Hommage extrêmement efficace au cinéma d’Alfred Hitchcock, What Lies Beneath compose un personnage complexe tel que les apprécie Robert Zemeckis : Claire Spencer présente plusieurs visages successifs qui se confondent à mesure qu’éclate la vérité, par l’intermédiaire du fantastique, registre que le cinéaste aborde avec une lourdeur d’exécution certaine. La confusion entre trois femmes blondes, soit la voisine mystérieusement absente de son lieu de vie, l’étudiante portée disparue et Claire elle-même, emprunte à Vertigo (1958) et brosse le portrait d’une société patriarcale fondée sur le travail du mari, éminent scientifique qui reconnaît ses pairs lors de soirées mondaines étouffantes et qui n’hésite pas à réduire sa compagne interchangeable à l’état de plante verte – Claire ne doit-elle pas participer à un concours floral ? n’agrémente-t-elle pas un panier de bienvenue pour ses voisins ?

Le trouble paranoïaque, qui emprunte lui à Rear Windows (1954), mute en pulsion scopique par le biais des multiples surfaces réfléchissantes, du miroir installé dans l’entrée de la maison aux vitres de la voiture et glaces de la salle de bain : cet œil qui surgit derrière la palissade offre une métaphore à l’ensemble du long métrage, celle de la nécessaire fiction pour posséder l’autre par le regard, que Zemeckis aborde en honnête artisan. N’oublions pas l’humour, marque d’une lucidité sur la nature factice, presque de contrefaçon, d’un film qui joue explicitement avec le spectateur et avec son œil : un couple commence à se disputer derrière la fenêtre de droite, au dernier plan devant lequel s’activent Claire et Norman (Bates ?!), puis la caméra s’approche pour capter la scène au premier plan ; ce même couple s’amuse à jouer l’étrangement lors d’une soirée ; la cadavre de l’étudiante ressemble à celui de la mère dans Psycho (1960) ; l’ampleur des mouvements de caméra fait qu’un visage semble inscrit dans l’eau du lac et de la baignoire, avant de disparaître pour laisser place à celui de Claire, etc. Alan Silvestri talonne Bernard Herrmann avec talent. Nous aurions tort de bouder notre plaisir !

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le 1 janv. 2024

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