Ce héros crée en 1966 dans le journal Tintin était d'un genre nouveau, décontracté et élégant, alors que la plupart des héros d'aventure étaient jusqu'ici plutôt mal dégrossis, musclés et batailleurs. Prince et son allure de playboy aux cheveux blancs, était non seulement une gravure de mode ambulante, mais donnait en plus une nouvelle vision du héros. Il sera l'un des plus fameux du journal Tintin de la grande époque, et l'un des grands héros de la BD franco-belge classique. Ce héros faisait partie de mes favoris du journal, j'ai beaucoup aimé la période où Hermann s'en est occupé, mais après son retrait, la bande fut reprise par Dany puis Aidans, des collègues du journal, j'ai trouvé le niveau moins abouti, Greg n'était plus en forme semble-t-il.
Au début, Prince est un agent d'Interpol, il n'a pas la silhouette svelte que Hermann lui donnera ensuite. Avec Tonnerre sur Coronado, Prince se paie son premier vrai 44 planches où il vient au secours de peones dépossédés par Kurt Bronzen, vieille connaissance que les héros ont déjà affronté dans les 2 épisodes précédents. Ces 2 épisodes étaient des récits courts (les Pirates du Lokanga, le Général Satan) qui ont été édités par Le Lombard en 1 seul album ; le dessin était encore rudimentaire, Hermann n'avait pas trouvé ses marques, et Greg testait la formule.
C'est dans cet épisode à Coronado, petit territoire imaginaire d'Amérique du Sud, que les auteurs cisèlent vraiment leurs personnages ; graphiquement, Hermann a pratiquement stabilisé son trait, on sent une nette amélioration par rapport aux épisodes précédents dont le dessin ressemblait encore à celui des récits d'Interpol. Du côté scénario, c'est un récit classique de défense des opprimés, mais le plus intéressant, c'est la personnalité que Greg donne à Prince et Barney (voire même aussi à Djinn bien qu'il reste souvent plus en retrait), et le ton qu'il insuffle à la bande : Greg cultive un humour souvent cynique avec un sens inné et très pertinent de la réplique dont il s'est fait une spécialité. Ceci ajouté à la psychologie donnée à l'ensemble est la signature même du grand bonhomme que fut Greg, et qu'on retrouve dans toutes les séries qu'il scénarisa chez Tintin, la plus approchante étant Bruno Brazil.
Ici, tous ces éléments sont donc en place, en plus de personnages secondaires pittoresques comme El Lobo, et de séquences drôles qui apportent de la détente au sein de situations tendues ou dramatiques ; c'est le cas ici, avec la scène du pulque, où Barney prouve son amour de la bagarre et de l'alcool, expert à vider des bouteilles. C'est pourquoi cet épisode, bien que n'étant pas parmi les meilleurs de la série, se hisse quand même à un très bon niveau de qualité.

Ugly
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le 15 oct. 2020

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