La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres

Globalement les albums de Lucky Luke vieillissent très bien : la BD du XXIème siècle ne créée plus de grande saga aussi constante, dans relativement peu de cases les auteurs ont su développer des aventures denses et drôles et enfin les histoires sont pour la plupart intemporelles. Des barbelés sur la prairie entre parfaitement dans ce schéma voire même et fait même encore plus de sens en 2020 qu'en 1967, date de sa parution.


Il est question ici de présenter les intérêts des éleveurs de bovins (dont ils avaient la totale liberté de circuler sur la prairie) comme étant peu conciliables avec ceux des fermiers (parcelles de culture qui demandent de la place, du soin et de l'attention). Et de manière sous-jacente il est question de la viande comme totem intouchable et essentiel de l'alimentation et de son opposition aux produits de la terre. En bref, des débats très actuels.


Comme beaucoup d'albums de la période Dupuis (Des rails sur la prairie, Ruée sur l'Oklahoma, A l'ombre des derricks), le far west est découpé dans ses mythes fondateurs.
On sent donc que les auteurs ont mis un soin particulier à faire du sujet de fond l'élément central du récit. Et le moins que l'on puisse dire est que ce scénario est très bien ficelé avec une montée en tension crescendo.


Côté personnage, la caricature de l'éleveur bovin Cass Casey qui "pensait viande, mangeait viande, était viande" est très réussi. Il s’arcboute à son mode de vie et n'accepte pas le partage des terres. Le fermier Vernon Felps est convaincu de son bon droit et ne se laissera pas faire.
Lucky Luke enfin est très intéressant dans cet album, à la fois très réfléchi et investi. Loin de la discrétion dont il a pu faire preuve dans certains albums (ex : Les Dalton dans le blizzard)


Les auteurs offrent un traitement plus favorable aux fermiers qu'aux éleveurs mais l'arrivée des barbelés sur la praire (et donc de la matérialisation de la propriété privée) ne semble finalement pas tant porteur de progrès que cela (cf le "Enfin Libres" derrières 3 clôtures en planche 32). L'album invite à prolonger la réflexion une fois sa fermeture, c'est un peu dommage que l'humour est beaucoup moins présent, autrement il aurait pu aller chercher plus haut.


En somme, un Les Rivaux de Painful Gulch (pour son caractère dual/d'opposition) avec beaucoup moins de gags mais certainement plus de profondeur.

Volubilis78
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le 25 déc. 2020

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