A l'image du piano désaccordé sur lequel Anders essaiera, avant de renoncer, de jouer un (sublime) morceau de musique, ce dernier est en désaccord, comme toujours à côté. De par cette lucidité qu'il semble avoir sur le monde où simplement cette conscience que tout bientôt, finira, ou s'oubliera et qui l'empêche de vivre... Il recherche alors, la vérité, brute, simple. Qu'il dévoile sur des répondeurs, à ses amis sur lesquels, toujours, il porte un jugement qu'il soit attentionné ou définitif, ou encore qu'il ne puisse s'empêcher de tout dire, avec brio, lors d'un entretien d'embauche où il vente la supériorité de la revue concurrente à celle pour laquelle il postule. C'est qu'il ne peut supporter la frivolité, alors que lui rétorque son interlocuteur "les gens aiment aussi lire des choses plus légères". Oui, la légèreté et l'insouciance, celle qui règne l'été, qui se termine lui aussi, dès le titre: 31 août. Dès lors, tout, déjà, est terminé ou se termine. Même dans les premières images du film, plus enthousiastes, ce ne sont que des souvenirs et surtout, la déconstruction, la disparition, qui s'écrivent.

Ainsi, tout le film est conçu comme un cycle, où l'être, la nature, le monde, tendent vers leur fin. A ce propos, Anders n'échappe pas, il n'y a qu'au monde qu'il n'adhère pas. Aux projets, aux rires, à la fête. Et ce, à l'image d'une très belle scène du film, où, à la terrasse d'un café, Anders s’enivre des conversations, dont une liste d'envie, pleine de promesses dont celle de se baigner nu, ce qu'il ne fera finalement pas. Tout tourne autour de lui et il est au milieu, incapable, déjà mort en quelque sorte. La scène où il est au centre d'un cercle (qui fait écho) et qu'un vélo lui tourne autour en est une belle illustration... Tout respire alors la mort, et les conversations d'Anders sur des vies qui essaient d'être parfaites mais où il manque toujours quelque chose, semblent alors vouées à renforcer le désir qui habite Anders depuis le lac, mourir avec l'été...

Voilà, pour les qualités formelles, visuelles et celles du jeu des acteurs du film. Autrement, ce film a peiné, voire échoué, à me toucher. Je m'y suis reprise à deux fois avant de le terminer. C'est un film incroyablement gris. Il met mal à l'aise et ça c'est sûrement une réussite. Or, le malaise joue d'une trajectoire en parfait accord depuis le début. Et là est, certainement,ce qui m'a gêné. La trajectoire est tracée comme une boucle: de la mort à la mort. J'aime aussi être surprise par les films et ce ne fût pas le cas ici. La grisaille a persisté, la journée a défilé et le soleil a peiné à pointé le bout de son nez. Il est toujours dommage, qu'on ne laisse jamais le choix à ces personnages de dévier de leurs routes... Bien que ça soit la réalité, que la fin soit comme cela, que filmer la fin d'un personnage soit intéressante; j'ai trouvé le film assez bavard et il n'en reste finalement que le plus réussit à mon goût: quelques images fulgurantes de l'inoubliable visage d'Anders...
eloch

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