[Attention, ne lisez pas cet avis si vous n’avez pas vu le film.]


J’ai passé un moment exceptionnel. C’est intéressant de voir à quel point le film divise. Pour certains, le scénario est incohérent. Pour d’autres, les choses auraient pu être faites autrement. Pour d’autres encore, ce fameux combat final est une terrible déception tant leur attente était grande. Écriture des personnages, mise en scène, choix scénaristiques, durée, humour malvenu, autoréférences agaçantes, etc… Tout est sujet à discussion. Mais peu importe.


Bien sûr, comme d’autres je regrette que les motivations premières de Thanos, à savoir alléger l’univers de la moitié des êtres vivants qui y coexistent avant un épuisement définitif de ses ressources, n’aient pas été plus approfondies notamment du côté des vengeurs. Quoi qu’il en soit j’attendais une conclusion à cette saga. Juste une conclusion, peu importe laquelle. Non pas par lassitude ou par désintérêt, juste parce que c’est ce que le film est censé être. Inutile de me créer des attentes illusoires, ce sont les propriétaires du film qui décident, pas moi. La seule chose que j’ai à choisir, c’est d’utiliser ou non une partie de mon argent et de mon temps pour voir leur travail.


Personne ne m’enlèvera le plaisir intense d’avoir assisté au rassemblement de tous ces personnages à l’écran. Je n’ai pas d’attrait particulier pour les super-héros d’une manière générale. Mais j’aime les belles histoires, et je me suis attaché à certains d’entre-eux. Nous sommes quasiment en 2020 et des figures vieilles de plusieurs dizaines d’années continuent à faire rêver les petits et les grands. Et ces figures n’ont de « super-héros » que le nom. Car ils ne m’ont jamais paru plus humains qu’aujourd’hui. Avec leurs forces et leurs faiblesses. Leurs joies et leurs états d’âme. Leurs qualités et leurs défauts. Leurs succès et leurs erreurs. Au fond du gouffre suite à leur monumentale défaite, chacun tente d’avancer dans la vie à sa manière, comme nous le faisons nous aussi durant des moments difficiles. Et quasiment tous m’ont profondément touché durant leurs efforts pour surmonter cette épreuve, certains changeant du tout au tout.


Le playboy milliardaire et narcissique a trouvé son salut en élevant sa petite fille. Le leader patriote continue à garder la tête haute en apportant du soutien à ses concitoyens, toujours fidèle à ses valeurs. L’assassine au sang-froid, qui a galéré toute sa vie, s’efforce de maintenir l’activité des vengeurs, se raccrochant tant bien que mal à la seule famille qu’elle ait jamais eu. Le tireur d’élite, à qui la possibilité de retraite lui a été retirée, sombre dans une croisade sanglante et malsaine contre les criminels. Le scientifique tourmenté fait enfin la paix avec sa part sombre et apprend à vivre avec ses peurs. Et le dieu du tonnerre, hanté par son échec cuisant, trouve refuge dans l’alcool, ce qui ne diminue pas sa nervosité et le rend au contraire sensible et douteux.


Endgame est un cadeau pour ceux qui ont suivi toutes ces aventures durant cette décennie. Les références aux films passés et le voyage dans le temps apparaissent comme un regard en arrière bienveillant sur le chemin parcouru. L’humour, rejeté par certains, ne m’a pas gêné. Au contraire, il participe à cette impression de voir une bande-dessinée mise en scène au cinéma. Tout comme le scénario parfois tiré par les cheveux. Ce n’est pas grave, c’est ce qui fait le charme de ce genre de chose.


Rien ne m’enlèvera de la tête ces images saisissantes : celle d’un Captain America sévèrement amoché faisant face, seul, à une armée ennemie sur un champ de bataille chaotique formé des décombres de son foyer, faiblement illuminé par un rayon de soleil timide, symbole du maigre espoir qui lui reste.
Celle de ces dizaines de personnages qui se rassemblent au front, l’air déterminé et abandonnant toute plaisanterie face au combat à venir, venant grossir les rangs derrière un Steve Rogers qui reprend peu à peu confiance.
Celle d’un Tony Stark à genou face au Titan dont l’arrivée imminente constituait une source d’angoisse terrible, brandissant courageusement les fameuses pierres subtilisées un instant plus tôt dans un acte décisif pour mettre fin au désastre, accompagnant son geste d’un « Et moi, je suis Iron Man ! » et assumant ainsi de nouveau à voix haute ses responsabilités, fier du symbole qu’il est devenu au fil des années.
Celle de cette main posée avec tendresse sur la poitrine métallique de l’homme de fer, sa lueur bleutée caractéristique diminuant peu à peu jusqu’à s’évanouir définitivement, illustrant la fin du cycle initié par la naissance du héros.


Enfin, la plus forte de ces images étant celle de cette charge explosive menée dans un ultime élan épique face à l’adversité, une nuée indomptable d’hommes et de femmes courageux, unis dans un même but, formant ainsi une fresque sensationnelle par la diversité de ces personnages en termes de morphologies, d’origines et de pouvoirs fantastiques. Je ne peux m’empêcher d’y voir un écho, bien que largement fantasmé, aux combats sociétaux actuels, menés par des hommes et des femmes aux profils et aux origines divers, riches de leurs différences mais aussi de leur motivation universelle : exiger le droit de vivre.

Vakarius
8
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le 10 mai 2019

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Vakarius

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