Sâti - Basil et Victoria, tome 1 par Cthulie-la-Mignonne

Victoria et Basil, gamins des rues d'une dizaine d'années, vivent en couple, divorcent régulièrement et se débrouillent comme ils peuvent pour vivre dans le Londres des années 1880. Victoria, c'est la gouailleuse, terre-à-terre, peu sentimentale et même assez dépourvue d'empathie, ce qui ne la rend pas forcément sympathique. Surtout quand elle fait combattre son chien à mort pour récupérer de l'argent destiné à sauver son frère. Ce qui compte pour elle, c'est survivre. Basil, s'il garde les pieds sur terre, c'est le gentil du couple. Bien décidé à s'en sortir lui aussi, mais possédant une capacité à s'émouvoir nettement supérieure à celle de Victoria. On le voit, les auteurs ont volontairement inversé les codes des genres en cours à la fin XIXème siècle. Bon, c'est pas non plus d'une originalité criante, hein.


Il semblerait que Édith et Yann aient misé grandement sur le dessin. Effectué au crayon, avec des effets de découpage papier et renouant un peu avec le style des BD du début du vingtième siècle, il possède, c'est certain, un charme vintage qui colle très bien au Londres victorien des bas-fonds. D'ailleurs, on peut noter en passant plusieurs clins d’œil aux illustrations de Gustave Doré pour l'ouvrage London, a pilgrimage. Les coloris sont généralement, et volontairement, ternes - beaucoup de gris, de beige, de marron, beaucoup de planches presque monochromes. Le souci, c'est que, d'une part, cette primauté du dessin a porté préjudice au scénario, qui manque d'originalité - Basil et Victoria vont être lancés sur la piste d'une petite Indienne de leur âge essayant d'échapper au sacrifice du sâti, l'aider et la sauver. D'autre part, Édith s'est un peu emballée dans son travail de colorisation et a forcé sur l'aspect monochrome de certaines planches ; si bien que, pour une scène de nuit, on a droit à quatre ou cinq planches d'un bleu un peu trop soutenu, pour une scène d'incendie, à trois ou quatre planches d'un seul ton rouge, tout aussi soutenu, etc., etc. Cette utilisation du monochrome est carrément abusif et manque de subtilité, si bien qu'il dessert l'ensemble de l'album.


Cela dit, on ne s'ennuie pas à suivre les aventures de Basil et Victoria : les dialogues sont réussis, le rythme soutenu, les personnages plutôt drôles et attachants. Et on a même l'occasion de rencontrer le docteur Watson... Reste à voir si les défauts de cet album seront évités par la suite. Rendez-vous donc pour le second épisode !

Cthulie-la-Mignonne
7

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Créée

le 17 avr. 2016

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