No Guns Life
6.9
No Guns Life

Manga de Tasuku Karasuma (2014)

Des guns, des muscles et de la testostérone... Mais pas que ça.

No Guns Life, un titre qui transpire l’action et la testostérone… Mais pas que. Retour sur ce seinen musclé avec comme un petit gout de polar noir.


No Guns Life est un seinen manga de Tasuku Karasuma prépublié depuis 2014 dans l’Ultra Jump des éditions Shueisha. Ici il est dispo chez Kana. Et dès la couverture du premier tome, on sent qu’on va mettre les pieds dans un truc qui va envoyer du lourd niveau action et baston.


A première vue, y’a tout ce que j’aime dans ce genre de titre : bastons musclées, action, intrigue bien tordue et en plus ce titre à comme un p’ti gout de polar noir et de film d’action des années 90. Et c’est pas dit péjorativement ! Car moi j’aime ce genre de titre qui me sert ce qu’il m’a vendu, me fait passer un bon moment et plus si affinités… Et le plus si affinités, on y reviendra.


On fait donc connaissance avec Jûzô (le gars à tête de flingue de la couverture), via un monologue en voix off comme dans le polars. Le gars est charismatique, pragmatique, fume abusivement, lâche des répliques qui tuent et comme tout bon héros de ce genre, s’en prend plein la gueule^^ Et comme toujours avec ce genre de héros (ou de anti-héros), malgré des dehors bourru, au fond c’est un bon gars qui se retrouve un peu toujours au mauvais endroit, au mauvais moment. Et évidemment, le gars va rapidement se retrouver dans un merdier sans nom, avec un gamin ayant un drôle de pouvoir sur les bras et des organisations pas très sympas qui veulent le récuperer sur le dos…


Résumé comme ça, on se dit que c’est du vu et revu…


Peut-être. Surement… Mais ce genre de trames et de personnages fonctionnent nickel depuis des années et ce quel que soit le support ; Manga, Comics, Films, BD, Séries TV etc. Le tout est de voir comment l’auteur joue avec ces ingrédients -certes ultra classique- et quel plat il va nous livrer. Et ici on a affaire à un titre noir, violent juste comme il faut, prenant et immersif grâce au fil rouge subtilement tendu, le tout saupoudré d’une bonne dose d’action et d’humour. Un cocktail qui a maintes fois fait ses preuves…


Mais ça c’est que la surface du truc. Car dès que tout ce joyeux bordel est mis en place via de petites enquêtes, permettant d’introduire les personnages, les antagonistes, l’univers etc., on rentre rapidement dans quelque chose de plus noir, plus pointu, plus profond que de simples enquêtes et de la baston… Car l’auteur sait ménager son intrigue ! Si les enquêtes du début paraissent anecdotiques, on comprends par la suite, que tout est lié et qu’il faut prendre un peu recul pour saisir l’intrigue dans son ensemble…


Et au milieu de tout ça, un questionnement : les Extends comme Juzo sont-ils vraiment encore humains ? Ou au final sont-ils devenus de simples machines ou carrément des outils ? Car on comprend vite que si des extensions sont installées pour palier un handicap, elles sont surtout installées pour améliorer le rendement et effectuer certaines taches de manière plus efficaces. La guerre dans le cas de notre héros à tête de flingue mais la technologie des extends s’est étendue à tous les aspects de la société.


Car dans l’univers d’après guerre, sombre, dur et limite anxiogène, dépeint dans No Guns Life, beaucoup n’ont pas d’autres choix que de se faire installer des extensions pour continuer a bosser et survivre. Pour ne pas rester sur le coté et être en marge de la société. Une vision crue de la rentabilité à tout prix, qui n’est pas sans rappeler ce qu’on voit parfois aujourd’hui. Sauf que ce n’est plus des machines qui remplace les Hommes, ce sont les Hommes qui deviennent des machines…


Mais si au final et malgré les contraintes sociétales, c’était les choix que l’on fait qui nous définissent réellement et non notre condition ?


En grattant un peu, on se rend compte qu’en plus de ces questions, c’est tout le microcosme de la société qui est représenté (bien que réduit a sa plus simple expression), via les personnages mais surtout les organisations mises en place et qui s’affrontent dans notre histoire, et je laisse ici, a chacun le soin de les lier avec notre réalité :p :



  • Berühren l’entreprise toute puissante qui régit tout -officiellement ET officieusement- et qui considère que les gens ne sont que des « rouages » qui doivent servir l’entreprise.

  • Spitzbergen, l’organisation terroriste Anti-Extends qui s’oppose à Berühren de manière officielle, mais qui officieusement n’en pense pas moins…

  • Le Kyùseikai, sorte de Mafia qui maintient un pseudo équilibre au milieu de tout ça en faisant « tampon » mais sans oublier de se remplir les poches au passage.

  • L’EMS, qui est en gros la police. Mais muselé par l’état via notamment Berühren, leur champ d’action est plus que limité et ça pue un peu la corruption à tout les niveaux…


Et au milieu de tout ça Juzo et sa clique, qui en plus de démêler tout ce merdier doivent trouver et se faire leurs places au milieu de tout ça.


L’auteur monte son intrigue de manière subtile, en utilisant pourtant un ressort scénaristique usé jusqu’à la corde; La perte de mémoire. En effet, Jûzô n’a aucuns souvenirs de sa vie avant la guerre et d’avant qu’il ait une tête de flingue. Pourquoi? Comment? Tout ça, on va le découvrir en même temps que lui, et la situation actuelle pourraient bien être les conséquences de ce qui s’est passé durant cette fameuse guerre, où notre tête de flingue à joué bien malgré lui, un rôle majeur…


Et c’est là qu’on se rend compte qu’avoir utilisé des schémas ultra-classiques est payant, tant l’intrigue est dense, complexe et extrêmement bien ficelé. La facilité apparente permet au final de se concentrer pleinement sur l’intrigue et les enjeux pour donner un ensemble équilibré et cohérent. Pareil pour les personnages, qui sont tous très typés, reconnaissables et dotés de fortes personnalités.


Évidemment tout ça, on ne le voit pas dès le début, c’est tomes après tomes que tout se monte et finit par s’assembler pour donner un récit dense et complexe, bien plus profond qu’il n’y parait.. Où on peut aussi parfaitement se contenter du récit musclé et kiffer les combats et voir tête de flingue se fritter avec d’autres Extends, regler les soucis a grand coups de lattes dans la gueule, sans jamais chercher a approfondir le truc. Ce serait dommage et ce serait passer a coté de quelque chose, mais ça marche aussi. Un récit a 2 niveaux de lecture en quelque sorte…


Ce qu’on remarque de suite par contre c’est le dessin ! Nerveux et efficace, il colle parfaitement à l’univers mis en place avec son petit coté « sale ». Le tout servi par une narration et un découpage dynamique et immersif, saupoudré de passages bien musclés… Et si vous pensiez qu’une tête de flingue ne pouvait pas être expressive, vous vous gourez, l’auteur arrive parfaitement à rendre son héros super expressif… Pour découvrir ce tour de force, lisez (au moins) le 1er chapitre, vous ne serez pas déçu :p


Niveau édition, Kana nous livre du très bon comme souvent avec meme une ou deux page couleurs en ouverture de tomes. De petite histoires (antérieure a notre histoire) mettant en scène Juzo prennent souvent place en fin de tome… Généralement humoristiques, ces petites histoires montrent encore la diversité et la richesse de ce titre.


En résumé, un très bon seinen, avec des persos badass et charismatiques, de l’action bien musclée en veux tu, en voilà, la touche d’humour qui va bien et pour ne rien gâcher, une bonne intrigue tordue bien comme il faut et bien plus profonde qu’il n’y parait… Lisez-le!


Et pour ceux qui le veulent , il existe une adaptation anime par le Studio Madhouse qui est franchement pas mal, même si moins dense que le manga. Et il est dispo sur Wakanim…


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Créée

le 23 févr. 2017

Critique lue 611 fois

Lupin_the_third

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