Quand j'étais relativement jeune, j'étais extrêmement fan du dessin-animée "Tortues Ninja". Voulant nous faire plaisir, à mon frère et moi, ma mère eut la généreuse idée de nous acheter des bandes dessinées trouvées dans le rachitique rayon librairie d'un supermarché. Malheureusement, peu au fait des habitudes éditoriales du comic-book, elle ne pouvait savoir que, au contraire des séries comme Tintin, un épisode peut difficilement se lire indépendamment des autres. Résultat, je m'étais retrouvé avec, entre les pattes, les tomes 4 et 5, impinables, avec des allers-retours dans une dimension X WTF et une tête de vache volante. Oui. Du coup, "Nouveau Départ", c'est un peu la revanche du lecteur déçu d'avoir pris un train en marche et qui va enfin pouvoir quitter la gare sereinement pour redécouvrir une mythologie qu'il aime bien. Donc grimpez pépère, c'est le début, on va vous aider.

Déjà, les origines, et bim, qu'on te les revisite. Faut bien avouer qu'à la base, des tortues plus un rat qui tombent - comme de par hasard - dans une grande bouillabaisse de mutagène au gloubi-boulga qui vous transforme tout ça en créature humanoïde, ça n'était pas très sérieux. Même le dessin-animé, qui se limitait à changer l'histoire d'Hamato Yoshi, restait quand même dans la catégorie du produit dangereux à la fraîche. Donc non, ce n'est plus une petite tache qui se promenait par là comme un tas de foin en plein moyen-âge d'Assassin's Creed. Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais c'est un poil plus sérieux et même l'histoire de Splinter - indépendamment de celles des tortues - a été revue. Pour l'instant, point d'Hamato Yoshi dans les environs, mais cela dit, point de Shredder non plus. Tout au mieux parle-t-on de Krang, mais là aussi, mystère et boule de gomme sur le p'tit gars. Ce premier tome se focalise essentiellement sur Raphael.
Ah, Raphael. Mon p'tit Raph. Mon p'tit préféré, pour ne rien cacher. Le bougre a été séparé des siens très tôt, ne sachant ni son nom, ni ce qu'il fait, humanoïde et perdu. Un homeless à carapace, qui ne tranche guère avec la tradition : c'est vêtu d'un trench-coat qu'il parcourt les rues de la grande pomme, sans éveiller aucune émeute. De toute façon, moi, je m'en fous, j'aime Raph, alors qu'on le voit un peu plus que les autres, j'm'en fous. Tout ça pour expliquer son côté frondeur, lone cowboy qui a servi tant de fois de ressors dramatique aux Tortues, histoire d'insuffler un peu de sérieux aux histoires. Ben là, en fait, pas la peine, c'est revu et corrigé - et ça ne s'adresse plus vraiment au même public. Fini les grosses blagues à chaque instant, fini les bastons contre un parodique Clan des Foots, ici, ça bastonne dans la rue contre un gang bien local, une petite criminalité bien plus ancrée dans le présent. Bien moins extravagante que l'invasion krang ou l'assaut ninja. Avec un Splinter bien pessimiste en voix-off, autant dire que le récit ne fait pas vraiment dans l'humour et rompt même énormément avec l'image habituelle.
L'image, d'ailleurs, c'est ce trait nerveux, un poil anguleux, qui force bien les noirs et présente des tortues toutes en muscles et en vitalité, toutes en dents serrées et en poings clos. A part Old Hob, le chat mutant qui sert de chef de gang et semble tout droit licencié d'un casting d'aristochat, tout le monde subit une cure de réalisme et de sordide, avec ce méchant trait qui attise l'action et favorise la noirceur du récit. La colo nous rappelle que dans tout bon récit noir, il fait nuit en permanence, au point que, dépouillés de leurs pupilles, les tortues en paraissent presque être des Batmans souterrains dans une Gotham d'égouts. Mais moi, cette parenté ne me dérange pas des masses : j'adore l'homme chauve-souris, alors voir les tortues humaines y repiquer un peu de son ambiance poisseuse, ça me choque pas. Au contraire, ça apporte quelque chose à la mythologie.

Au final, un premier tome qui ressemble à un trait d'union, alliant les origines comics des tortues, saupoudrant le tout des multiples évolutions pour concilier le tout dans un nouveau récit qui, à mon sens, pourra autant plaire aux vieux lecteurs ayant débuté l'histoire avant le carton télévisé qu'aux novices dont - finalement - je fais partie, qui vont découvrir une ambiance inédite pour des personnages qu'ils connaissaient plutôt dans l'humour. Et je trouve ça plutôt rassurant, parce qu'entre ce comics et la nouvelle série télé, les Tortues Ninja connaissent un bon retour dans le monde moderne. Espérons que tout le monde oublie vite le film.
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le 29 oct. 2014

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