Le secret - Le secret de la Licorne
Le trésor du Rajah Blanc - Le trésor de Rackham Le Rouge
Plus moyen de douter avec ce diptyque : Frank Le Gall est un fan de Tintin. D'ailleurs, chaque fois que je m'imagine Théodore Poussin parler, je ne peux m'empêcher de lui coller la voix de Thierry Wermuth, voix du célèbre reporter dans la version animée la plus populaire.


Mais revenons-en à ce cinquième tome des aventures de Théodore Poussin. C'est du bon. Mais pas aussi bon que le précédent volet. Il s'en fallait de peu pourtant ! Ce qui m'a gêné c'est que Théodore ne fait pas grand chose ; à l'instar de Tintin, il est entouré de personnages hauts en couleurs tandis que le héros est un peu plus terne. Pas aussi vide que Tintin, Théodore bénéficie d'une petite personnalité et on ne le sent pas aussi infaillible que le bonhomme de Hergé ; en plus, il bénéficie d'un belle intrigue, écrire les mémoires d'un pirate. Sauf que ces mémoires ne donnent lieu qu'à peu de bonnes scènes. Je pense que cette partie de l'histoire aurait pu être poussée plus loin (même si la conclusion sur le capitaine est excellente). J'ai également été déçu par le dénouement un peu tiré par les cheveux, aidé par un deus ex machina. Pour le reste, c'est très agréable ; à nouveau on suit les aventures de M. Novembre en parallèle, et c'est sans doute l'un des personnages les plus forts de cette série : il tue froidement, sans scrupule, il semble immortel, il obéit aux ordres d'on ne sait qui ? Le pirate Town est bien évidemment un autre centre d'intérêt étant donné son caractère ainsi que son objectif contradictoire. Et puis, Le Gall parvient toujours à prendre son temps pour raconter son histoire : on ne se sent jamais pressé, les scènes viennent, durent un petit temps avant qu'on ne puisse passer à la suite des aventures : je n'aime pas quand tout va trop vite, quand on ne profite pas assez d'une situation, quand on en extrait pas assez de jus.


Graphiquement, c'est à nouveau magnifique ! Le Gall maîtrise les compositions, peu importe le format de ses vignettes. Son trait fin est très agréable et n'est jamais illisible malgré des décors bien fournis (disons que le nécessaire est là, pas plus). Le dessinateur joue toujours aussi bien des masses de noir. L'aspect expérimental et le côté challenge graphique des précédents albums sont mis de côté au profit d'une sobriété adéquate (même si Le Gall a la manière de ne jamais en faire des caisses, même quand il se la joue virtuose). Les couleurs, une fois de plus, renforcent le dessin, sont minimalistes, le coloriste privilégiant quelques tons et évitant ainsi la palette multicolore à la Pixar. Le découpage de l'action est également assez impressionnant. Je pense par exemple à la scène de meurtre du professeur par M. Novembre, de quoi filer des boutons à Alan Moore tant Le Gall parvient à un résultat similaire (si pas mieux) en donnant l'impression de moins se forcer. Et puis enfin il y a toute l'ambiance, l'aventure, les bateaux, l'océan, les autochtones, ... tout cela fait rêver, bien entendu.


Un élément que je n'ai pas encore abordé et qui vaut pour les autres albums lus (et probablement à lire), c'est la violence présente dans cette série. Même si cette série est sortie dans la collection Repérage de Dupuis, il me semble que les albums, comme pour la série "Soda", sont sortis dans le Spirou Magazine. Et cela m'étonne car il y a beaucoup de morts dans ces albums, des morts dramatiques (têtes coupées, coups de feu sur des personnages importants). En même temps, le traitement des personnages appelle clairement à un lectorat mature (Novembre fait partie des gentils alors qu'il a tout le profil d'nu méchant) ; ce n'est pas bêtement anti-manichéen, c'est-à-dire qu'il ne s'agit pas juste de montrer que les gentils peuvent être méchants... non c'est juste qu'ici, les personnages ont chacun leur objectif à atteindre et qu'ils y parviendront coûte que coûte. Pour moi, c'est là le récit non manichéen tel que je l'apprécie, c'est-à-dire où la question du bien et du mal (quel camp choisir) n'entre pas réellement en jeu. Cela ne veut pas dire que je dénigre les récits manichéens, bien au contraire, je les trouve utiles et souvent mieux structurés que les films anti-manichéens.


Bref, ce cinquième tome est très bon mais j'avoue que l'histoire m'a un peu déçu sur la fin ainsi que dans l'exploitation du héros qui n'est pas assez conflictuelle pour moi (c'était déjà le cas dans le quatrième, mais ça m'a moins dérangé grâce au capitaine qui est passionnant à écouter et grâce au contraste avec tout ce que Novembre faisait de son côté). Pour tout vous dire, j'ai longuement hésité entre 7 et 8/10 à cause de cette fin... mais bon, il y a tellement de qualités que je préfère me montrer généreux.

Fatpooper
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le 22 août 2016

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