Akira
7.9
Akira

Long-métrage d'animation de Katsuhiro Ôtomo (1988)

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Nous sommes en mai 1991, je n'ai même pas encore sept ans et je m'apprête à vivre une des plus fracassantes expériences cinématographiques de mon existence. Découvert grâce à l'émission "Babylone" diffusée sur la défunte 5, le dénommé "Akira" ressemble aux yeux du jeune fan d'animé que je suis (merci le Club Dorothée !) au messie, au plus grand film de tous les temps, encore mieux que "Teenage Mutant Ninja Turtles", ma bible à moi. Connaissant la complexité et la violence du manga d'origine (paru à l'époque en kiosque sous forme de mensuel), mon grand-frère rechigne à m'emmener voir un tel film mais fini par céder devant mes supplications que j'imagine sans peine insoutenables. Le laxisme des ouvreuses de l'époque étant légendaire (un dessin animé interdit aux moins de douze ans, ça doit sûrement être une erreur), me voilà tout frétillant dans une salle uniquement constituée de geeks et autres rôlistes (un bonheur pour mon frère qui eu l'occasion de causer jeux de plateau), ignorant que j'assistais à un micro évènement: la projection du premier long-métrage d'animation japonais dans notre belle France. Deux heures plus tard, les yeux encore hagards, le coeur battant la chamade, le cerveau en compote, je sais que ma vie ne sera plus jamais la même et mon amour pour "Akira" à jamais crépitant.

Mis en chantier en 1987 alors que Katsuhiro Otomo est encore loin d'avoir achevé son manga, "Akira" ne conserve bien évidemment qu'une faible parcelle de son matériau d'origine, élague à tout va, n'épargne que les grandes lignes afin de reconstruire une nouvelle trame à partir des cendres du manga. Si l'on perd énormément au passage, si la caractérisation de certains personnages secondaires est catastrophique (le traitement réservé à Lady Miyako est une aberration) et si l'ensemble manquera singulièrement de clarté au spectateur n'ayant jamais lu la saga d'Otomo, il serait stupide de le comparer à son modèle de papier, tant cette adaptation se suffit à elle-même.

Bien qu'accusant plus de vingt cinq ans au compteur, "Akira" impressionne toujours autant et demeure un modèle d'animation, témoignant d'un travail colossal sur le design, les couleurs et les dessins, offrant une palanqué de séquences devenues cultes, allant d'une poursuite en moto inaugurale à un final titanesque, le tout au service d'un récit tout aussi complexe que le manga, réflexion métaphysique sur la nature destructrice de l'homme et bouleversante histoire d'amitié contrariée, illustrée avec maestria par une OST phénoménale.

Monument de l'animation ayant grandement participé à l'avènement de la japanime en France, "Akira" est un poème funeste d'une puissance émotionnelle et visuelle incomparable, un mélange des genres parfois déroutant mais fascinant pour qui se laissera prendre au jeu, une oeuvre inoubliable qui restera à jamais gravée dans mon coeur et ma mémoire qu'il me tarde de faire découvrir à ma future descendance, quand elle sera en âge de comprendre un tel spectacle, cela va sans dire.
Gand-Alf
10

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le 7 févr. 2014

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Gand-Alf

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