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Après l’échec critique mais aussi commercial en regard de son budget de Batman et Robin Warner Bros. est décidé à relancer la franchise Batman dans une direction plus compatible avec les attentes d’un public de fan de comic-book au cinéma plus exigeants. Les deux X-Men de Singer ont changé la donne en abordant le genre avec sérieux aux antipodes du « camp » porté à son paroxysme par Joel Schumacher mais le choix n’est pas évident pour la major qui lance le développement de projets très différents. Le premier est une adaptation de la série animée Batman Beyond (qui voit dans un Gotham City du futur proche du L.A de Blade Runner, Terry McGinnis un jeune homme reprendre l’héritage du caped crusader avec pour mentor un vieux Bruce Wayne) menée par Boaz Yakin qui ambitionne de proposer le rôle de Wayne à Clint Eastwood. Le second projet est confié à Darren Aronowsky auréolé de la réputation de son Requiem for a dream qui souhaite adapter rien de moins qu’un des plus célèbre récit des comics le Batman Year One de Frank Miller à qui il confie l’écriture du script (que vous pouvez lire ici ). Le projet est alléchant mais en dépit de la participation de Miller s’éloigne considérablement du matériau original : Bruce perd sa fortune et devient sans-abri, Alfred devient « Little Al« un afro-américain qui dirige un atelier de réparation automobile, mentor de Bruce. Le nom de Batman vient d’un T et W entrelacés sur un anneau qu’il porte tout en luttant contre un crime confondu avec une chauve-souris par les criminels, La Batcave est située dans une station de métro abandonnée… Le projet trop baroque est abandonné en juin 2002. Pourtant Warner n’abandonne pas l’idée de confier le projet a un jeune cinéaste ambitieux et choisit début 2003 le jeune Christopher Nolan qui a éblouit la critique avec son Memento et a signé pour la major Insomnia le remake d’un thriller scandinave. On lui associe le scénariste David Goyer grand fan de comics à l’origine de la franchise Blade. Nolan accepte le projet car il veut renouer avec les grands blockbusters de son enfance en particulier le film matrice des adaptations de super-héros à l’écran le Superman de Richard Donner. Il souhaite adhérer au principe de la verisimilitude du réalisateur de L’Arme Fatale qui théorise qu’une fois admis quelques principes « extraordinaires », il faut traiter les événements d’un film de super-héros non pas au second degré mais de la manière la plus réaliste possible. Nolan est si déterminé à tirer Batman vers le réalisme en tout cas la vraisemblance qu’il est prêt à abandonner les oreilles pointues du masque et la cape. Goyer le convainc de conserver les éléments centraux du mythe mais Nolan l’oblige à en justifier l’usage dans le film. Nolan est inspiré par « L’Homme qui tombe« , une courte histoire de Denny O’Neil et Dick Giordano sur les voyages de Bruce à travers le monde d’où il tire la scène d’ouverture du film où Bruce tombe dans un puits de la propriété , Goyer est influencé lui par l’approche sobre et sérieuse le Batman: The Long Halloween, de Jeph Loeb et Tim Sale dont il reprend le méchant Carmine Falcone. Il utilise l’absence de Gotham durant plusieurs années de Bruce Wayne dans le Batman: Year One de Miller pour y placer certains des événements du film. Du même Batman Year One il reprend le traitement du personnage de James Gordon flic rare, policier honnête dans un Gotham City rongé par la corruption et situe le film dans les débuts du justicier. Pour montrer l’atmosphère et le style qu’il souhaite imprimer au projet Nolan projette le Blade Runner de Ridley Scott avant le tournage à son directeur de la photographie Wally Pfister (qui sera nommé aux Oscars pour le film cette année).


Comme Sam Raimi et Richard Donner avant lui Nolan a l’intelligence de nous laisser le temps de connaitre l’homme derrière le masque avant de s’intéresser au super-héros. Le traumatisme que Bruce ressent à propos de la mort de ses parents a plus de force ici car nous avons un aperçu des relations qu’il entretenait avec son père et apporte un nouvel angle sur la relation entre Alfred et Bruce. Nous voyons que la dévotion d’Alfred à la famille Wayne explique sa foi en Bruce. Il approfondit la mythologie en montrant comment ce traumatisme a conduit le jeune orphelin à s’enfoncer profondément dans sa colère et sa culpabilité, c’est en devenant Batman qu’il parvient à en sortir. Christopher Nolan a sauvé le Dark Knight avec cette approche qui mélange les récits plus violents des premières bandes dessinées, la renaissance psychologique et sombre des années 70 et bien sur la révision hardboiled de Frank Miller sur les premiers jours de Batman, le ramenant à ses racines : celui du plus humain (et borderline) des super-héros. Le choix de l’intense Christian Bale dans le rôle-titre est inspiré et sans être un fan Nolan comprends parfaitement la vraie nature du personnage: si le Batman qui parcourt les rues est lui aussi une forme de construction (en atteste la voix caverneuse, si discutée, adoptée par Christian Bale) Bruce Wayne est l’identité secrète de Batman et non l’inverse. Le playboy millionnaire n’est pas un répit dans sa lutte contre le crime, mais une identité soigneusement construite et cultivée, créée pour distraire de son vrai travail. Nolan, qui s’était fait un nom avec un Memento, structurellement et dramatiquement complexe, construit le scénario autour de flash-backs choisis pour privilégier l’aspect dramatique plutôt que la simplicité narrative. De la même manière il porte plus d’intérêt pour l’ambiance et les ressorts psychologiques qu’aux grandes séquences d’action propres aux blockbusters même si le film n’en est pas avare. Amateur de prestidigitation, Nolan s’intéresse aux méthodes théâtrales qu’il utilise pour projeter une aura surnaturelle autour de lui. La peur est un des thèmes centraux du film dont les protagonistes se partagent entre ceux qui en sont victimes, ceux qui la surmontent et ceux qui la provoquent. Batman bien sur appartenant successivement à toutes ses catégories puisque le film chronique sa construction qui passe par ces différentes phases. De fait, Nolan adopte souvent le vocabulaire filmique du film horrifique , la grammaire de Ridley Scott pour Alien, en particulier dans la séquence de la première apparition de Batman.


Beaucoup de fans envisageaient Christian Bale comme un parfait Batman potentiel , sur la foi de ses performances dans American Psycho (un autre millionnaire à double vie) ou Equilibrium, nos vœux ont été plus qu’exaucés par le travail de transformation accomplie par l’acteur gallois du jeune traumatisé Bruce Wayne en Batman impeccable. L’expressivité de son visage et son comportement laissent deviner une innocence et une vulnérabilité masquées par la douleur, d’où finissent par émaner une force et une confiance intérieures. Alors qu’il devient Le chevalier noir, sa posture et sa voix se transforment. Cinquième acteur à enfiler le costume de caoutchouc noir sur grand écran, il électrifie le film de sa toute première scène à sa conclusion. Un des contrastes frappant avec les adaptations précédentes, qui ont vues, dans la foulée de la performance de Jack Nicholson dans le film de Tim Burton, les personnalités surdimensionnées des vilains éclipser celle de Batman presque relégué au rang de guest-star dans ses propres films. Batman Begins est peut-être le premier des films où il est le personnage principal. Chacun des méchants est utile pour faire avancer l’histoire et les thématiques du film enrichissent au contraire le héros plutôt que de l’éclipser. Pour remplir les rôles des méchants, Nolan fait néanmoins appel à de solides acteurs comme Cillian Murphy (qui passa le casting sans succès pour le rôle titre) suffisamment effrayant et troublant dans le rôle du psychiatre sadique le Dr Jonathan Crane, mieux connu des fans de bandes dessinées sous le nom de Scarecrow, le très intense Tom Wilkinson dans le rôle du parrain de la pègre de Gotham City Carmine Falcone et Ken Watanabe qui fait une apparition mémorable dans le rôle du mystérieux Ra’s Al Ghul. Ra’s Al Ghul est un choix de vilain intéressant car il n’est pas dément comme tous les autres adversaires de Batman , il essaie en fait de guérir le monde mais le fait par des moyens inacceptables. le conflit entre lui et Batman est ainsi tout autant philosophique que physique, le héros partageant parfois ses vues si il s’oppose à ses méthodes. Le Ra’s Al Ghul des comics a une dimension fantastique , il traverse les siècles grâce au Puits de Lazare qui lui confère l’immortalité. Pour rester dans les paramètres réalistes de Nolan, Goyer apporte une explication élégante.
Beaucoup de fans envisageaient Christian Bale comme un parfait Batman potentiel , sur la foi de ses performances dans American Psycho (un autre millionnaire à double vie) ou Equilibrium, nos vœux ont été plus qu’exaucés par le travail de transformation accomplie par l’acteur gallois du jeune traumatisé Bruce Wayne en Batman impeccable. L’expressivité de son visage et son comportement laissent deviner une innocence et une vulnérabilité masquées par la douleur, d’où finissent par émaner une force et une confiance intérieures. Alors qu’il devient Le chevalier noir, sa posture et sa voix se transforment. Cinquième acteur à enfiler le costume de caoutchouc noir sur grand écran, il électrifie le film de sa toute première scène à sa conclusion. Un des contrastes frappant avec les adaptations précédentes, qui ont vues, dans la foulée de la performance de Jack Nicholson dans le film de Tim Burton, les personnalités surdimensionnées des vilains éclipser celle de Batman presque relégué au rang de guest-star dans ses propres films. Batman Begins est peut-être le premier des films où il est le personnage principal. Chacun des méchants est utile pour faire avancer l’histoire et les thématiques du film enrichissent au contraire le héros plutôt que de l’éclipser. Pour remplir les rôles des méchants, Nolan fait néanmoins appel à de solides acteurs comme Cillian Murphy (qui passa le casting sans succès pour le rôle titre) suffisamment effrayant et troublant dans le rôle du psychiatre sadique le Dr Jonathan Crane, mieux connu des fans de bandes dessinées sous le nom de Scarecrow, le très intense Tom Wilkinson dans le rôle du parrain de la pègre de Gotham City Carmine Falcone et Ken Watanabe qui fait une apparition mémorable dans le rôle du mystérieux Ra’s Al Ghul. Ra’s Al Ghul est un choix de vilain intéressant car il n’est pas dément comme tous les autres adversaires de Batman , il essaie en fait de guérir le monde mais le fait par des moyens inacceptables. le conflit entre lui et Batman est ainsi tout autant philosophique que physique, le héros partageant parfois ses vues si il s’oppose à ses méthodes. Le Ra’s Al Ghul des comics a une dimension fantastique , il traverse les siècles grâce au Puits de Lazare qui lui confère l’immortalité. Pour rester dans les paramètres réalistes de Nolan, Goyer apporte une explication élégante.


Les précédents films de Batman étaient des productions « claustrophobes » mais contrairement au Gotham City de Burton et Schumacher qui n’existait pas dans le monde réel, Nolan veut donner naissance à une ville vraisemblable tournant des extérieurs à Londres, New York et Chicago les éléments les plus fantastiques comme la Batcave étant eux reconstitué en studios par Nathan Crowley. Grand fan des fresques de David Lean en 70 mm, le film amène Bruce Wayne aux confins du monde des sommets enneigés de l’Extrême-Orient (filmés en Islande) aux gratte-ciel imposants de Gotham City conférant un scope épique inédit dans la saga. La musique a toujours joué aussi un rôle primordial , on se souvient du thème inoubliable de Danny Elfman. Nolan avait initialement invité Hans Zimmer à composer la musique, ce dernier invitant à son tour James Newton-Howard avec qui il avait toujours voulu travailler. Leur collaboration en se partageant des thèmes distincts pour Bruce Wayne et son alter ego va accoucher d’un score puissant et inoubliable, fusion d’orchestre et de musique électronique où Zimmer est en charge des séquences d’action et Howard se concentre sur les scènes dramatiques. Avec les X-Men de Bryan Singer et la trilogie originale de Spider-Man de Sam Raimi, Batman Begins a contribué à la nouvelle sophistication du genre super-héroique en accord avec celle des romans graphiques destinés aux lecteurs plus adultes. Le film de super-héros n’est pas un genre « pur » mais une rencontre inévitable de formes de narration diverses dont Nolan est l’un de ses pionniers. En approchant le mythe de Batman avec respect plutôt qu’avec vénération, en osant traiter le comics avec le même sérieux qu’un thriller tout en respectant les éléments qui en font sa force, Nolan lui a fait retrouver sa valeur. Si sa suite The Dark Knight lui a un peu volé de sa gloire, Batman Begins, ce premier opus, a cette énergie, cet émerveillement un peu enfantin que sa suite, plus noire a perdu. A l’image du frisson qui parcourt le spectateur à l’instant où Batman retourne la carte à jouer qui va révéler l’identité de son prochain ennemi le genre de point d’exclamation cinématographique à couper le souffle que seul un maître cinéaste et un film magistral peuvent offrir.

Créée

le 24 juin 2020

Critique lue 74 fois

PatriceSteibel

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