on se rend compte à tel point ces deux là s’aiment. Cela en est même assez émouvant je dois bien avouer. A travers cette narration habile, Jason Aaron nous fait ressentir cet amour véritable et sans limite. Le sort s’acharne sur eux mais ils le surmontent grâce à leurs sentiments l’un pour l’autre et réussissent du coup à traverser cette épreuve. Les dessins, qui sont ici l’œuvre de Danijel Zezelj, sont assez sombres, assez particuliers mais ils collent parfaitement à l’histoire, ils retransmettent parfaitement ce qui se dégage de ce récit. Par contre, j’avoue qu’une fois ce chapitre lu on se demande un peu ce qu’il fait là.

Viens ensuite une histoire en deux chapitres, qui met en lumière l’homme de main de Red Crow : Snuka. Là aussi pas de Prairie Rose. Snuka est envoyé en mission dans une autre réserve. C’est très violent, à l’image du protagoniste mais également très surprenant au vue du terrible secret que cet Indien bourru cache aux yeux de tous. Je suis resté sans voix, tellement j’ai été surpris.
C’est une des forces de Jason Aaron, réussir à mettre son récit en pause le temps de quelques chapitres afin de mettre en avant un personnage secondaire et à nous faire s’y intéresser. Jusqu’à maintenant, Snuka était pour moi un personnage lambda sans grand intérêt et il vient de prendre une autre dimension, en voyant qu’il est capable de ressentir des choses.

Voyage dans le temps ensuite. On se retrouve en pleine guerre du Viet Nam. On y suit un jeune Indien, qui survit miraculeusement à plusieurs évènements, là où il aurait du mourir. Il sombre dans le trafic de drogue. Il est violent et méprisable. Il finira ensuite par revenir dans sa réserve en tant qu’agent infiltré du FBI. Son nom : Bad Horse ! Wade Bad Horse ! Et oui, au vue de tous ces évènements on aurait presque pu s’attendre à ce que ce soit Dashiell et non son père. Comme quoi, le fils a marché, malgré lui, dans les pas de son père. Episode fort plaisant qui permet à Jason Aaron de faire entrer un nouveau personnage dans l’équation en la personne de Wade Bad Horse, le père de Dashiell.

Sur toute la deuxième moitié de ce tome 7, l’histoire principale reprend son cours. Dashiell, après avoir sombré au plus profond à cause de la drogue, va se retrouver face à une possibilité de s’en sortir. Possibilité offerte par une personne à laquelle on ne s’attendait pas. Mais le chemin va être long et très douloureux pour lui. Carol de son côté ne va pas vouloir garder son bébé. Là aussi elle va, elle aussi, marcher dans les pas de sa mère, qui à l’époque avait elle aussi voulu avorter sur Mamie Poor Bear. La vieille dame, qui ne peux avoir d’enfant, a passé sa vie à s’occuper de ceux des autres, et compte bien faire de même avec Carol et son bébé. Carol aussi va alors avoir une chance de se débarrasser de son problème de drogue et de remettre sa vie sur de bons rails.
Tout rentre dans l’ordre, on en vient à rêver que Carol et Dashiell vont se retrouver et qu’enfin le bonheur va s’offrir à eux. D’autant que tout s’y prête. Dashiell acceptant même de renouer avec son père et d’enquêter avec lui sur le décès de Gina Bad Horse. Les évènements s’enchainent, l’histoire défile sous nos yeux à une vitesse folle, le tout agrémenter de superbes dessins de R.M. Guéra. Nos espoirs atteignent des sommets avec une vision du futur où l’on voit Dashiell et Carol au firmament du bonheur autour de leur petite fille.
Mais Jason Aaron n’est pas de cet avis. Et le dernier chapitre est une pure réussite narrative. D’une telle force, d’une telle puissance émotionnelle. Et à sa lecture on comprend enfin le premier chapitre ovni du tome avec les deux petits vieux et leur amour. Jason Aaron utilise, dans ce dernier chapitre le même principe narratif, mélangeant paroles et pensées. Nous montrant ainsi que Dashiell et Carol s’aiment de la même façon que Mance et Hazel, mais que les évènements, l’univers de Prairie Rose vont les faire s’éloigner, et ce bonheur, un temps espéré, meurt dans l’œuf, dans tous le sens du terme, emportant avec lui tous nos espoirs.
Tome très sombre au final, où de la façon la plus cruelle, et avec tout son génie, Jason Aaron s’amuse à tuer tous nos espoirs. Et il n’y est pas allé avec délicatesse dans ce tome 7. C’est avec presque une cruauté à peine dissimulée que le sort s’acharne avec violence sur Dashiell et Carol. Alors que Jason Aaron avait habillement œuvré pour nous montrer à quel point l’amour entre ces deux là était puissant.
Bref un tome parfait ! Alors que je pensais avoir atteint des sommets avec le tome 6, je m’envole encore plus loin avec ce volume. Mais où Jason Aaron va-t-il s’arrêter sur ce titre ? Il y a ici une intensité dramatique formidable, on souffre en découvrant ce qu’il se passe entre nos deux tourtereaux et ça nous crève littéralement le cœur. J’ai été ému à la lecture de ce tome et je ne m’y attendais pas. Merci Monsieur Aaron de nous régaler et de nous faire passer par tant de sentiments à travers ce titre : Scalped !
Romain_Bouvet
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le 18 janv. 2014

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