Aboutissement !

Dans cet épisode Goscinny et Uderzo accède à un sommet dramatique. Énormément de choses restent à dire sur cette histoire qui mériterait un ouvrage complet pour annaylser les enjeux qu'il développe.
En attendant voici quelques réflexions plutôt axé sur la dimension sociologique du village, où les personnages féminin se prennent de l'importance.

Titre : La zizanie

Auteurs : René Goscinny et Albert Uderzo

1ère publication : Pilote n° 531 8 janvier 1970
Publication album : 1970 Dargaud

Résumé : Pour venir à bout du village gaulois César leur envoie un semeur de zizanie Tullius Détritus.

Commentaires : L'album développe la vie du village. Les personnages féminin se prennent de l'importance.

Structures du pouvoir :
L'action du semeur de zizanie (Tullius Détritus) s'exerce essentiellement par le réveil du conflit latent entre Astérix (fils) et Abraracourcix (père). Abraracourcix est un chef inquiet de perdre son pouvoir c'est lui qui provoque la crise du village en soupçonnant Astérix de vouloir prendre sa place, ce qui fait écho aux épreuves qu'Abraracourcix inflige à Astérix dans d'autres albums (Astérix et le chaudron, Les lauriers de césar).
On découvre à l'occasion de cet album la véritable structure du pouvoir dans le village.
– Le pouvoir suprême est détenu par le druide Panoramix qui avec le secret de la potion magique possède le pouvoir suprême celui qui donne la toute-puissance.
– Il délègue ce pouvoir au chef Abraracourcix qui l'assure avec bienveillance mais on pressant que pour majestueux qu'il soit son pouvoir est fragile à l'image du pavois dont il ne cesse de choir. Panoramix n'hésite pas d'ailleurs à retirer son pouvoir à Abraracourcix en quittant du village. On remarque d'ailleurs que le village est fragilisé lors de chaque absence du druide :
– Le village est en deuil à la fin du premier album (« Astérix le gaulois ») en croyant Astérix et Panoramix mort.
– Dans « Le devin » le village tombe sous la coupe d'un escroc pendant une absence du druide.

– Si le pouvoir d'Abraracourcix est si facilement contestable (à la fin de l'aventure Astérix s'amuse même à en s'ériger en pavois porté par Obélix (p 46 2/1)) c'est qu'il ne relève pas du sacré (dévolu à Panoramix) mais du politique c'est à dire de l'accord de tous.
– Pour conserver son pouvoir Abraracourcix doit en permanence fait allégeance à celui du druide :
Abraracourcix : « D'accord, nous avons mal agi. Nous avons cru les calomnies de ce romain, et nous avons eu tort... Mais, serais-tu capable de nous abandonner ? » (P 38 3/1)
On peut noter que Panoramix ne répond pas tout de suite, il attend que tout le village lui fasse allégeance avant de donner sa réponse.

Panoramix : « Enfin, je vous retrouve ! Complètement fous, mais unis à nouveau. Je vais vous en préparer, moi, de la potion magique ! De la vraie ! » (P 38 4/2)
Il réaffirme son pouvoir face à ceux qui on douté de lui.

Panoramix de par son pouvoir maintient l'unité du village mais cette tutelle suppose que les habitants soit maintenu dans un état de sujétion infantile aussi on comprend que toutes les tentatives du village pour s'émanciper

On peut dire que s'illustre deux types de pouvoir celui qui relève du sacré l'auctoritas détenu par le druide Panoramix et celui qui relève du politique la podestats déléguée à Abraracourcix. On peut aussi analyser la structure du pouvoir

– Bonemine sa femme cherche à s'approprier une partie de son prestige.
– Abraracourcix est même obliger de faire amende honorable de ses erreurs.

Autre constat :
Le village illustre la sociabilité traditionnelle des villages ou quartiers où les lieux de paroles sont sexuellement attribué .
– La place publique est le lieu de discussions des hommes.
– Les femmes se réunissent dans la hutte du chef, autours de Bonemine qui trouve là l'occasion reproduire le mode de représentation bourgeoise conforme au standing social auquel elle aspire. Les femmes de la petite bourgeoisie s'attachant à la fin du XIX° siècle à copier l'usage de la haute société de recevoir (« d'avoir un jour ») l'après-midi . Rituelle de réception qui opère pour ses acteurs comme un marqueur de rattachement à la classe bourgeoise mais qui au cours des années 60 peut apparaître comme un symbole de conformisme. Le ton satirique qui domine dans la manière de présenter les relations villageoises paraît ringardiser cette ambition de promotion social par le copiage des usages bourgeois où domine le conformisme et qui a été remis en question par mai 68. La zazanie peut apparaître comme une critique grinçante.
Le ton de la conversation obéi aux principes des conversations de village, derrière des apparences anodines on s'exprime par sous entendus que chacun comprend.

Le commerce du poissonnier Ordralphabétix correspond également aux rituels de la sociabilité villageoise où tout le monde se connait et échange des propos et obéit à une hiérarchie implicite qui donne à Bonemine la prééminence sur les autres clientes.

Les femmes prennent de l'importance dans la vie sociale du village et comme moteur de l'histoire, elles constituent un élément essentiel du déroulement de l'histoire, elles offrent un contre modèle du pouvoir, en effet si les hommes paraissent dominer sur la place publique les femmes sont incontestablement les maitresses de l'espace privée leur influence se mesure par la circulation de l'information qu'elles opèrent, ainsi les bavardage du gouter du femmes (p 19) se transforme en vérité dans la bouche des hommes sur la place du village (p 20))  :

– Le chef Abraracourcix plie sous la férule de sa femme Bonemine (p 12). Celle-ci est très fière de la position de son mari mais elle souffre de l'aspect rustre du village ( cf : A.Ernaux )
Abraracourcix : Tu es pourtant fière d'être la femme du chef ! D'être la première dame du village ! Un peu de ma gloire rejaillit sur toi !
Bonemine : Parlons-en ! Je vais encore être encombrée de cadeaux stupides ! Ce ne sont pas tes copains qui auront l'idée de t'offrir un beau bibelot, non! Aucun sens artistique ! Des sauvages...
Bonemine incarne là l'ambition de promotion social de la génération des adultes des années 50.

– On remarque le cas du couple Agecanonix et sa femme, le ressort du couple consiste en l'association d'un petit vieux et d'une élégante jeune femme. Celle-ci aussi est jalouse de sa position sociale. A la maison c'est Agecanonix qui fait la vaisselle (p 19).

Cependant si cette émergence des femmes comme élément dramatique tranchent par rapport aux histoires des séries de la décennie précédente la femme demeure dans Astérix confinée à un rôle qui lui ait spécifique celui qui découle du rôle traditionnel de maitresse de maison. Leurs actions sont en tout point conformes à celles qu'on attribue aux femme dans les comédies classiques d'Aristophane à Molière.

Notons enfin qu'on perçois à travers l'exemple de la représentation en vue aérienne de la bataille du village (page 42) l'influence du dessinateur Calvo ( « La bête est morte » t 1 p ) dont le dessinateur Uderzo à ses débuts fut le disciple.