Un road trip au coeur de la vraie Amérique celle des laissés-pour-compte.


C'est une opportunité, on fait du porte-à-porte. On vend des magazines.
On explore l'Amérique. On fait la fête...viens avec nous.



Réalisé et écrit par la talentueuse cinéaste Andrea Arnold qui a voulu avec Américan Honey nous faire plongés dans ce qui fut autrefois une partie de sa vie, à savoir la vie itinérante avec un groupe soudé. Je dois dire que j'ai été subjugué par ce long métrage qui m'a complètement captivé et entraîné. Pendant ma séance je n'était même plus dans mon siège tant je profitais avec eux du goût dû à cette liberté incroyable. La notion du temps m'a complètement échappé jusqu'à redescendre sur terre une fois le film terminé, qui m'a paru pour le coup très très cours alors qu'il dure pourtant 2H45. Cela aurait duré 2 heures supplémentaires que j'en aurais demandé encore plus.



En bref vous l'aurez compris je trouve cette oeuvre superbe et voici pourquoi.



La réalisation est vraiment un point fort, car en plus d'être rondement mené le long métrage est complètement filmé caméra à l'épaule pour plus de réalisme et en plus sans filtre de couleur afin de laisser une superbe lumière naturelle s'infiltrer à chaque séquence. Et pour ce faire la cinéaste filme souvent en contre plongée afin de prendre des plans fixes du ciel ce qui laisse pénétrer une douce lumière chaude. De superbe plan!
La mise en scène est excellente et pour le coup innovant car elle capture l'image au plus près des personnages et réussit à saisir la moindre expression de chacun avec une subtile légèreté pleine d'élégance qui ajoute une touche de délicatesse évidente et le tout avec crédit et charme.


La caméra bouge avec ses acteurs, respire avec eux, pleure, rit, danse... elle gravite, tournoie et virevousse avec les protagonistes en laissant même par moments le focus de la caméra tel quel ce qui accentue avec raffinement et réalisme certaines séquences. Le format de l'image en 4/3 mon au début assez surpris je dois l'avouer, mais la façon sensuelle de filmer d'Andrea Arnold mon fait très vite oublier cela en appuyant sur l'aspect physique comme leurs visages et aussi les corps chauds de chacun et en produisant en nous une émotion d'immersion assez totale. Elle nous fait voyager avec magie et nous fait partager un sentiment de liberté constante.


Il est important de savoir que l'histoire n'a pas de fil conducteur ce qui pourrait en choquer plus d'un, elle se contente de suivre cette bande dans leur vie itinérante ce qui fait que pas une seule fois on ne se doute de ce qui peut arriver.
En parlant de voyager, Américan Honey nous fait découvrir des décors plus superbes et moches les uns des autres en nous plongeant réellement dans l'Amérique tel quel est, et pas comme le cinéma américain aime nous le montrer trop souvent en la glorifiant. Et quoi de mieux pour connaître l'Amérique profonde que de la parcourir par la route qui y joue un rôle majeur franchissant continuellement l'horizon. C'est ainsi qu'on plonge des quartiers riches, au quartier de l'Amérique Blanche et pauvre, celle qui n'intéresse pas la bourgeoisie et surtout pas Hollywood alors qu'elle représente pourtant plus 50% de la population.


Une vision très intéressante du film que la réalisatrice ne manque pas de nous montrer, c'est loin d'être cliché. Hors syntaxe, la cinéaste a su représenter ces oubliés en pénétrant dans leurs intimités et leurs vies délaissés, incomprises, intoxiqués, barbant, en octroyant une oreille attentive et soignée en exprimant davantage leurs corps que leurs paroles la plupart du temps silencieux.


En privilégiant comme cela les expériences intimes plutôt que le côté catastrophe, le film s'humanise et nous permet petit à petit de ressentir ce climat.


Au fur et à mesure que l'histoire avance le spectateur est plongée dans ce groupe de bosseur la journée et arsouille débauché la nuit. Une vie sans règle où chacun y joue son rôle et y fait vivre cette petite communauté, qui jouit d'une liberté alléchante .Une liberté que l'on vient à jalouser mais qui petit à petit nous montre une réalité tout autre, celle d'une bande cherchant juste à fuir un monde hostile qui nous oblige à nous fondre dans le moule ou bien à devenir un oublié. D'ailleurs le moteur du voyage qui a la base est censé être un mode de vie idéal épris de liberté totale inspiré des années hippies se transforme en cruelle démonstration de la contrainte économique du pays. Un rappel de cette terrible réalité de la vie!


Cet épilogue n'entache en rien la joie de vivre de cette belle équipe qui se contente de vivre avec ses propres règles et cherche justement à outre-passer tout cela en formant cette unité qui s'affranchit de la constitution humaine sans pour autant en ignorer ses fondements.
Les musiques prennent une place fondamentale tout du long, chacune des chansons est bien choisie et surtout introduite de bonne façon et donne vraiment du rythme. Il faut savoir qu'une bonne partie de l'histoire se passe en véhicule du coup la musique prend pas mal de places, mais aussi les chants, car les acteurs chantent pas mal également, sans tomber bien entendu dans une comédie musicale. Mais cela a au moins le mérite d'apporter beaucoup de fraîcheur et un côté pop son refrain électrisant qui s'harmonise pour le mieux avec les différents aspects et situation.


Je ne sais pas si le film existe en doublage VF (je ne pense pas) mais faut le voir en VOSTFR car son charme est entier jusqu'aux vraies paroles des acteurs qui se transcendent.


À présent passons aux acteurs et en premier lieu aux deux personnages principaux Shia Labeouf et Shane Lane qui jouent pour le coup le rôle phare vu que l'on voit toute l'histoire à travers ses yeux. À noter que c'est son premier grand rôle au cinéma. Shane Lane est juste superbe et possède une interprétation impeccable. On croirait qu'elle a fait sa toute sa vie. Quand elle joue on y croit et on ressent chacune de ses expressions, elle joue parfaitement avec son corps sans être pour autant vulgaire. Avec une telle incarnation, sa carrière est lancée et je vais la suivre avec intérêt. J'adore son personnage qui est quelqu'un de complètement terre à terre qui ne demande qu'à être retirée de ce monde merdique duquel elle n'attend plus rien, jusqu'à ce qu'elle rencontre Jake (Shia Labeouf).


Shia Labeouf, j'adore le jeu de ce comédien surtout depuis qu'il a quitté les blockbusters il n'a faits que démontrer son talent au cours du film intense et réfléchi, quoiqu'il était déjà très bon avant. Quand on connaît son caractère l'on peut se dire que ce long métrage est carrément taillé pour lui, car son rôle lui colle à merveille. J'aime le personnage qu'il incarne qui est en sorte le grand frère du groupe sur lequel tout le monde se repose. Une prestation comme à son habitude sans failles et possédées.


Là où Andrea Arnold a faits très fort c'est en réunissant ces deux acteurs qui vont superbement ensemble. Ils sont fusionnels et se renvoient les répliques avec crédibilité et ferveur. On sent qu'ils ne se force pas du tout et qu'ils se laissent aller, une osmose parfaite entre Sasha Lane et Shia Labeouf, autant psychologique que physique. L'histoire se focalise superbement sur ces deux tourtereaux. J'aimerais vraiment les revoir un jour faire à nouveau duo sur un long métrage.


Une autre actrice qui a sans sort bien c'est Riley Keough le chef du groupe, difficile à cerner qui peut être une belle vipère et tout autant compréhensive. Elle sait se servir de ses jolis attributs pour avoir ce qu'elle veut et dirige d'une poigne de fer le groupe sans être pour autant méchante, d'où le fait qu'elle est dure à cerner, je dirai business is business.
Le reste de la troupe est quant à elle vraiment sympathique, on s'attache à chaque personnage, mais on ne tombe pas dans un approfondissement de chacun d'eux, ce qui n'est en soi assez intelligent car du coup aucun temps mort et on ne se perd dans l'histoire. Chacun d'eux amène une vraie panache et contribue à la réussite et à l'entente qui se soutienne les uns des autres pour vivres.


CONCLUSION:


Américain Honey est un véritable coup de coeur qui m'a envoûté d'un bout à l'autre . Ce film m'a offert une nouvelle vision du cinéma, un véritable vent de fraîcheur qui a mon humble avis divisera les spectateurs. Car devant une telle oeuvre c'est soit on aime soit on déteste, car ça sort des normes habituel, une chose est sure la technique et les talents sont la. Vous qui vous plaignez que le cinéma ne sait plus se renouveler et bien je vous dis que ce titre est alors absolument pour vous. Je tiens à souligner qu'Américan Honey a décroché le Grand Prix du Jury au dernier festival de Cannes. Je n'ai rien à lui reprocher à part le fait qu'il se soit terminé.
Mon chef-d'oeuvre de l'année 2017 que j'assume totalement!

B_Jérémy
10
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films de 2017 et Top 100 de mes meilleurs films tous genres confondus.

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le 7 juin 2018

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