Tout au long de ma lecture de cette série, je me suis demandé d'où venait cette obsession de l'auteur à toujours faire passer son héroïne par une porte (le plus souvent difficile à ouvrir) ; de plus, on retrouve assez fréquemment la plage, lieu propice à l'érotisme. l'album "Druuna X" répond à ces interrogations. Pour ce qui est des portes, Serpieri a simplement fait un cauchemar qui l'a marqué au point qu'il s'en souvient encore aujourd'hui : il devait franchir une porte qui menait à des sous-terrains habités par des monstres (ça fait penser à Lovecraft). Pour ce qui es de la plage, cela fait simplement écho au moment où Serpieri a eu le déclic pour cette série (enfin, il explique qu'il y a un autre moment, lorsqu'il a vu "La femme publique", film dans lequel l'héroïne, à un moment, s'admire devant une glace, il s'est alors dit que c'était le genre d'héroïne qu'il voulait mettre sur papier) : un jour, alors qu'il se baladait le long de la mer, il vit une femme sortir de l'eau complètement nue, les gouttes ruisselant sur son corps. Cette situation l'a particulièrement émoustillé et il s'en est servi dès le premier album... cela n'explique pas pourquoi narrativement, Druuna se confronte autant de fois à la même plage, mais cela permet de comprendre que cette série est avant tout un moyen pour l'auteur de traiter de ses obsessions : les femmes, la sensualité, les courbes, les culs, l'horreur, la peur, l'humanité, les émotions.


Le scénario est très linéaire. Quelques sursauts surréalistes viennent ponctuer le récit, mais c'est globalement en ligne droite que Druuna parcourt cette aventure. Cela n'est pas trop dérangeant, car on se dit que l'auteur donnera enfin les clefs de compréhension, puisqu'il s'agit du dernier album. Et bien non. On dirait même qu'il change d'histoire, oublie les conflits des précédents albums et se concentrent sur une question philosophique : qu'est-ce qu'un homme ? À nouveau, on ressent l'influence de "Blade Runner", mais aussi d'autres films de science-fiction y compris "Predator" ou encore "The lord of the rings".


Ce qui dérange, ce n'est pas cet abandon de conflits mis en place depuis le début, mais plutôt la pauvreté érotique de l'album : Druuna ne fait que peu de rencontres et même l'aspect gore en prend un coup. En fait, Druuna marche et s'interroge. L'humour prend un peu le relais, c'est en effet l'album qui m'a le plus fait rire de la série. Et puis je vois à la fin de l'album que l'auteur a projeté de réaliser "Clone n°2" (titre provisoire). Je me demande si c'est toujours en projet étant donné qu'il a sorti "Anima" cette année.


Graphiquement, c'est joli, mais là aussi l'auteur paraît peu inspiré : c'est toujours détaillé, les décors remuent un peu les tripes, mais pas autant qu'avant. Un seul plan gore de mémorable. Et le peu de sexe qu'il y a est grossièrement auto-censuré, lui qui se montrait si ingénieux pour cacher des parties génitales autrefois, il se contente ici de placer un phylactère au bon endroit. Même le découpage en soi n'a provoqué aucun émoi dans mon pantalon.


Bref, ce dernier tome (?) de la série est un peu décevant, prétexte à déverser des convictions philosophiques certes intéressantes et exploitées, mais empêchant l'auteur d'offrir des scènes dignes de ce nom. Dommage.

Fatpooper
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le 30 janv. 2016

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