Producteur de la très bonne série Top Boy, Yann Demange passe derrière la caméra pour aborder une époque marquante dans le paysage cinématographique irlandais : le conflit opposant catholique et protestant dans le Nord du pays.
À l'inverse de ses illustres modèles ( Hunger, Bloody Sunday,...), l'auteur propose de tirer de cette Histoire un film d'action. Un choix audacieux, reste à voir si le réalisateur réussis à faire cohabiter le cahier des charges propre au genre avec l'aspect dramatique de ces événements.
Nous plaçant aux côtés de la jeune recrue Gary, nous découvrons sa vie civile et militaire. Le contexte historique nous est ensuite présenté via le briefing de la nouvelle opération de l'unité du jeune homme.
Une fois ces bases posées, l'auteur propulse cette troupe en territoire hostile. Le mépris des autochtones envers l'autorité britannique s'immiscera lentement via des comportements de plus en plus violents, aboutissant à un assassinat.
Cet instant arrive très tôt dans le récit et sonne le coup de départ d'une chasse à l'homme effrénée où les poursuivants sont nombreux et leur motivation variée.
On retrouve dans cet aspect, un point intéressant du récit. En effet, on aurait pu craindre un certain manichéisme où l'armée britannique est le preux chevalier venu sauver l'Irlande du Nord de l'odieux IRA. La réalité est tout autre et aucun partie n'est plus juste que l'autre. Des collusions existent entre les deux camps et des voix dissidentes se font entendre de chaque côté. C'est sur ce fait que l'auteur décide de dérouler son intrigue et c'est au fil du temps que les intérêts à retrouver Gary sont dévoilés.
Cet axe scénaristique permet d'offrir une galerie de personnages solides à la personnalité bien définis. On s'attache ainsi à ces hommes et au sort tragique qui leur sont réservés.
Cette empathie ne serait possible sans la présence d'artistes talentueux. À ce niveau, l'auteur fait des choix judicieux en s'entourant d'acteurs souvent habitués aux seconds rôles tels que Sean Harris (Southcliffe) ou Paul Anderson (Peaky Blinders). Jack O'Connel incarne parfaitement ce jeune britannique largué en territoire ennemi ne sachant plus à qui se fier.
Un autre élément permettant d'immerger le spectateur est l'utilisation de la caméra à l'épaule afin d'avoir la sensation de se tenir aux côtés des personnages. Utilisé souvent à mauvais escient dans certaines œuvres, son recours prend ici tous son sens. la shakycam. Utilisé souvent à mauvais escient dans certaines œuvres, son recours prend ici tous son sens. À l'instar de la scène d'ouverture de Narc, nous perdons certes en lisibilité de l'action, mais en faveur d'une intensité émotionnelle décuplé, car entièrement impliqué dans ces moments.
Yann Demange réussit donc à offrir une œuvre dramatique tout en répondant au cahier des charges d'un film d'action. '71 ne brille peut-être pas par l'originalité de son sujet ni de par sa trame narrative, mais l'homme se montre très habile avec une caméra et offre des séquences riches en émotions.
Une approche intéressante du sujet qui permettra surement d'interpeller une frange du public, allergique aux films dramatico-historiques, de se pencher sur cette période de l'Histoire.