Belle épine par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Dans un appartement de la banlieue parisienne, Prudence se retrouve seule du haut de ses 17 ans à la suite du départ de sa mère et de de son père. La jeune fille va tromper sa solitude en faisant la rencontre de Marilyne qui préfère le monde de la rue et les magasins du complexe "Belle Épine" de Thiais à celui du lycée. Elle est également fan de Rungis et de son "circuit nocturne" de motos. De nombreux jeunes motards se lancent dans de terribles chevauchées au péril de leur vie. Prudence se laisse convaincre par sa copine et devient une adepte de ce lieu bruyant et infernal, propice aux rencontres incertaines.


Prudence ne reste pas trop longtemps désemparée elle va vite rompre sa solitude en la compagnie de Marilyne qui devient sa colocataire. Toutefois à l'âge de ces deux jeunes filles, il faut bien rompre l'ennui, la monotonie et se donner un air de liberté même s'il s'avère artificiel. La rapine dans les grands magasins mène tout droit au commissariat. Prudence annonce effrontément à la police que sa mère est morte et que son père est parti à l'étranger et ce mensonge est en fait presque une vérité.
Totalement livrée à elle-même elle se laisse un soir tenter par l'aventure de ce sacré circuit moto où tout semble permis. Marilyne lui fait découvrir un monde qui lui semble exaltant, un monde dans lequel on vit dangereusement, dans lequel on dépasse les interdits. Le sexe, la drogue, l'alcool et les paris sur les courses folles avec des motos trafiquées et pétaradantes dans la noirceur de la nuit finissent par la nourrir. L'expérience est bien entendu plus excitante que la vie bon chic bon genre des amis de sa famille qu'elle fréquente parfois bien malgré elle. Les copains du circuit sont des durs, certes, mais ils ont en eux une part de tendresse, de solidarité et de la passion pour leurs engins sur lesquels toutes les nuits ils vont au bout d'eux-mêmes en risquant leur vie, grisés par le bruit et la vitesse. Toutefois la liberté n'est pas toujours tendre et au bout du compte elle peut se révéler cruelle et injuste.


Il est sûr que ce n'est pas le portrait d'une jeunesse dorée que nous peint Rebecca Zlotowski pour son tout premier film. Nous nous retrouvons un peu dans l'univers noir, désabusé et conflictuel d'un Maurice Pialat. C'est donc une entrée en matière bien réussie pour la réalisatrice qui laisse sa caméra se promener en toute liberté pour nous offrir une œuvre de style "cinéma vérité". A ce jeu les actrices s'en donnent à cœur joie en passant par le remarquable duo formé par Léa Seydoux et Agathe Schlencker dans les rôles respectifs de Prudence et Marilyne. Il convient de citer également Anaïs Demoustier qui nous séduit et n'en était déjà pas à son premier rôle. Tous les autres acteurs sont à féliciter également car chacun réussit à contribuer à nous entraîner dans le climat trouble de cette histoire de la façon la plus réaliste qui soit.


Personnellement, je suis entré à fond dans ce film relatant cette tranche de vie difficile avec délicatesse et efficacité. Rebecca Zlotowski pour ses débuts m'a vraiment enthousiasmé par son style dépouillé et direct, nous décrivant à sa manière des sujets assez sombres mais bien réels de notre société.


Ce film a obtenu:
- Prix Louis-Delluc du meilleur premier film décerné en 2011.


Note: 8/10

Grard-Rocher
8
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le 21 juil. 2015

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