Abstrait, Ambitieux, grotesque, foutraque, génial, ridicule et magistral

Le dernier film d'Alex De La Iglesia est probablement son meilleur film depuis El día de la bestia, le plus personnel, le plus épuré et abouti de De La Iglesia. Le plus déchainé et libre aussi.


Le plus personnel car c'est le premier scénar' qu'il écrit sans Jorge Guerricaechevarria (avec qui il a toujours écrit ses films). Le plus épuré car rien n'est expliqué, mise en évidence, l'histoire ne prend pas le spectateur par la main pour lui faire comprendre ce qu'il doit assimiler, les images (la photo est juste brillante) parlent d'elles-mêmes, à la limite de l'abstrait (ce qui en rebutera plus d'un, je le conçoit). Le plus abouti car le film dégage une force que je n'avais pas vu depuis bien longtemps (dans le cinéma espagnol et en général), une force qui te prend aux tripes et qui ne te lâchera plus bien après la dernière scène du film (de loin la meilleur fin au cinéma de 2010 - 2011 en France, certes).


Abouti aussi car le film est ambitieux, mélange les genres jusqu'à leur tordre le cou, mélange le réel - l'histoire de l'Espagne de 1936 à 1973 - et la fiction - cette histoire d'un Auguste (Carlos Areces, très crédible) amoureux d'une trapéziste (Carolina Bang) qui sort (enfin, qui couche surtout) avec l'autre clown (Antonio de la Torre, impressionnant) qui peu à peu sombre dans la folie (je réduis l'histoire, après tout c'est une critique, pas un résumé). Chose qu'il a déjà fait dans Muertos de Risa, grand film sous evalué ou il revisite l'Espagne des années 70. On pourrait penser à Inglorious Bastards de Tarantino (d'ailleurs la première scène –grandiose, baroque et violente à souhait– après les crédits y fait penser) mais ce serait bien idiot de le penser car le film est bien plus intelligent et moins poseur.


Sur ce point, je ne sais pas comment sera vu le film de l'extérieur et pour un spectateur pas très au courant de l'histoire de l'Espagne de ces 50 dernières années car le film à une deuxième lecture sur l'absurdité et la violence sourde de cette période, sans trop intellectualisé le tout, ce n'est pas juste une posture.


Mais le prix à payer de cette audace visuelle et scénaristique sera lourde à payer car j'ai bien peur que le film bénéficie d'un très mauvais bouche à oreille (le film est vendu comme une sorte de barnum ultra-violent d'humour noir. alors que ce n'est pas totalement vrai). Le film en déroutera plus d'un.


En vrac, Violent, baroque, foutraque, abstrait, fascinant, grandiose, politique, buñuelien (ces scènes dans les bois, qui ne sont pas à l'avantage de l'acteur principal il faut le dire –non, pas de spoil'- et la relation tortueuse entre l'autre clown et la trapéziste), grotesque (le cirque, les scènes de baise entre autre), ridicule, ambitieux, magistral, tout et bien plus encore. Ou tu aimes ou tu détestes, mais tu n'en ressortiras pas indifférent.


PS : Même si on peut penser entre autre à Lynch, Tim Burton, voir même à Jeunet-Caro dans la forme et le fond, c'est plus par similitude que par une volonté propre. De la Iglesia à depuis longtemps cet aspect visuel ce serait idiot de n'y voir qu'un simple calque.


PPS: De la Iglesia a fait Crimen Ferpecto après le bide de 800 ballas pour rassurer un peu tout le monde, que devra-t-il faire cette fois?

Créée

le 9 mars 2011

Critique lue 2.4K fois

34 j'aime

9 commentaires

Spanish_Fry

Écrit par

Critique lue 2.4K fois

34
9

D'autres avis sur Balada Triste

Balada Triste
Diothyme
10

ça!!

Pour ceux qui n'auraient pas encore peur des clowns, ce n'est pas irrémédiable... J'ai mis ce film pour m'occuper pour faire autre chose, et impossible, dès les premières secondes je me suis...

le 18 août 2011

34 j'aime

28

Balada Triste
Spanish_Fry
9

Abstrait, Ambitieux, grotesque, foutraque, génial, ridicule et magistral

Le dernier film d'Alex De La Iglesia est probablement son meilleur film depuis El día de la bestia, le plus personnel, le plus épuré et abouti de De La Iglesia. Le plus déchainé et libre aussi. Le...

le 9 mars 2011

34 j'aime

9

Balada Triste
guyness
6

Poison clown

Balada Triste, c'est pendant 1h40 une impression de promesse non tenue. Comme si, tout le long du film, chaque bonne idée était aussitôt battue en brèche par une facilité, une maladresse, un excès...

le 3 nov. 2011

30 j'aime

6

Du même critique

El Clan
Spanish_Fry
6

El Clan était presque parfait

On va commencer par des infos, comme ça vous pourrez briller en société quand le film sortira. El Clan est sorti en août 2015 en Argentine et a explosé le record d'entrée sur sa première semaine...

le 8 oct. 2015

19 j'aime

Amour & Turbulences
Spanish_Fry
2

amour (en toc) et turbulences (intellectuelles)

Qu'est-ce que je viens de regarder? Alors vraiment, je me qualifie de cinéphage, et je peux très bien me farcir une rom' com' bien que je sâche comment elle va finir. Je peux voir "Friends" et même...

le 21 sept. 2013

12 j'aime

Lucia et le Sexe
Spanish_Fry
8

Film casse-gueule

Julio Medem ne fait que des films casse-gueule dans le sens où il est toujours à la limite du grandiose et du ridicule. Ici, on est plus proche du grandiose que du ridicule, même s'il ya 2/3 scènes...

le 3 nov. 2010

9 j'aime