Si les acteurs et les révélations du récit en font tout le sel, c'est froid et l'émotion reste à dis

Le long-métrage de Bart Freundlich est le remake éponyme d’un film danois hautement plébiscité à l‘international. La danoise Susanne Bier, la réalisatrice de l’un des meilleurs films Netflix à ce jour (« Birdbox »), avait même conquis l’Académie des Oscars puisque le film avait été nominé dans la catégorie du meilleur film étranger. Visiblement, pour savourer un minimum cette nouvelle version, il vaut mieux ne pas avoir vu l’original dont la qualité serait supérieure, comme souvent. A noter que Freundlich a effectué un changement de taille en changeant le genre des deux rôles principaux qui deviennent donc deux femmes. Cela ne bouscule pas les thématiques abordées par ailleurs foisonnantes (ce que l’on laisse avant de mourir, le décalage entre l’opulence de certains occidentaux et la misère des pays du tiers-monde, la maternité et la paternité contrariée, …) mais donne une sensibilité différente et logiquement plus féminine -donc dans l’air du temps - à cette nouvelle version. Le cinéaste américain donne l’un des rôles titres à sa femme et ce qui pourrait passer pour du favoritisme est occulté par la performance incandescente et encore une fois royale de Julianne Moore qui survole une distribution pourtant solide. Entre femme de poigne chic et hautaine et mère aimante dont la vie s’écroule, elle s’empare du rôle avec la majesté et la classe qu’on lui connait, sans fard et avec passion. Michelle Williams est peut-être légèrement moins à l’aise mais elle ne démérite pas quand Billy Crudup se pare d’un rôle jumeau à celui de « Bernadette a disparu », avec moins de panache néanmoins, de manière plus effacée mais toujours juste.


Dans l’ensemble, « After the wedding » est plutôt plaisant à regarder, notamment grâce à ses interprètes. On peut lui reprocher cependant un démarrage un peu mou et soporifique où l’on se demande ou tout cela va nous amener. Une fois la première demi-heure passée, tout se fait plus clair à nos yeux et des enjeux dramatiques, voire tragiques, prennent place avec force. Deux révélations que l’on pourrait qualifier de rebondissements viennent lancer une tragédie grecque à quatre visages qui tient bien le fil de tout le récit jusqu’à la fin et poses des questionnements moraux forts. Le fossé à tous niveaux entre les bidonvilles d’Inde où évolue l’héroïne et le manoir du couple formé par Moore et Crudup n’est pas toujours subtil dans sa démonstration mais s’avère pertinent. Le plus gros défaut de cet « After the wedding » est sans conteste son côté complètement austère émotionnellement. Sur la forme, cela donne de beaux plans (le travelling inaugural est impeccable) avec une impression de film sur papier glacé mais sur le fond, on reste toujours à distance niveau émotion(s). Vu la tristesse du sujet et de certaines séquences, on se surprend de ne pas être plus touché. L’émotion n’affleure que très rarement en dépit des efforts de la distribution. On reste comme étrangers à la peine, la douleur et les questionnements de ces personnages. Dommage et difficile à expliquer car le long-métrage évite les clichées mais semble aussi trop vouloir éviter de sombrer dans le pathos au point d’en devenir glacial.


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JorikVesperhaven
6

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le 5 sept. 2019

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Rémy Fiers

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