Entre récits intimiste (Le journal de mon père, Quartier Lointain…) et récits d’aventures épiques (Le sommet des dieux, L’homme de la toundra...), Jirô Taniguchi n’a jamais vraiment choisi. Tout juste s’est-il accordé une incartade avec la saga Au temps de Botchan, - une épopée où il raconte la société japonaise de l’ère Meiji - ou encore avec Le gourmet solitaire.
Ici il revient vers ses thèmes favoris que sont la famille, l’amour, la mort et la transmission, dans une histoire mélodramatique et bouleversante où il met en scène un jeune motard de 17 ans, Takuya Onodera qui, après avoir été renversé par une fourgonnette, se retrouve dans le coma. Quelques jours après l’accident, le conducteur de la camionnette, un père de famille de 42 ans, Kazuhiro Kubota, décède alors que le jeune homme, lui, s’en sort quasi indemne. Mais voilà, on ne sait par quel miracle, Takuya se réveille avec la mémoire du défunt Kazuhiro Kubota. Va alors se jouer une sorte de lutte entre deux personnes, entre deux âmes dans un même corps...
Dans une trame où le fantastique occupe une grande place, Taniguchi réussit parfaitement, comme toujours, à dépeindre les sentiments de ses personnages avec une grande finesse, à aller au plus profond de l’intime afin de faire ressortir les émotions et les faire passer dans ses dessins et ses dialogues. Ici, au cœur du sujet, l'auteur évoque la difficulté d'appréhender le deuil et la renaissance de l'âme.
Si le scénario ne va peut-être pas aussi loin que celui de Quartier Lointain auquel on pense par moment, il n'en reste pas moins fort, notamment quand qu'il s'agit d’aborder les relations familiales et les tourments intérieurs. Taniguchi vise toujours aussi juste, va directement à l'essentiel, parle au cœur avec beaucoup de douceur et une grande compassion pour ses personnages.
Un très grand moment de plaisir et d’émotion pour un auteur culte.