Joe Blake (MacMurray) est lieutenant et pilote dans la Navy. Avec deux autres aviateurs de sa trempe ils forment un brelan d'as chevronné que seul la mort pourrait séparer. Hélas, un jour qu'ils se rendaient à Honolulu en manœuvres pour impressionner les cols blancs de l'armée cloués au sol, l'un d'eux se crache violemment en marge de la piste et perd la vie sur le billard du lieutenant et docteur Douglas Lee (Flynn). Une animosité va alors s'installer entre le médecin est les deux survivants. Une animosité qui va peu à peu, au gré des événements, tragiques pour la plupart mais certaines fois fructueux sur le plan humain et scientifique, se transformer en respect puis en amitié lorsque Lee, touché par la mort du pilote, décide d'intégrer le corps de la Navy comme médecin-pilote afin d'élucider les mystères irrésolus du voile noir et du mal de l'altitude.

Enfin! Après douze films tournés ensembles en l'espace de six ans, Michael Curtiz et Errol Flynn en ont enfin terminé l'un avec l'autre. Ne vous méprenez pas, si une réelle complicité était belle et bien palpable à l'écran entre le premier et le second (Curtiz aura quand même donné à Flynn deux de ses plus beaux rôles dans The Adventures of Robin Hood et The Sea Hawk), le réalisateur d’origine hongroise qui aimait quand ça filait droit eu beaucoup de fils à retordre avec le comédien australien. Trop à son goût. Il dira d'ailleurs à Jack Warner et devant témoins : "Je vais encore faire un film avec cet enfant de salaud (son insulte préféré semble-t-il), mais ça sera le dernier. Que je sois damné!". Il ne le sera pas. Au grand soulagement de son cardiologue. Car tout au long de leur six années de collaboration fructueuse sur le plan artistique et financier, depuis The Case of the Curious Bride (où Flynn n'interprétait qu'un cadavre) mais surtout Captain Blood (1935) jusqu'à ce film-ci, Flynn lui en fit en effet voir des vertes et des pas mûrs. Il s'imbiba par exemple d'une quantité prodigieuse de jus d'oranges (en réalité de vodka dont il remplissait l'agrume à l'aide d'une seringue hypodermique) sur le tournage de Captain Blood, arracha la moitié du casting et des figurants du plateau de The Charge of the Light Brigade pour aller flirter sur les plages indiennes avec la population locale et cacha encore un cadavre de serpent dans les sous-vêtements de Olivia pendant qu'ils tournaient ensembles Dodge City. Ajouté à cela son dédain et sa conception bien à lui des horaires et des plannings, d'où sa faible assiduité, et sa tendance à débarquer sur le plateau rond et bouffi par l'alcool et incapable de recracher une ligne de texte correctement sans qu'on la lui souffle et vous comprendrez pourquoi la coupe du barbare hongrois était pleine. Il n'empêche, Curtiz ne serait pas Curtiz sans Flynn et (surtout) Flynn ne serait pas Flynn sans Curtiz. Disons qu'en amour (référence à son mariage rocambolesque avec la Blayaise Lili Damita) comme au travail, Errol avait une façon bien à lui de traiter ses proches. Aurait-il fallut lui ressembler pour trouver son comportement normal. A cet égard, Walsh lut en lui comme dans un livre ouvert.

Fred MacMurray, qui partage l'affiche avec Flynn, craignait lui-même le comportement de l'acteur et préjugeait d'un tournage compliqué et houleux. Il n'en fut rien et le futur héro de Double Indemnity fut même surpris et ravi de la courtoisie, de l'attention et de la gentillesse du bonhomme : "J'étais certain d'avoir affaire à une tête de mule mais je suis tombé sur le plus gentil des garçons. Un compagnon sensible et compréhensif. Son comportement étrange m'a évidemment surpris mais personne ne peut lui en tenir rigueur tant il sait bien se faire pardonner". Le charme opérait encore. Toutefois, pour la première de sa carrière, le visage de Flynn commençait à montrer les stigmates de son alcoolisme. Les rides étaient de plus en plus creusées (il n'a alors que 32 ans), les paupières abaissées, les chairs gonflées... Déjà poignait le visage de l'acteur dix ans plus tard. Pas de quoi rebuter pour autant sa partenaire Alexis Smith qui, comme beaucoup d'autres avant elle, fit les frais des facéties de Flynn et succomba à son charme. Il se recroiseront trois nouvelles fois dont l'année suivante dans l'exceptionnel Gentleman Jim.

Le tournage se tint à San Diego en Californie d'octobre 1941 à fin novembre avec la collaboration avisée du Naval Air Corps. Quelques jours plus tard un raid japonnais alla frapper la base de Pearl Harbour à Hawaï et décida de l'entrée en guerre immédiate des États-Unis. Le succès du film était déjà fait bien qu'il ne sortit que dix mois plus tard. Pour autant Dive Bomber n'est pas un film belliciste censé montrer toute l'étendue de la force de frappe de la Navy ni un film destiné à vendre des bons de guerre, mais un hommage aux médecins de la NAVY et aux pilotes d'essais qui repoussèrent les limites de l'aviation militaire. Curtiz s'applique même à reproduire scrupuleusement les expériences réalisées par les médecins et suit de manière quasi-documentaire le quotidien de ses passionnés d'aviation bien décidés à faire voler leur coucou de plus en plus haut. Les personnages priment sur tout le reste, même la véracité des évènements : l'inimitié entre pilotes et médecins puis leur réconciliation sur l'autel de la science, les préoccupations techniques prévalant sur les rendez-vous galants, le deuil des disparus et l'annonce des fins de carrière (test de Schneider), seul les enjeux personnels comptent. Même si au final la petite histoire rejoint la grande et que chacune tire prestige de l'autre. Mention spéciale à Ralph Bellamy que j'ai trouvé très bon et à Errol Flynn, toujours très impliqués dans ce qu'il fait (il fait une numération!) qui après avoir porter la guerre dans ciel dans le superbe The Dawn Patrol, la porte cette fois-ci plus haut dans la stratosphère.
blig
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le 23 sept. 2014

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