L'homme sans visage

En adaptant le prix Goncourt de Pierre Lemaître, Albert Dupontel dispose de moyens importants et souhaite proposer un film à grand spectacle, populaire, dans des décors impressionnants : de ce point de vue le résultat se révèle effectivement convaincant, agréable à l'œil.

Hélas, le fond n'est pas tout à fait à la hauteur de la forme, avec notamment des problèmes de narration : tout va très vite, trop vite (par exemple la brouille entre Edouard et son père, réduite à un - joli - gimmick visuel), et l'émotion n'émerge que trop rarement.
En parallèle, au sein de ce récit extrêmement riche, Dupontel - Lemaître embrassent de multiples thématiques, sans avoir le temps de les approfondir.

D'autre part, sans doute dans un souci d'accessibilité, le traitement est un peu trop enfantin à mon goût (avec par exemple le conseiller complètement idiot, joué pourtant par le truculent et trop rare Philippe Uchan), sans trop choisir entre drame humain, tragédie onirique et comique absurde.

Côté casting, Laurent Lafitte et Nils Arestrup m'ont semblé convaincants, Albert Dupontel un peu moins, donnant l'impression de dépanner à ce poste de comédien (à l'origine, Bouli Lanners était censé tenir le rôle principal).
Quant au casting féminin, il est clairement sacrifié, Emilie Dequenne et plus encore Mélanie Thierry devant se contenter de miettes.

Au final, je retiendrai quelques bonnes idées (les masques) et quelques très belles scènes quand même (le massacre des figurines politiques au Lutecia, la "fuite" finale d'Edouard), au sein d'une œuvre qui reste originale et sympathique.
Mais on était sans doute en droit d'espérer mieux de cette ambitieuse adaptation...