Vincent Van Gogh est envoyé dans les tranchées de la Grande Guerre, à la demande du Président du Conseil, pour peindre « l’esprit de la guerre » afin que le gouvernement puisse comprendre, depuis les ors de la République, pourquoi les désertions se multiplient.

Manu Larcenet nous offre un Vincent Van Gogh magnifique.
Renfermé et obsédé par son désir de « faire exploser (s)on désarroi à la face du monde », l’artiste devient caporal, réintégré aux troupes sous la surveillance d’un timide général de salon. Le vieux peintre caractériel mène son général à la dure. L’idée est excellente, et son traitement continu tient le duo parfaitement tout le long de l’album.
Alors Manu Larcenet explose l’exercice de style avec virtuosité. L’immersion dans les tranchées, rythmée de visions morbides certes, mais aussi d’un humour vif, est pleine. Documentée, elle est empreinte d’authenticité, et dans les visions du peintre, une poésie macabre en émane. Les peintures fictives du Van Gogh sont splendides, témoins évidents du talent de dessinateur de Manu Larcenet. Quand le scénario, laissant la part belle aux absurdités de la Grande Guerre et concluant sur l’irresponsabilité de l’irréel politique, atteste de son don pour l’écriture et le montage narratif.

« La guerre est décidément un art trop complexe pour le laisser aux artistes », dit le Président du Conseil dans les dernières cases. Avec la complicité de son Vincent Van Gogh imaginaire, Manu Larcenet prouve que, bien au contraire, il appartient aux artistes de peindre les horreurs de la guerre, d’affronter ces situations à la fois morbides, lugubres, et cocasses, absurdes et impromptues, que les dirigeants ne regardent qu’avec des œillères.
La Ligne de Front est un exercice de style abouti, impressionnant, qui étale là l’immense et incomparable talent de Manu Larcenet.

Matthieu Marsan-Bacheré

Créée

le 15 mars 2015

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