Ethan Hunt est de retour. Un nouveau film sous le label Mission Impossible, c'est un peu comme un nouveau James Bond. Nouvel équipe, nouvelles bombes (au sens propre comme au figuré), nouveaux gadgets, et surtout, nouveau réalisateur. Après Brian de Palma, John Woo et J.J. Abrams, c'est à Brad Bird qu'il incombe de malmener Tom Cruise pour une mission toujours plus impossible. Une mission à double tranchant pour le réalisateur des Indestructibles et du Géant de Fer : prendre la relève sur une licence appréciée du public et réaliser là son premier film "live". Mission acceptée. Mais si Ethan peut se féliciter d'un "Mission Accomplie!", Brad, pas vraiment...

C'est derrière les barreaux d'une prison russe que l'on retrouve Tom Cuise dans la peau du célèbre agent IMF. Un bon prétexte à introduire les membres qui suivront Hunt dans ses tribulations, mais aussi, à lancer l'action. Impossible de s'en cacher : Brad Bird est ici pour en mettre plein les mirettes. L'intrigue en est d'ailleurs totalement écrasée. Script calqué sur les derniers épisodes de la saga Call of Duty Modern Warfare (les rôles s'inverseraient-ils ?), il se résume comme suit : un groupuscule terroriste cherche à lancer une guerre nucléaire entre USA-Russie, profitant des relations tendues qui unies les deux nations. Facile.

Se contentant de ce scénario sans surprise, Brad Bird tente alors un tour de force sur sa réalisation. Manqué. Armé de sa caméra Imax, qui lui permet de superbes panoramas sur les nombreux décors que parcourt son équipe de désavoués, le réalisateur galère. Le problème vient de son atout majeur : c'est un expert de l'animation. Résultat, si les idées sont bien là, la technique peine à suivre. Le bonhomme ne manquait pas de "cojones" en choisissant la plus grosse caméra... Encore faut-il savoir qu'en faire. Là, elle l'handicape : ne pouvant se défaire des lois de la physique, il patauge.

Et c'est bien dommage, car du spectaculaire, il en donne à voir ce Mission Impossible. Les prises de vues de la Burj Khalifa sont vertigineuses, la course-poursuite en pleine tempête de sable vaut son pesant, et ce retourné de voiture à 180°, entre aperçu dans la bande-annonce, est vraiment... renversant. Mais l'euphorie est passagère. Entre longueurs, surenchères, et effets visuels franchement discutables (appelez moi le responsable !!), toutes les bonnes idées sont plombées, et le soufflé retombe.

Même les combats au corps à corps souffrent de disparité. Un coup on s'emballe, le coup d'après se grippe. Jason Bourne transparait dans les gestes précis, rapides et instinctifs de Hunt, tandis qu'un règlement de comptes entre filles, moins naturel, camoufle difficilement une mise en scène trop chorégraphiée. A vouloir calibrer son film au millimètre, le cinéaste manque de cette spontanéité qu'il pouvait laisser échapper à loisir dans l'animation.

Malgré tout, Mission Impossible est loin d'être un mauvais film. Simplement, il sonne comme le résultat d'un apprentissage. Bird a bien étudié son sujet. Il n'oublie jamais de faire des références aux précédents épisodes, et utilise ces bases avec efficacité. Le personnage de Hunt est rôdé. Agent intelligent, véritable caméléon s'adaptant à toute situation, capable de lire sur les lèvres, le sang froid, et un goût prononcé pour la haute voltige et les déguisements. Mais surtout, le film revient aux fondements de la série, ce que J.J. avait déjà commencé : une équipe soudée. Benji, alias Simon Pegg, désormais habilité à être sur le terrain, est la touche humour du film. Paula Patton l'atout charme. Et Jeremy Renner, au top, assure la relève.

Même Tom Cruise commence doucement à s'effacer (doucement hein, c'est toujours un show Tom Cruise tout de même), laissant le champ libre à ses coéquipiers pour la suite. Seuls points noirs au tableau, Josh Holloway, qu'on aurait aimé voir plus longtemps, mais surtout Michael Nyqvist, une crème à côté de Philip Seymour Hoffman. Autre acteur du film : Apple. La marque à la pomme croquée s'invite partout. MacBook Air, iPad, iPhone, toute la gamme y passe... décrédibilisant souvent le matériel de l'IMF.

Aidé de ce casting 4 étoiles, Bird s'échine à trouver le bon rythme, mais n'y parvient qu'à moitié, jusqu'à provoquer des moments d'ennui. On passera sur les aberrations, les coups de théâtre prévisibles et une intrigue secondaire inutile qui viennent parasiter un scénario déjà fouillis. Un scénario qui s'étale tout de même sur deux heures, et se clôture sur une scène improbable. Un final mièvre, qui fait écho à celui de LOST, les violons de Giacchino en prime.

La comparaison était inévitable, le poids des ainés étant lourd. Et force est de constater que le passage de flambeau ne s'est pas fait sans encombre. Brad Bird veut bien faire. Mais ses yeux brillent à l'idée de signer un métrage 100% action. J.J. Abrams avait voulu son épisode plus sombre à l'instar du premier, Bird, lui, préfère rejoindre John Woo. Une mise en scène qui flirte parfois avec le grandiose mais souvent avec le banal. Inégal, Mission Impossible : Protocole fantôme est un divertissement fun mais bancal. Le contrat est à moitié rempli, mais le spectacle est quand même bien là. Un film à voir en salle, équipée Imax si vous avez l'occasion.
Cinexclu
6
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le 24 janv. 2012

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