Il en va des narrations comme de nos propres amitiés.
Nulle personne saine d'esprit, demandera jamais d'avoir des amis de qualité, ou spectaculaire.
Ce qu'on demande, c'est que les conditions soient réunies pour pouvoir placer ce petit organe si fragile et pourtant si voué à être partagé, qu'est la confiance.
Et même si la réalité de nos existences nous poussent sans cesse à nous complaire dans un cynisme misanthropique, on a besoin tout à chacun de donner de la confiance pour faire tourner ce monde.
Sinon quoi Darty n'arriverait plus à signer de contrats et finirait en banqueroute.
Et pourtant, me voila en 2019, à redonner confiance à Rian Johnson.
Rian un amour de jeunesse.
Je l'avais tant aimé avec Brick.
Je l'avais trouvé un peu maladroit mais délicieusement amusant avec The brothers Bloom.
Je l'avais trouvé époustouflant et altruiste avec Looper.
Avant de le trouver menteur et trompeur avec Les Derniers Jedis.
Le coeur brisé, je m'en alla noyer ma peine dans un pot d'Haagen Dazs dans mon canapé en pleurant toutes les larmes de mon corps.
Pourtant la vie offre son petit baluchon de miracles, et au moment ou je m'y attendais le moins, voici que le cynisme venait de se faire vaincre.
KO à mains nues, éclaté au sol, inanimé.
Knives Out, que je prefererais nommer dans sa VO avant d'être pris de violentes visions à base de Alec Baldwin tentant de boxer un ours, c'est le triomphe de la confiance.
Ce triomphe n'a de mérite qu'on ne le voit pas arriver; jamais dans son début ses mécanismes de mise en oeuvre sont transparents.
Plaçant le curseur quelque part entre le policier serieux et la parodie tonitruante, le film arrive à jouer habilement entre les deux tableaux.
Ce qui semble au début être une série de gags bien trouvés, finit par se révéler comme une série de gages, sur l'authenticité de la narration.
C'est le coup de la main du magicien: la gauche vient nous distraire, pendant que la droite vient nous cueillir.
Ce que fait précisément Johnson surprennement tôt dans le film.
Et alors qu'avec bien d'autres réalisateurs, le virage prit par le film aurait pu nous faire sortir de la salle, Johnson est assez talentueux pour qu'on prenne ce pari du quitte ou double.
Heuresement, Knives Out nous en recompensera largement avant que la lumière se rallume.
Déjà parce qu'il est d'une plastique visuelle discrète mais agréable.
Que son casting choral est au diapason, sans aucune fausse note.
Mais surtout, et la est au dela de son intrigue, peut être la véritable surprise de ce film: Knives Out a un discours politique.
Un discours qu'on pense voir dans son début mais qui ne prend véritablement forme que dans son troisième acte.
Et si je repprochais volontiers à Rian d'avoir inséré ses convictions sociétales à la truelle dans son Star Wars, ici le récit est parfaitement imbriqué de façon organique dans l'intrigue.
Ce qui est interessant, c'est que dans ce que raconte Knives Out, lui même pourrait tomber très facilement dans le piège du cynisme.
Dans ce monde ou la gauche finalement ne vaut pas mieux que la droite, ou les grands mots ne font rien contre l'entre soi et la reproduction des élites.
Cependant, et c'est la, la véritable force du film, Knives Out use de notre confiance pour se permettre un happy end.
Un, ou le film tire sa révérence, parfaitement conscient du constat social actuel.
Qui laisse un message très simple.
N'ayez pas peur de l'autre.
Mieux, laissez lui votre position de narrateur et écoutez le.
Bah ca franchement, on en avait bien besoin.
Merci Rian.