Limace londonienne.

Le thème de l'erreur génétique qui grossit et casse tout est bien traité par Maurice Tillieux. Son humour, devenu célèbre par les répliques de Libellule, dans "Gil Jourdan", réapparaît ici dans les dialogues. Surtout, Tillieux s'est livré à une enquête sérieuse sur Londres avant de fournir le scénario et la documentation à Will, et il se paie le luxe de fournir des décors plus exacts de Limehouse Dock que ceux qu'en avait proposés Edgar-Pierre Jacobs dans "La Marque Jaune".

Les personnages sont bien rôdés: Tif, plutôt impulsif et fort en gueule; Tondu plus réfléchi et suspicieux; Amélie d'Yeu agaçante d'égotisme quoique mignonne.

Les scènes aquatiques (Docks, Tamise), les souterrains (égouts), le cadre sinistre des docks déserts créent une atmosphère de huis clos tendu qui contraste avec quelques belles échappées sur les paysages les plus connus de Londres, et sur le littoral. Les scènes où figurent le monstre, l'échouage d'un gros navire, le bombardement par Stuka (!) sont autant de points forts autour desquels Tillieux a bâti son récit.

L'explicative de la naissance du monstre est assez fantaisiste: les rayons ultra-violets y seraient pour quelque chose, alors que les infra-rouges remédieraient au problème. Vu les propriétés des uns et des autres sur la matière vivante, on aurait plutôt postulé le contraire. De même, l'appareil à visualiser les pensées a un fonctionnement plutôt sommaire. Peu importe la vraisemblance. L'atmosphère y est, l'angoisse, et la bonne humeur. On n'en demande pas plus à Tif et Tondu.