Il n'y a aucun mérite à prêcher les convaincues mais, malgré tout, cette démonstration bien documentée de la mainmise systématique du "male gaze" sur les images qui nous sont proposées, voire imposées, en tant que spectateurs de tous les sexes, balance un certain nombre de beignes qui font plutôt mal aux dents. Notamment la scène d'ouverture de Carrie, qui fait aujourd'hui tomber de son canapé. Les actrices qui reviennent sur leurs débuts devant la caméra à présent que la vague #MeToo a rebattu (un peu mais insuffisamment) les cartes ne parviennent même plus à s'expliquer comment diable elles ont pu participer à des films de propagande machiste pareils. Même quand ces films étaient des chefs d’œuvre. La conférencière, elle-même réalisatrice, démonte patiemment les rouages techniques de l'asservissement féminin à travers la manipulation des images. Dans son public, les spectateurs roulent des yeux sidérés et, comme nous, prennent douloureusement conscience du lavage de cerveau dont ils ont été victimes, hommes et femmes confondus. Car c'est l'humanité elle-même, en nous tous, qui est foulée au pied, parfois par conformisme, mais dans le pire des cas par souci de perpétuer une domination masculine prédatrice et malsaine. Même un type consensuel comme Harrison Ford, archétype du brave gars, s'est prêté, peut-être malgré lui, à la propagande stupéfiante de cette culture du viol dont on a tant de mal à sortir aujourd'hui encore. Bref, une démonstration implacable qui mérite qu'on lui prête attention et qui doit provoquer une introspection en chacun d'entre nous pour arracher à la racine ce mal si profond dont on souffre tous et qui nous coupe les ailes collectivement.