Critique de l’intégralité de la série
De nombreux mangas traitent de la Seconde Guerre mondiale : de l’implication du Japon et de la bombe atomique. Mais presque aucun ne raconte l’horreur qu’ont subit les habitants. Keiji Nakazawa l’a vécu et raconte son histoire à travers le personnage de Gen.

Gen et sa famille vivent à Hiroshima en pleine guerre. Rejetés par les voisins à cause de l’idéologie pacifiste du père, ils survivent comme ils peuvent. Jusqu’au jour où la bombe tombe sur la ville, la ravageant et tuant une partie de sa famille. Comment Gen survivra-t-il à ce malheur?

« Gen d’hiroshima » est un manga très difficile à lire par son propos. Toutes les vies racontées sont liées par la guerre et l’horreur, que subissent les Japonais, dans un conflit qu’ils n’ont pas demandé. Essayant juste de survivre, la famille se réjouie des petits riens de la vie, comme pouvoir manger une simple patate crue, ou chanter pour se donner du courage. Elle subira les pires mesquineries du voisinage, des idéologistes de la guerre, et l’abus de pouvoir des autorités. Jusqu’au jour où la bombe tombe…. À partir de ce moment, le manga montre toute l’horreur que les habitants ont vécu. Des corps brulés, fondus, éventrés, empalés contre des arbres. Des villes détruites, de nombreuses personnes suffoquant. Puis les effets des radiations, les maladies, ou encore l’infection de leurs blessures, menant sur la ville des nuages de mouches, et une puanteur abominable. Des montagnes de corps incinérés, de nombreux orphelins, et des Américains qui prennent le contrôle du pays, suite à la reddition sans conditions du Japon. L'auteur met Gen dans de nombreuses situations difficiles qu’il est difficile d'énumérer, où la survie est indispensable. Mais celui-ci gardera le goût de vivre, et prônera la paix, tout en détestant la poignée d’hommes qui ont lancés cette guerre. Plus qu’un simple témoignage de l’horreur de la bombe, l’auteur continue son récit pour raconter la difficulté du peuple, abandonnée par leur gouvernement, censuré et en proie à la misère et aux Yakusa. Gen rencontrera puis perdra de nombreuses personnes qu’il aura aidé. Le Mangaka en profite pour montrer comment tous ces gens survivent, que ce soit en oubliant leur fierté, en changeant d'idéologie, ou en s’enrichissant sur les pauvres. Il n’oubliera pas non plus les effets de cette tragédie plusieurs années après, alors que certaines personnes oublient déjà les souffrances vécues. Raconté sans coupure, ni chapitre, c’est une oeuvre difficile mais nécessaire, l’horreur est réelle et aucunement gratuite. Le manga est un témoignage autobiographique romancée, à 80% authentique. Keiji Nakazawa réussit parfaitement à transmettre le propos de son récit aux générations futures, il ne cesse de montrer la monstruosité des gens pendant la guerre. Mais il mettra aussi en avant la tolérance, l’amitié, la rage de vivre et de construire un monde de paix. Seules quelques répétitions de discours se font ressentir par moment.

Côté dessin, l’auteur utilise un style assez enfantin allégeant ainsi les propos et les évènements. Il affiche clairement les émotions, mais toujours dans l’exagération. Les protagonistes peuvent passer du rire aux larmes en une case. Plus de réalisme aurait finalement desservi l’oeuvre qui serait trop difficile à supporter.

Cette saga a connu plusieurs éditions. Arrêtées dès le volume un par « Les Humanoïdes » et « Albin Michel », c’est finalement « Vertige Graphic » qui édite l’intégralité en deux tailles, un grand et un petit. C’est ce dernier format qui sera critiqué. L’édition est un peu plus grande que les volumes standards. Deux postfaces et une analyse sont présentes. Les couvertures sont amovibles, et toutes les pages en noir et blanc. Une légère pixélisation se fait remarquer, rien de gênant mais ce défaut n’a pas l’air d’être présent sur la grande édition. De plus les couvertures ne sont pas vraiment attirantes, l’éditeur aurait dû faire un effort et reprendre celles de la grande édition, bien plus représentatives.

« Gen d’hiroshima » est un véritable témoignage d’avant-après cet holocauste. N'ayant pas de retenue dans sa narration, l'oeuvre ne peut qu’interpeller les lecteurs pour prôner la paix dans le monde. Très difficile à lire par la dureté des propos, il retranscrit plus le vécu, qu’un récit historique. Ce manga est une réussite et tout le monde se doit de le lire au moins une fois dans sa vie !
darkjuju
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 26 déc. 2014

Critique lue 543 fois

2 j'aime

darkjuju

Écrit par

Critique lue 543 fois

2

D'autres avis sur Gen d'Hiroshima, tome 1

Gen d'Hiroshima, tome 1
amandecherie
8

Critique de Gen d'Hiroshima, tome 1 par amandecherie

Gen a à peine 7 ans lorsqu'un beau jour d'été, sa ville, Hiroshima, est pulvérisée par 'Thin Boy', bombe atomique lancée par les Américains. Gen voit alors son père, sa sœur et son frère mourir...

le 27 sept. 2010

8 j'aime

1

Gen d'Hiroshima, tome 1
Skaroulette
10

Simple et efficace

Avec son style graphique "rétro" et aux allure enfantines, Gen d'Hiroshima peut rebuter aux premiers abords. A ma grande surprise il m'a suffit de quelques pages pour "adhérer" au style, m'attacher...

le 14 juil. 2011

6 j'aime

Gen d'Hiroshima, tome 1
Finkel
4

Art Spiegelman‎ le recommande....

J'ai peut-être du mal avec les récits autobiographique, ou avec le style graphique viello des bandes dessinées de l'après guerre. Mais encore une fois après Maus, une déception pour moi. Bien que...

le 8 févr. 2011

5 j'aime

10

Du même critique

L'Histoire des 3 Adolf
darkjuju
10

Critique de l’intégralité de la série

Cette oeuvre d’Osamu Tezuka a été publiée dans un sérieux magazine d’actualités qui s’ouvre au manga. Ayant connu, enfant, la guerre et ses conséquences, l’auteur nous livre un récit...

le 7 oct. 2014

8 j'aime

3

L'Enfant - Vie de Mizuki, tome 1
darkjuju
9

Critique de l’intégralité de la série.

Critique de l’intégralité de la série. Mizuki est considéré comme le maître des Yokaï, à juste titre. Mais, ce que beaucoup de personnes ignorent, c’est qu’avant d’en arriver là, Mizuki a eu une vie...

le 18 juin 2014

6 j'aime

3

Sex & Fury
darkjuju
9

Critique de Sex & Fury par darkjuju

« Sex & Fury » est un recueil d'histoires réalisées dans les années 70 par le Maître du tatouage Bonten Taro. Celui-ci débute sa carrière vers 1950 par des shojos. En manque d'inspiration, il décide...

le 18 juin 2014

6 j'aime