Ce portrait absolument admirable de Barbara Rubin retrace le parcours existentiel de la jeune artiste jusqu'à sa tragique disparition à l'âge de 35 ans.

Pionnière de la scène culturelle underground new-yorkaise au début des années 1960, elle réalise un seul et unique film intitulé Christmas On Earth qui révolutionne le cinéma alternatif américain et la fait immédiatement remarquer par des personnalités tels que Andy Warhol et le poète Allen Ginsberg. Elle vient tout juste d'avoir 18 ans et entre de plein pied dans l'univers de la Factory que Warhol crée au début de l'année 1964 et qui se voit peuplé d'êtres aussi perchés que créatifs. Ultérieurement internée dans un centre psychiatrique pour sa désobéissance à l'égard du système, Barbara est une consommatrice de drogues en tout genre et maîtrise le sujet mieux que quiconque à la Factory. Elle traîne régulièrement avec Bob Dylan et devient amie avec le groupe The Velvet Underground qu'elle présente ensuite à Warhol. L'Histoire de la pop culture est en marche. Barbara filme, crée des visuels, participe aux films et aux clips de ses amis artistes et se voit finalement évincée de la Factory par Paul Morrissey, jaloux maladif du dynamisme et de l'indéniable talent de la jeune femme.

En couple avec Ginsberg, l'audacieuse Barbara rebondit en organisant l'International Poetry Incarnation à Londres et incite son cher et tendre à acquérir une ferme afin de la transformer en refuge pour les poètes. Elle soutient tout autant moralement que physiquement son ami Bob Dylan suite au terrible accident de moto que le chanteur vient de subir et crée dans la foulée le tout premier festival multimédia, Caterpillar Changes, à la Cinémathèque des cinéastes en 1967.

Son plus grand rêve, celui d'être mère, devient malheureusement une illusion face au refus de Ginsberg qui accueille inlassablement tous ses amis toxicomanes dans la demeure familiale. Barbara change alors littéralement de vie et devient une adepte des enseignements mystiques du rabbin Nachman de Bratslav. Elle se marie finalement avec un artiste-peintre français, adopte le prénom hébraïque Bracha Basha (Bracha signifiant "bénédiction") et s'installe en France. Elle décède à Lyon d'une infection postnatale en donnant naissance à son cinquième enfant, elle venait tout juste d'avoir 35 ans. Lou Reed dira d'elle : Barbara était la force motrice et la coordinatrice entre nous tous. Sans elle, notre histoire n'aurait absolument pas été la même.

Avec un montage d'images d'archives proprement hallucinant, Chuck Smith dresse un magnifique hommage à cette artiste surdouée, fédératrice, féministe et engagée qu'était Barbara Rubin. En soulignant tout autant ses paradoxes que sa combativité à rester libre, il signe certainement l'un des plus beaux portraits de femme qu'il m'ait été donné de visionner. Bref, pour tous les amoureux de la pop culture alternative, Barbara Rubin and the Exploding NY Underground est impérativement à découvrir.

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le 5 mai 2024

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