Rose mais pas niais (Ma vraie note 6,5/10)

Avec une promo exagérément girly au point que quand le mot 'Barbie' est tapé sur Google, l'écran est envahi de paillettes roses, des habits scintillants, des maisons de poupées également roses (et pas que puisque la couleur en question a été placée dans les emballages de Burger King) et des lieux en plastique, Barbie avait tout pour être un film purement Toyetic pour remplir les caisses de Warner Bros et Mattel (ce qui est en partie vrai).

Pourtant, Greta Gerwig parvient à mettre sa touche personnelle et créer un véritable propos sur la société et les rapports hommes-femmes.

En effet, loin des films d'animation direct-to-video Barbie où cette dernière était souvent une Princesse dans des adaptations pas forcément réussies de divers contes de fée tels Le Casse-Noisette, Raiponce ou encore Le Lac des Cygnes (seul Barbie et la Magie de Noël adaptant Un Chant de Noël la mets en scène dans un vrai métier où elle interprète une chanteuse d'opéra tout en étant l'équivalent d'un Scrooge féminin; donc une méchante, ce qui était inédit), le Barbie de Greta Gerwing est un film live mettant en scène une foule de Barbie exerçant des métiers importants jusqu'à cheffe-présidente. Ce lieu idyllique est appelé BarbieLand, pays où vit la Barbie la plus appréciée de toutes: Barbie Stéréotypée interprétée par une Margot Robbie enjouée et pleine d'entrain.

Il y a également Ryan Gosling interprétant un Ken avec des complexes les Kens ayant pour unique fonction d'être les love-interest des diverses Barbie.

Alors que le début du film laissait présager une catastrophe avec un énième film de poupées superficiel (au point que le logo Warner Bros a été roséfié) ayant pour unique but de laver le cerveau des petites filles avec des fêtes et soirées pyjamas entre filles pleines de gloussements, des garçons frimeurs souriants pour rappeler aux enfants qu'il faut absolument être hétéronormés ainsi que des injonctions à la beauté où il faut toujours marcher en talons, tout bascule quand Barbie Stéréotypée a des pensées morbides et qu'elle n'arrive plus à être la poupée parfaite.

Conclusion à ceci: sa propriétaire irait mal et le seul moyen de redevenir une vraie Barbie serait de la rendre à nouveau heureuse.

La voilà donc obligée d'aller dans le vrai monde suivie par un Ken, en apparence, amoureux d'elle. Barbie découvre le sexisme en étant reluquée par les pervers et regardée de haut par les hommes de l'entreprise Mattel ainsi que des femmes reléguées à des postes peu valorisants et des adolescentes disant que Barbie rabaisse les femmes.

Mais surtout commence à devenir humaine au point d'être capable de pleurer.

Quant à Ken, il découvre le patriarcat et voit une possible émancipation à travers une masculinité toxique qu'il n'hésite pas à imposer aux autres pour le pire.

Avec tout ceci, on aurait pu penser que ce film irait dans le pur girl-power en diabolisant tout ce qui est masculinin et idéalisant tout ce qui est féminin. Mais ça n'est pas le cas. En effet, le message de Barbie est bien plus subtil dans ses idées en montrant que la misogynie doit être affrontée tout en montrant que la misandrie n'est pas la solution à ce problème. Il faut trouver un équilibre afin que personne ne domine personne et que tout le monde, homme ou femme, soit heureu(se)x.

De plus, il y a également un message sympathique sur la bien trop pesante recherche de perfection soit parce qu'il faut être doué dans tous les domaines et toujours maîtriser ses pensées au prix de ne pas avoir d'émotion, soit parce qu'il faut soigner son physique et ne jamais exprimer ses opinions.

Ce qui se voit à travers le personnage d'Allan (Michael Cera) ne trouvant sa place ni en tant que love-interest potentiel d'une Barbie, ni en tant que potentiel Ken dans la masculinité toxique au point d'être heureux quand il affronte le patriarcat avec les Barbie.

Vous l'avez compris, pour un film de poupées, Barbie est très intéressant dans ses messages progressistes. Messages que ne comprendront pas forcément les plus jeunes, mais y verront plus clair en grandissant, et que les plus âgés apprécieront aujourd'hui.

En plus, le film parvient à garder un ton léger et un esprit bon-enfant avec des chansons kitsch, qui, loin d'être ringardes, sont entraînantes et restent dans la tête. Plus particulièrement quand elles sont fredonnées par des personnages exagérément souriants en mode adolescents naïfs. Sans oublier le fait que ce film est extrêmement drôle avec un Ken en mode kéké pas futé lançant des répliques aussi hilarantes les unes que les autres; tandis que Barbie et son optimisme exagéré avec son sourire niais, ainsi que sa prise de conscience au sujet du sexisme, la rendent à la fois drôle et touchante.

Malheureusement, malgré ses qualités indéniables, Barbie a également des défauts difficiles à ignorer. Pour commencer, les personnages humains, Gloria et sa fille Sasha en mode ado ingrate, devant apprendre à se comprendre ne sont pas très intéressantes vu qu'elles sont essentiellement présentes pour faire de la figuration et n'apportent pas grand-chose au récit.

Cependant, Gloria est appréciable de par son rapport avec Barbie étant son jouet d'enfance ainsi que son intelligence et sa lucidité au sujet du monde qu'elle décrit dans une longue tirade réfléchie et bien écrite.

De plus, il y a également les hommes d'affaire de Mattel qui semblaient partis pour avoir des rôles importants dans l'histoire mais qui, finalement, en plus de ne servir à rien dans le film, retardent le récit inutilement. On sent que ces personnages sont là uniquement pour caresser la vraie entreprise Mattel dans le sens du poil et non pas par utilité scénaristique; ce qui fait que Greta Gerwig ne se permets pas de faire une critique du capitalisme et de la transmission de valeurs discutables via l'abus du consumérisme des enfants. Dommage car cela aurait eu sa place dans un film critiquant les messages discutables que transmettent certains jouets aux enfants.

Sans compter un dernier gros problème. Le final montre que Barbie a été créée par une femme d'affaires (Ruth Handler) qui, à la base, avait créé ce jouet pour que les petites filles aient autre chose que des poupons uniquement pour faire la maman et se projettent dans des métiers que les poupées Barbie faisaient (certaines poupées Barbie pouvant même être scientifiques dans la gamme de jouets) et non pas pour imposer aux petites filles des messages rétrogrades comme quoi il faut être jolie et se taire. Cependant, le fait que les hommes de Mattel restent à leurs métiers haut-placés au lieu d'engager des femmes à des métiers importants dans leur entreprise est assez hypocrite vu que Gloria garde un job de secrétaire qu'elle n'aime pas et que l'entreprise écoute ses idées à la fin sans qu'on sache si elle va avoir de la reconnaissance ou non par la suite.

Bref, un film sympathique et, surtout, étonnant dans ses propos que l'on aurait jamais pensé voir dans un film Barbie ce dernier se voulant être un film intelligent avant tout et non pas un produit Toyetic sans âme.

BlackBoomerang
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le 20 juil. 2023

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