Quand j'ai vu la bande-annonce de ce film, la première chose que je me suis dite c'est: "mais qu'est-ce qu'il nous fait, Zemeckis?" Je trouvais l'idée des poupées parlantes assez étrange, et sur le coup je n'ai pas du tout accroché. Sauf que, comme le trailer passait presque à chaque fois que j'allais voir un film au cinéma, j'ai fini par m'y habituer, et finalement par trouver le principe assez intelligent (et puis, je ne savais pas encore que ce "principe" était issu d'une histoire vraie).


Bref, j'y suis allée sans m'attendre à rien (ce qui est rare), parce que j'étais partagée entre ma première impression perplexe et mon envie croissante de découvrir ce film. Et je n'ai pas été déçue. Je ne dirais pas que c'est un film-claque, dont on ressort complètement soufflé, mais c'est un film à retardement - en gros, un film qu'on prend plaisir à voir, beau visuellement et bien pensé, mais qui donne surtout à réfléchir une fois qu'on est sorti de la salle (et après).


Ceci étant dit, je pense qu'il vaut mieux que je commence par LE point négatif, celui qui m'a empêchée de mettre un beau 10, parce que je sais que (comme moi) certaines personnes cherchent avant tout à comprendre ce que tel spectateur n'a pas aimé dans un film, et pourquoi.
Pour moi, le moment de faiblesse, c'est (et c'est dommage) sa fin: si le film maintient fièrement son originalité pendant une bonne heure quarante, les dix dernières minutes retombent un peu trop dans les clichés hollywoodiens à mon goût - et par clichés hollywoodiens, je veux dire musique émouvante, larme à l'oeil et happy end. Attention, je ne critique pas le scénario (parce que j'avoue que j'aime bien quand ça ne se finit pas trop mal), mais la manière dont il est mis en images et en musique. Un peu plus de sobriété aurait été bienvenue.


Mais cette fin un peu en-deçà du reste n'a pas vraiment réussi à altérer mon avis favorable, et ce pour plusieurs raisons.
D'abord, les images: je n'y connais rien en réalisation, mais j'ai trouvé le mélange entre animation de poupées et images "humaines" époustouflant. La ressemblance entre acteurs et poupées est réelle, sans que ces dernières aient l'air trop humaines, grâce au décalage entre un visage très mobile et un corps plus rigide. Les transitions entre images animées et photographies des poupées sont aussi très réussies.
Ensuite, les personnages: Steve Carell incarne avec justesse ce Mark à la fois désorienté et entêté, fou et ingénieux, enfant et artiste. J'ai aussi apprécié le fait que sa passion pour les chaussures à talons ne l'ait pas automatiquement conduit à être présenté comme un homosexuel refoulé/torturé: il aime ça, et c'est comme ça. L'idée que ça le relie à "l'essence de la femme" est assez floue, mais au moins elle permet de sortir du cliché (et c'est peut-être ce que disait le "vrai" Mark Hogencamp lui-même d'ailleurs, à vérifier).
Les autres personnages m'ont aussi beaucoup plu: les femmes de Marwen sont indéniablement badass, et ce sont elles qui protègent le village. Girl power. J'ai été un peu gênée au début par leurs tenues hypersexualisées, mais il faut avouer que c'est comme ça que sont habillées toutes les poupées qui sont en vente (et celles de Mark Hogencamp). Et puis après tout, si elles ont envie de mitrailler des nazis en minijupe, elles sont libres de s'habiller comme elles veulent.
Bon, j'ajoute quand même que je ne suis pas fan du personnage de Nicol, un peu trop présentée comme la jolie/gentille conne - mais je crois que c'est fait exprès et que Zemeckis joue avec ça.
Enfin, il faudrait parler de la musique et de la photographie, mais je ne suis clairement pas assez expérimentée pour ça. Je peux simplement dire que c'est un film agréable à regarder, devant lequel on n'est ni ennuyé ni malmené, et qui traite avec justesse le sujet du trauma et de la perte de repères. A découvrir, donc.

captaingustave
9
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le 5 janv. 2019

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captaingustave

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